Inventer des "machines à poser des questions" pour comprendre le cosmos


Mercredi 19 Janvier 2011 - 16:11
AFP


Paris - Comprendre les premiers instants de l'univers, l'évolution du cosmos: le Français François Bouchet, astrophysicien au coeur de l'interprétation des milliards de données du satellite Planck, travaille déjà sur une prochaine génération de "machines à poser des questions".


Inventer des "machines à poser des questions" pour comprendre le cosmos
Lancé en mai 2009 pour analyser le rayonnement fossile, trace refroidie que l'univers a laissé de sa jeunesse, le satellite Planck a déjà révélé l'existence de milliers d'objets célestes froids, selon de premiers résultats publiés la semaine dernière.

Comment la "soupe primordiale", créée voici plus de 13 milliards d'années lors du Big Bang, a-t-elle évolué pour engendrer galaxies, étoiles et planètes?

Différentes théories ont été échafaudées. Planck, qui mesure le rayonnement fossile avec une sensibilité bien supérieure à celle de ses prédécesseurs Cobe et WMAP, devrait permettre "d'exclure ce qui n'est pas compatible avec les nouvelles données", explique François Bouchet.

"On construit une machine pour poser des questions et d'une certaine manière c'est un peu l'univers lui-même qui nous dit : voilà ce que je ne suis pas", résume ce chercheur de l'Institut d'astrophysique de Paris.

Planck a déjà effectué deux relevés complets du ciel, en mesurant d'infimes variations de températures - de l'ordre du millionième de degré - dans le rayonnement fossile maintenant ultrafroid (-270 °C) baignant tout l'univers. Ces fluctuations doivent dévoiler l'état de l'univers 380.000 ans après le Big Bang, quand la lumière avait jailli pour la première fois.

Les résultats cosmologiques complets sont attendus d'ici deux à trois ans, précise François Bouchet, responsable de l'exploitation scientifique des données.

Pour affiner encore la compréhension de la genèse de l'univers, le chercheur français a déjà un nouvel outil en projet: "Cosmic Origins Explorer".

Ce satellite, à lancer "entre 2020 et 2022", irait "regarder ce que Planck n'a pas encore la capacité de voir", souligne le cosmologue, coresponsable d'une proposition faite en décembre à l'Agence spatiale européenne (Esa). La réponse est "attendue dans un mois ou deux".

"Pourquoi y a-t-il des galaxies, des étoiles, des planètes, il faut bien qu'il ait un départ à tout ça ?", résume le chercheur pour expliquer sa volonté de percer les secrets des "tous premiers âges" de l'univers.

"Le vertige par rapport à l'infini, je crois qu'il est là depuis l'homme des cavernes, toutes les religions s'en sont saisi", comme en témoignent de multiples récits cosmogoniques, souligne-t-il.

A partir du XVIIe siècle en Europe, les développements de la science sont "fulgurants : en quelques siècles, on va avoir une approche scientifique de la cosmologie", rappelle-t-il.

Un modèle du Big Bang, élaboré rapidement dans la première moitié du XXe siècle, se voit confirmé par la découverte, en 1964, du rayonnement fossile, témoin du passé dense et très chaud de l'univers.

Dès son doctorat, en 1981, François Bouchet s'était intéressé aux "fluctuations primordiales", germes de futures galaxies, un sujet alors "confidentiel" en France.

Après trois ans aux Etats-Unis, à Berkeley et Princeton, hauts-lieux de la cosmologie, il s'implique dans la future mission Planck avant même la sélection du projet par l'Esa en 1996.

Le lancement du satellite Planck par la fusée Ariane, le 14 mai 2009, fut un grand moment d'émotion. "C'est un moment phénoménal. Il y a 400 tonnes de poudre qui quasiment explosent au lancement. C'est plus de 15 ans de vie qui sont sur ce gros pétard !".


           

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