Universités : le mouvement de protestation marque le pas


Vendredi 27 Février 2009 - 10:14
Le Monde.fr


Pour un mouvement qui aime se référer à la lutte de 2006 contre le CPE, le compte n'y était pas. La journée de manifestations, jeudi 26 février, des universitaires et des étudiants contre les réformes du gouvernement a réuni des cortèges sensiblement moins nombreux que lors de la précédente journée d'action le jeudi 19 février.


Universités : le mouvement de protestation marque le pas
Au total, selon un décompte réalisé jeudi par l'AFP dans une quinzaine de villes, cette quatrième journée d'action a réuni entre 17 000 et 33 000 personnes selon les sources. A titre de comparaison, ils étaient entre 43 000 et 100 000 le 10 février au niveau national.
En déduire qu'après les concessions faites mercredi par le premier ministre, le mouvement aurait déjà entamé sa décrue serait aventureux à ce stade. D'autant que dans certaines zones, notamment en Ile-de-France, ainsi qu'à Bordeaux ou Limoges, plusieurs universités sont encore en période de vacances scolaires.
A Paris, les manifestants (3 800 selon la police, 10 000 selon les organisateurs) ont procédé à un enterrement symbolique de l'enseignement supérieur et de la recherche, en défilant, certains vêtus de noir, de Port-Royal jusqu'au Panthéon. Parmi les manifestants, Isabelle This Saint-Jean, présidente du collectif Sauvons la recherche (SLR), admettait que le gouvernement avait fait "un pas en avant" sur le statut des enseignants-chercheurs, mais relevait qu'il n'avait pris "aucun engagement" concernant les organismes de recherche. Plusieurs responsables du Snesup-FSU, syndicat majoritaire parmi les enseignants-chercheurs, ont réitéré le jugement porté par leur organisation sur les annonces du gouvernement, "insuffisantes" à leurs yeux. "La mobilisation, ont-ils assuré, est très loin de s'affaiblir, au vu des échos que nous avons en régions."
"On ne tombera pas dans le panneau"
A Lyon, ces annonces n'ont pas calmé les esprits : près de 2 500 étudiants et professeurs ont défilé jeudi pour réclamer l'abrogation de la loi LRU sur l'autonomie des universités. "On ne tombera pas dans le panneau de cette tentative de désamorçage. Les propositions sont insuffisantes. Il n'est pas seulement question du statut des enseignants, mais du sauvetage des universités", expliquait Alain Castera, ingénieur au CNRS et militant à Sud-Recherche. Précarité, dégradations des conditions d'études, disparition de filières : autant de préoccupations exprimées de manière véhémente dans les rangs étudiants, où la plupart des écoles et universités étaient représentées. A peine le défilé dispersé, les manifestants évoquaient la prochaine journée d'action, jeudi 5 mars.
A Toulouse, sous un soleil printanier, la manifestation était nettement plus étoffée que la semaine précédente : près de 3 000 selon la police, et 7 000 selon les organisateurs (contre un millier jeudi dernier). Le cortège a reçu la visite du député-maire, Pierre Cohen (PS), lui-même ancien chercheur en informatique à l'université Paul-Sabatier. Des étudiants en musicologie ont improvisé une chorale sur la place du Capitole. Les gages donnés par le gouvernement sur le décret Pécresse ou le nombre de postes dans les universités ne semblent pas entamer la combativité des manifestants, qui réclamaient le retrait pur et simple de la loi LRU et de la réforme de la formation des maîtres.
"Le gouvernement est obligé de reculer"
A Nantes, la mobilisation n'est pas non plus en baisse. Près d'un millier d'étudiants ont défilé jeudi dans les beaux quartiers. Selon les codes en vigueur pour parodier une manif dite "de droite", ils portaient le costume-cravate ou la jupe stricte en flanelle. Une bonne centaine d'enseignants figurait dans le cortège. La réécriture du décret sur les enseignants chercheurs ? "Elle montre que le gouvernement est obligé de reculer. Mais il n'y a rien de changé sur la réforme des IUFM, sur la question sociale et sur l'application de la LRU", fait observer Mathias Tessier (Unef). Les non-suppressions d'emplois en 2010-2011 ? "Le gouvernement ne revient pas sur les suppressions de postes immédiates", estime l'enseignant-chercheur Hervé Lelourec (Snesup).
A Nancy, en revanche, l'appel à manifester lancé mardi lors d'une assemblée générale à la fac de lettres n'a guère eu d'écho : ils étaient moins de 200 à défiler jeudi après-midi. "Ce n'est pas parce que nous sommes peu nombreux aujourd'hui dans la rue que nous sommes démobilisés", objecte Laurent Guichard, enseignant en histoire à Nancy 2, qui concède que la situation a quelque peu évolué. "Sur les statuts, ça bouge dans le bon sens, et ils semblerait que le premier ministre ait donné des assurances sur l'emploi pour 2010 et 2011. Mais il y a encore un lourd passif", explique l'enseignant, faisant notamment référence à la réforme Darcos de la formation des maîtres. "Ni surpris ni déçu" par le petit nombre de manifestants, Micheal Protain, de l'UNEF, jugeait "normale cette petite baisse de tension juste après des vacances".
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Luc Cédelle, Arnaud Guiguitant (à Lyon), Monique Raux (à Nancy), Frédéric Testu (à Nantes) et Stéphane Thépot (à Toulouse)


           

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