"Transatlantic": Colum McCann franchit l'océan sur les ailes de géants


Vendredi 28 Juin 2013 - 11:23
AFP


Paris - Avec "Transatlantic", l'un des romans événements de la rentrée, Colum McCann réussit le tour de force de fondre trois destins inoubliables en une odyssée captivante sur deux siècles, entre Irlande et Amérique, Histoire et fiction, idéalisme et dépassement de soi.


"Transatlantic": Colum McCann franchit l'océan sur les ailes de géants
"Pour moi, la fiction est aussi vraie que la réalité", dit à l'AFP l'auteur irlandais, de passage à Paris, dont le roman sort le 22 août chez Belfond. Il est paru récemment aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne.

Dans "Transatlantic", l'auteur du best-seller mondial "Et que le vaste monde poursuive sa course folle", né en Irlande en 1965 et qui vit à New York depuis vingt ans, fait le pont entre le Nouveau monde et l'Ancien. Il relie par la fiction romanesque les destinées de héros réels et d'immigrés transatlantiques imaginaires, du XIXe siècle à nos jours, de l'esclavage des Noirs aux pourparlers de paix en Irlande du Nord.

Le roman débute par l'histoire de deux pionniers injustement méconnus, auteurs du premier vol transatlantique sans escale. En 1919, près de dix ans avant Lindbergh, Jack Alcock et Arthur Brown rejoignent l'Irlande depuis la côte américaine à bord d'un bombardier Vickers bricolé. Au-delà de cet exploit spectaculaire, les aviateurs cherchent à dépasser l'horreur de la Grande Guerre et à panser leurs plaies.

"Je ne savais rien d'eux mais j'ai découvert leur exploit, leur vie, et fait de nombreuses recherches. Leur histoire m'a fasciné", relève l'écrivain.

De même, Colum McCann connaissait bien sûr Frederick Douglass (1818-1895), le plus célèbre abolitionniste américain, né esclave, devenu écrivain et homme politique. Mais le romancier ignorait presque tout de sa tournée en Irlande et en Angleterre en 1845 et 1846.

Après s'être beaucoup documenté, il livre un récit passionnant et parfois surréaliste de la rencontre de ce Noir, toujours esclave dans son pays, avec les Irlandais nantis, sympathisants de la cause abolitionniste, mais aussi avec les victimes de la "grande famine de la pomme de terre", dont la misère absolue le stupéfait.

Incroyable idéalisme

En Irlande, "j'ai été traité comme un homme, non comme +un homme de couleur+", s'enthousiasmait l'auteur de "La vie de Frederick Douglass, esclave américain, écrite par lui-même".

Puis, Colum McCann fait un saut dans le temps. Nous sommes en 1998. Laissant à New York sa jeune épouse et leur nouveau-né, le sénateur américain George Mitchell, artisan de la paix en Irlande du Nord, fait d'incessants allers et retours entre les Etats-Unis et Belfast, s'engageant corps et âme pour parvenir à conclure ces pourparlers si périlleux.

"C'est par lui que j'ai commencé à écrire mon livre, même s'il est le dernier personnage du roman. Pour moi, c'est un héros. J'ai voulu montrer l'intensité de son travail mais aussi imaginer son intimité: l'épuisement, l'espoir et le découragement, la solitude, sa passion pour le tennis...", explique Colum McCann. L'ancien sénateur, 79 ans aujourd'hui, a été aussi l'émissaire d'Obama pour le Proche-Orient, avant de démissionner en 2011.

"J'avais promis à son épouse Heather qui est agent littéraire de lui faire lire ce que j'écrivais sur eux. Elle m'a dit: +j'aime vraiment ce que j'ai lu, sauf que George n'aurait jamais porté de chaussures marron !+. Alors, j'ai changé la couleur...", sourit-il. "Mais je n'ai pas voulu rencontrer George Mitchell".

"Tous ces personnages partagent un même incroyable idéalisme. Tout en restant réalistes. Surtout, ce sont des hommes pleins d'espoir, ou du moins, qui ont cette capacité d'espérer", souligne Colum McCann.

Ces trois traversées de l'Atlantique hautement symboliques sont connectées dans le roman par un fil d'Ariane: une lettre, emportée par les aviateurs, et des femmes d'une trempe exceptionnelle, nées de l'imagination de l'auteur, qui de génération en génération croisent le chemin des héros.

"Comment négocier entre ce qui est vrai ou pas, c'est aujourd'hui la grande question pour un romancier", remarque Colum McCann dont les livres sont traduits dans plus de 35 langues.


           

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