Suite à la mort de l’ambassadeur américain, les Libyens se mobilisent pour la paix


Mardi 2 Octobre 2012 - 12:02
CGNews - Yusra Tekbali


Tripoli – Le vendredi 21 septembre, on a célébré la journée internationale de la paix. A cette occasion, les Libyens - encore bouleversés par la mort tragique de l’ambassadeur des Etats-Unis Christopher Stevens dans un attentat contre le consulat américain de Benghazi - ont marqué le coup par une marche de la paix pour montrer au monde entier que la vaste majorité d’entre eux rejettent la violence. J’ai également participé à cette marche qui m’a permis de réfléchir sur l’avenir de mon pays et de m’interroger sur la façon dont on pourra aller de l’avant après toute cette violence.


Suite à la mort de l’ambassadeur américain, les Libyens se mobilisent pour la paix
En faisant la révolution, les Libyens avaient espéré instituer un pays démocratique, dépourvu de violence, un pays qui jouerait un rôle positif sur la scène internationale et qui tiendrait compte de tous ses citoyens. Aujourd’hui, plus que jamais, il faut que les Libyens et leur gouvernement fassent ensemble des efforts pour ne pas perdre de vue cet objectif.

La dernière fois que j’ai vu l’ambassadeur Stevens, c’était à l’Aéroport international de Tripoli : il attendait son vol pour Benghazi. Nous avons discuté de l’Amérique et de la Libye. Je lui ai demandé pourquoi il se rendait à Benghazi et il m’a répondu : « J’adore Benghazi. J’y suis resté huit mois pendant la révolution et j’y ai de nombreux amis. »

Le fait que l’ambassadeur avait de nombreux amis rend sa mort d’autant plus tragique, une mort regrettée à la fois par les Etats-Unis et par la Libye, qui ont tous deux condamné l’acte de terrorisme mené par une minorité violente. D’ailleurs, peu après la mort de l’ambassadeur, des vidéos ont circulé, montrant des Libyens en train d’essayer de le sauver.

Les amis de Christopher Stevens, de tous horizons et de toutes tendances politiques, se sont réunis, partout en Libye, pour pleurer sa mort. Ils ont déposé des couronnes de fleurs à sa mémoire et ont nettoyé le consulat américain à Benghazi. Ils ont également appelé les Libyens à manifester pacifiquement pendant une journée pour exiger du gouvernement d’en venir à bout des milices armées et de l’anarchie qui règne dans le pays.

La Libye est toutefois en train de lutter pour aller de l’avant. L’élection du premier ministre par le Congrès national général a permis de montrer aux citoyens ainsi qu’au monde entier que la Libye s’engage dans la voie de la démocratie et qu’elle continuera à persévérer sur ce chemin malgré les difficultés.

Au lendemain de l’attentat contre le consulat américain, l’opinion publique libyenne s’est largement indignée contre la présence des milices dans le pays. La semaine dernière, les Libyens ont manifesté en grand nombre à Benghazi pour inciter le gouvernement à prendre plus de mesures contre ces groupuscules. Le gouvernement a réagi en demandant la dissolution de ces milices, en particulier celle responsable de cet attentat.

A mesure que la Libye évolue, il est important qu’elle s’intègre dans la communauté internationale. Le rôle – positif ou négatif - des Etats-Unis en Libye est très débattu en ce moment au niveau international. Dans ce débat, nous ne devons pas oublier que les Libyens eux-mêmes sont nombreux à avoir une opinion positive des Etats-Unis. Dans une lettre dans la tribune libre du Washington Post, le tout nouveau premier ministre libyen, Mustafa Abu Shagur, a fait remarquer, à juste titre, que d’après un sondage Gallup du mois d’août, la majorité de ses compatriotes approuve le rôle des Etats-Unis en Libye, en tant que membres de la coalition internationale aux côtés notamment de pays arabes.

Depuis la révolution, la Libye assiste à la renaissance de sa culture politique. Cela prendra de nombreuses années pour réussir : les lois seront rédigées et amandées, la constitution doit être encore élaborée et le gouvernement doit gérer le problème des milices qui agissent illégalement. De plus, il faut que les Libyens fassent des efforts pour se réconcilier et mettre fin aux divisions internes, d’une part entre partisans du régime Kadhafi et ses opposants, et d’autre part entre les exilés rentrés au pays et ceux qui ne l’ont jamais quitté.

Parfois, la voix de ceux qui ont lutté dans la révolution est à peine audible dans la cacophonie qui règne dans ce nouveau pays naissant. L’une de ces voix est celle du journaliste Mohammed Nabbous, tué par les forces de Kadhafi au cours de la révolution, et dont la vie inspire toute une génération. Il avait dit : « Une bougie ne perd rien si elle sert à en allumer une autre ».

Je me suis souvenu de cette phrase la semaine dernière, tandis que mes compatriotes allumaient des bougies à la mémoire de l’ambassadeur défunt – en se tenant debout - au sens propre et figuré - pour la paix et l’harmonie.

Espérons qu’on ne se contentera pas d’évoquer les idéaux de ceux qui ont lutté dans la révolution pour la liberté et la dignité, et qu’on les concrétisera. Espérons, aussi, que la force et l’engagement que l’ambassadeur Stevens a mis au service de la démocratie lui survivront.


           

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