Au Pakistan, le tennis est d'abord un ticket pour les universités étrangères


Vendredi 10 Juillet 2015 - 12:38
AFP


Islamabad - Sur les courts de tennis d'un club chic d'Islamabad, l'entraîneur Mahboob Khan pousse à fond ses élèves, qui plus que de Wimbledon ou Roland-Garros, rêvent surtout que ce sport leur permettra d'intégrer une grande université américaine.


En matière sportive, le Pakistan est surtout connu pour son amour invétéré du cricket et ses exploits passés en hockey sur gazon.

Le tennis vient derrière, qui continue d'attirer des jeunes dans les classes les plus favorisées. Mais ces dernières années, les priorités des jeunes ont changé sur les courts pakistanais.

En 36 ans de carrière, Mahboob Khan, 65 ans et toujours tonique, en a entraîné des dizaines, qui ont joué chez les professionnels et représenté le "pays des purs" à la Fed Cup ou la Coupe Davis.

Mais au fils des ans, ses disciples les plus talentueux ont abandonné leurs rêves de carrière professionnelle dans un milieu hyper-compétitif, pour se recentrer sur des aspirations plus pratiques. Ils voient désormais d'abord le tennis comme une porte d'entrée pour les universités américaines, qu'ils n'auraient autrement pas les moyens d'intégrer.

Sa propre fille, Sara Mahboob, 24 ans, fut classée n°1 pakistanaise pendant six années consécutives. Mais elle a abandonné la compétition après avoir obtenu un diplôme de sociologie à l'université de James Madison, aux Etats-Unis, qui lui avait octroyé une généreuse bourse d'études.

L'ancienne rivale de Sara, Natasha Afridi, ex n°2, a emprunté un chemin similaire, comme de nombreux jeunes talents du tennis pakistanais ces dernières années. "Ils optent tous pour les universités car il n'y a pas d'argent ici pour pousser les joueurs jusqu'aux circuits internationaux", explique Mahboob Khan.

- Où sont les sponsors? -

Sport réservé à une certaine élite au Pakistan, le tennis n'attire ni les fonds publics ni les sponsors privés.

"Les jeunes jouent sur le circuit national pendant un certain temps, puis essaient les tournois internationaux en juniors. Mais dès qu'ils se rendent comptent qu'ils n'ont pas le soutien suffisant pour continuer, ils optent pour les universités américaines", souligne M. Khan.

Si en Occident, des multinationales n'hésitent pas à s'associer à des jeunes joueuses de tennis qui passionneront un jour les foules sur les tournois à travers le monde, de Roland-Garros aux pays du Golfe, la situation est beaucoup compliquée au Pakistan.

"Ce n'est pas facile d'obtenir le soutien de sponsors au Pakistan, en particulier si vous êtes une joueuse de tennis", assure Sara Mahboob. "Moi, je devais prendre par exemple une décision difficile: tenter ma chance chez les pros ou aller à l'université.

Finalement, l'université m'a paru la meilleure option".

Le meilleur joueur pakistanais, Aisam-ul-Haq Qureshi, avait atteint le 8e rang mondial au classement ATP en doubles messieurs en juin 2011, après avoir atteint l'année précédente la finale de l'US Open avec son partenaire indien Rohan Bopanna.

Mais sur les courts de la capitale pakistanaise Islamabad, les jeunes ne semblent plus guère rêver à de pareils exploits.

"Je ne veux pas devenir un joueur d'élite, mais simplement obtenir une bourse dans une grande université étrangère" lance du haut de ses 12 ans Ammar Dhaga, un fils de haut fonctionnaire. A ses côtés, Sachal et Shehryar, âgés de 11 et 10 ans, opinent du bonnet avant de reprendre l'entraînement sur terre battue.


           

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