Le film "Jeux interdits" ressort en version restaurée


Vendredi 18 Juillet 2014 - 15:55
AFP


Paris - "Ce film, c'est un morceau de mon enfance". A l'occasion de la sortie de "Jeux interdits" en version restaurée, le 23 juillet, Brigitte Fossey se souvient de son tout premier rôle au cinéma.


Photo prise en 1951 lors du tournage de "Jeux interdits"
Photo prise en 1951 lors du tournage de "Jeux interdits"

Visage d'ange, silhouette fluette, elle avait à peine 5 ans.

Dans ce film mythique de René Clément, sorti en 1952 et porté par une musique sur laquelle ont peiné des générations d'apprentis guitaristes, l'actrice campe une petite fille, Paulette, dont les parents sont tués lors des bombardements de juin 1940. Recueillie par une famille de paysans, elle se lie d'amitié avec le jeune garçon de la famille, Michel, 11 ans.

"La première scène que j'ai tournée, c'était la rencontre avec Georges Poujouly" (qui joue Michel), se rappelle Brigitte Fossey. "Je me souviens de ses premières phrases. Il me demandait: +T'es Parisienne toi?+ Et je lui disais: +Oui et toi?+. Et il répondait, tristement: +Non+." La petite comédienne qui vivait à Tourcoing, dans le Nord, "ne comprenait pas pourquoi il était triste de ne pas être Parisien".

Fille de cinéphiles, la petite Brigitte avait décroché le rôle grâce à une annonce dans le journal. "Mes parents avaient vu La bataille du rail, qui était un des grands films français, et ils ont accepté parce que ça devait être un court-métrage et que je devais jouer pendant les vacances".

Sur les conseils de son ami réalisateur Jacques Tati, René Clément décide finalement de faire de cette adaptation du roman de François Boyer un long métrage. Après d'intenses négociations, les parents de Brigitte consentent à ce tournage rallongé. Ils joueront même ses propres parents, tués dès les premières scènes.

La fillette se retrouve alors seule avec, dans les bras, le cadavre de son petit chien Jock, qu'elle refuse de lâcher. Et comme dans le film, elle s'y attache. "Quand les propriétaires sont venus le chercher après le tournage, je ne voulais pas qu'il parte".

 

- Couronnée à cinq ans -

 

Plus de soixante ans après, la comédienne se rappelle très bien du visionnage des premiers rushes: "Ils m'ont fait rire, rire... le lendemain j'étais totalement déconcentrée. René Clément m'a dit +Brigitte, c'est fini, tu n'iras plus voir les rushes+. Et c'était beaucoup mieux".

"Très admirative du talent" du réalisateur, elle explique qu'il "nous dirigeait comme des adultes". "Il était très dur avec Georges Poujouly, très exigeant quand Georges ne donnait pas tout ce qu'il attendait". Avec elle, il se montre plus doux mais "très précis: Il me disait: +Pleure davantage, je ne vois pas assez de larmes dans tes yeux+. Je lui disais: +ça va venir monsieur Clément+", imite-t-elle d'une petite voix.

La jeune comédienne sera "très impressionnée" en voyant le film, "projetée dans un univers de guerre". "J'étais très émue d'autant que je devais quitter Georges Poujouly", devenu un ami. Elle ne le reverra que des années plus tard, une fois adulte.

Refusé par le Festival de Cannes, le film obtint le grand prix indépendant de la Critique puis l'Oscar du Meilleur film étranger. Brigitte Fossey reçut le prix d'interprétation féminine au festival de Venise.

Mais le succès fut délicat à gérer pour la fillette de cinq ans: "Je suis entrée dans la vie professionnelle, j'ai connu l'intrusion des journalistes, les obligations... J'ai voulu fuir ce monde, retourner à l'école".

Elle reviendra toutefois devant la caméra quatre ans plus tard, et poursuivra une longue carrière dans le cinéma puis à la télévision et au théâtre.

Aujourd'hui, quand elle revoit le film qui la projeta sur le devant de la scène, elle s'avoue "bouleversée": "Je revois ces enfants. J'ai envie de prendre cette petite fille dans les bras, de la consoler. Cette enfant, c'est à la fois moi et pas tout à fait moi".



           

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