Trump signe un décret migratoire amendé et à nouveau contesté


Mardi 7 Mars 2017 - 12:50
AFP


Donald Trump a signé lundi un nouveau décret interdisant pendant 90 jours l'entrée des États-Unis aux ressortissants de six pays musulmans, décret amendé en vue de passer l'obstacle de la justice et d'éviter le tollé mondial de sa première version.


L'accueil de réfugiés est également suspendu pendant 120 jours, le temps de mettre en place de nouvelles procédures permettant de vérifier le passé des demandeurs.

Le président américain continuait parallèlement à se battre sur un autre front, avec l'affaire des contacts supposés entre son entourage et des responsables russes pendant la campagne présidentielle.

Après avoir accusé ce week-end Barack Obama de l'avoir placé sur écoute avant l'élection, il a demandé au Congrès d'élargir son enquête et d'intensifier la chasse aux "fuiteurs".

M. Trump, invisible lundi, a signé le décret dans le Bureau ovale, et non lors d'un événement médiatisé. Il entrera en vigueur le 16 mars.

Ce décret "est une mesure vitale pour renforcer notre sécurité nationale", a assuré le chef de la diplomatie américaine, Rex Tillerson, lors d'une déclaration avec ses homologues de la Justice et de la Sécurité intérieure.

"Les principes du décret restent les mêmes", a assuré Sean Spicer, porte-parole de la Maison Blanche.

Principaux amendements par rapport au décret du 27 janvier, bloqué par la justice fédérale: l'Irak ne fait plus partie des pays dont les ressortissants ne pourront plus entrer aux États-Unis, et les résidents permanents ("cartes vertes") ainsi que les détenteurs de visas sont explicitement protégés.

Pour les réfugiés, la pause durera 120 jours, comme auparavant. Mais cette fois cela vaut également pour les réfugiés syriens, qui étaient bannis indéfiniment dans le précédente mouture du texte. Quant aux réfugiés dont le voyage aux États-Unis était déjà planifié, ils pourront s'y rendre.

- Décret plus solide -

Ce décret présidentiel est le prélude à la mise en place d'une politique de "vérification extrême" aux frontières -qui reste à définir- afin d'empêcher des infiltrations jihadistes.

L'administration a justifié l'urgence de ces mesures en affirmant qu'environ 300 personnes entrées comme réfugiés faisaient actuellement l'objet d'une enquête antiterroriste du FBI.

Avec le premier décret, suspendu par un juge le 3 février et définitivement révoqué lundi, Donald Trump avait été accusé de discrimination -potentiellement anticonstitutionnelle- envers les musulmans. Cette nouvelle version est présentée comme plus solide juridiquement.

Beaucoup plus détaillé, ce décret nouvelle version est deux fois plus long. Et la préférence accordée aux minorités religieuses persécutées, qui avantageait les chrétiens, a été supprimée.

De multiples exemptions possibles, au cas pour cas, sont énumérées: ceux qui rendraient visite à de la famille, auraient un enfant nécessitant des soins d'urgence, ou encore les étrangers ayant travaillé pour l'armée américaine, allusion probable aux interprètes irakiens, dont certains avaient été bloqués dans les aéroports.

Et le président décrit en longueur la situation sécuritaire des six pays frappés d'interdiction.

Il s'agit des trois pays listés par les États-Unis comme "soutenant le terrorisme" (Iran, Syrie, Soudan), ainsi que trois États "compromis de façon significative par des organisations terroristes" ou étant théâtres de "zones de conflit actives" (Libye, Somalie, Yémen). Vérifier les antécédents des demandeurs s'y avère impossible, selon l'administration américaine.

- Stigmatisant -

Cette réécriture a satisfait la majorité républicaine, dont beaucoup s'étaient désolidarisés du gouvernement.

"Ce nouveau décret promeut notre objectif commun de protéger le pays", s'est félicité Paul Ryan, président de la Chambre des représentants.

Mais les ONG et l'opposition démocrate ont dénoncé un texte à peine édulcoré, toujours discriminatoire.

La grande association de défense des droits civiques ACLU a promis de le contester, en donnant "Rendez-vous au tribunal" sur Twitter.

"Ce nouveau décret stigmatise toujours l'islam et les musulmans. Il ne rend pas l'Amérique plus sûre, mais il la rend moins grande", a déploré pour sa part Nihad Awad, directeur du CAIR, le Conseil des relations américano-islamiques.

L'Irak n'est plus visé car son gouvernement aurait accepté de fournir des informations supplémentaires sur ses citoyens demandant des visas. Bagdad, qui avait protesté d'être mis au ban, s'est félicité du revirement.

Pendant la pause de 120 jours, Washington demandera à certains pays de partager plus d'informations.

Avec ce lancement précautionneux, l'exécutif souhaite éviter les scènes de confusion vues dans les aéroports fin janvier, quand le décret avait été appliqué sans avertissement.

"Il n'y aura pas de chaos dans les aéroports", a expliqué un haut responsable du ministère de la Sécurité intérieure. "Si vous avez un visa valide, vous n'aurez pas de problème", a assuré un haut responsable du département d’État.


           

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