Mort de Michel Galabru, acteur insatiable, des nanars aux grands rôles


Mardi 5 Janvier 2016 - 15:29
AFP


Physique truculent et voix de méridional, Michel Galabru, qui s'est éteint dans son sommeil lundi matin, a incarné les personnages comiques dans de nombreux nanars mais aussi tenu de grands rôles au cinéma et au théâtre.


Acteur boulimique, il a rapidement gagné une stature d'acteur populaire, notamment avec "Le Gendarme de Saint-Tropez" de Jean Girault en 1964, aux côtés de Louis de Funès, mais la reconnaissance de la profession fut plus tardive.

Il décroche le César du meilleur acteur en 1977 pour son rôle dans "Le Juge et l'Assassin" de Bertrand Tavernier (avec Philippe Noiret) et son premier Molière à 85 ans en avril 2008 pour "Les chaussettes opus 124", où il interprète avec génie un vieil acteur cabot qui tente un come-back.

"J'ai eu quand même quelques beaux textes au cinéma, parmi beaucoup de navets, pour manger et échapper au fisc", disait-il avec sa faconde habituelle.

François Hollande a salué lundi une "figure familière" pour des "générations de Français".

"Je l'aimais. Tout le monde l'aimait, acteurs, public, au revoir cher Michel", a tweeté Johnny Hallyday tandis que la Gendarmerie nationale rendait hommage au "dernier gendarme de Saint-Tropez!"

Alain Delon, qui a tourné avec lui dans "Notre histoire" de Bertrand Blier, a salué "un très Grand" et Isabelle Adjani, se disant "orpheline", "la dernière grande figure de drôles de drames".

Né le 27 octobre 1922 à Safi (Maroc), Michel Galabru entre au Conservatoire d'art dramatique d'où il sort avec deux premiers prix. Il est à la Comédie-Française de 1950 à 1958, où il joue Molière, Marivaux, Feydeau, Courteline.

Au cinéma, il entame sa carrière en 1951 avec "Ma femme, ma vache et moi" (Jean Devaivre) puis enchaîne les petits rôles. La notoriété vient avec avec "La guerre des boutons" (1961, Yves Robert) et surtout la série des "Gendarmes" de Jean Girault, qui démarre en 1964.

S'en suit une longue liste de nanars aux titres pittoresques, au fil des années 60 et 70: "Le facteur s'en va-t-en guerre", "Poussez pas grand-père dans les cactus", "La dernière bourrée à Paris", "Le plumard en folie"...

Il n'a jamais renié ses innombrables films alimentaires: "On sait bien qu'on a fait un film minable, mais on l'a fait en pensant au chèque, parce qu'on en avait besoin, point à la ligne", déclarait le comédien, lucide et sans regrets.

- Un acteur généreux -

Au total, cet acteur insatiable a tourné quelque 200 films, dont beaucoup de grands films comiques, comme "Le Viager" de Pierre Tchernia (1972) ou "La cage aux folles" (1978).

En 1976, Bertrand Tavernier lui offre le rôle d'un tueur dans la France du XIXème siècle, dans "Le juge et l'assassin", face à Philippe Noiret et Isabelle Huppert, peut-être son meilleur rôle.

Il joue aussi quelques seconds rôles marquants: "Une semaine de vacances" de Bertrand Tavernier, "Celles qu'on n'a pas eues" de Pascal Thomas, "L'été meurtrier" de Jean Becker, "Notre histoire" de Bertrand Blier, "Subway" de Luc Besson, "Soigne ta droite" de Jean-Luc Godard...

Dans "Bienvenue chez les Ch'tis", film phénomène de l'année 2008, quelques minutes lui suffisent pour marquer les esprits avec une scène d'anthologie, où il décrit à son neveu les misères du nord de la France. Son réalisateur Dany Boon s'est dit "triste" lundi: "on a toujours le sentiment que ces acteurs qu'on connait depuis l'enfance sont éternels, qu'ils ne mourront jamais…"

Michel Galabru se voulait avant tout un homme de théâtre. "Je voulais être Sacha Guitry. Je ne suis que Michel Galabru. Ce n'est qu'un quart de réussite", regrettait le comédien, qui cachait ses doutes sous des airs rigolards.

Il a pourtant servi de grands textes ("Don Juan" et "Le Bourgeois gentilhomme" de Molière, "Les Rustres" et "Le Riche convoité" de Goldoni) comme des oeuvres populaires ("La claque" d'André Roussin, "L'entourloupe" et "Monsieur Amédée" d'Alain Reynaud-Fourton).

Il était encore en tournée il y a deux ans avec "La femme du boulanger" de son auteur fétiche Marcel Pagnol.

En novembre, très affecté par les décès successifs de son frère et de son épouse, il avait annulé la pièce autobiographique qu'il devait reprendre au théâtre Montmartre-Galabru, "Le Cancre".

Ce "pince-sans-rire", comme le décrit le réalisateur Jean-Pierre Mocky, avait indiqué en juin 2011 au quotidien La Provence qu'il souhaitait pour épitaphe: "Ici Galabru repose, il ne fit jamais autre chose".


           

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