Azzouz Tnifass
Mr Tnifass, vous avez déclaré dans une interview récente qu’« au moment où le monde entier est à la recherche de l’authenticité, nous détournons notre regard.(…) nous avons essayé de faire de Marrakech une sorte de Marbella continentale alors que c’est son authenticité qui était apprécié par ses visiteurs célèbres ». Voulez- vous dire que les projets de Marrakech sont en train de faire disparaitre l’être de la ville ocre ? Et comment ?
A.Tnifass : Marrakech à la différence de nombreuses cités marocaines a gardé sa population citadine et ses savoirs vivre durant le XXème siècle, et la modernité l’a juste effleuré. Finalement elle s’est retrouvée dépositaire d’un style de vie d’une grande authenticité, que d’autre avaient un peu perdu. C’était son atmosphère comme mise sous cloche, qui a fasciné d’abord les hippys des années 70, et dix ans après, les bobos (bourgeois bohèmes) qui ont apprécié le confinement et le raffinement de ses riads, las qu’ils étaient de la trépidante modernité. Les objets anciens de Marrakech avaient séduit aussi tous les esthètes, pour leur patine.
Il nous faut reconnaitre que les marocains n’étaient pour rien dans le démarrage de l’engouement pour Marrakech. Nous avons pris un train en marche sans savoir la direction qu’il prenait. Au lieu de faire une densification de l’offre culturelle, nous avons multiplié les boites de nuit.
Marrakech aurait pu être une sorte de Florence avec des musées qui se respectent, une redéfinition de la ville autour des places, des jardins (ce qui a été fait sans esprit de cohérence), avec un choix audacieux et serein de limiter son urbanisation galopante. Regardez les monuments que les touristes visitent, ils sont en deçà des normes d’accueil et de leur mise en valeur intellectuelle. Tout cela est un fait relâché, et sans qualité.
Encore une fois Marrakech doit se repositionner sur la culture et les savoirs- faire anciens, et arrêter avec ce travestissement en Marbella continentale.
Cette perte de l’identité culturelle spécifique de la ville ocre est la raison qui vous a poussé à écrire votre livre « Esprit de Marrakech ». Les décideurs de la ville ont-ils besoin d’être sensibilisés ou vous adressez-vous, par votre livre, à tout le monde ?
A.Tnifass : Sincèrement ce livre est parti d’une colère contre ce que je viens de dire, et en tant qu’historien de l’art et critique je me devais de dire combien Marrakech est une ville inspiratrice pour les artistes marocains et étrangers depuis au moins un siècle. Les décideurs publics et privés semblent ignorer cela. Donc modestement, d’ailleurs je ne suis pas le seul à l’avoir fait, j’ai voulu rappeler cette vérité. J’espère qu’elle touchera les visiteurs étrangers mais aussi les étudiants Marrakchis fiers de leur ville. Ailleurs ce genre de publication n’est vraiment pas originale, vous trouvez dans toutes les villes européennes les traces des artistes qui y ont vécu.
Marrakech a été l’objet de plusieurs reportages de la presse écrite et de chaines de télévision étrangères, depuis une quinzaine d’années, et j’ai comme l’impression que cela n’a pas eu d’impact pour arrêter les dégâts ; l’identité de cette ville continue de disparaitre et son âme de plus en plus aussi. Que pensez-vous de cela ?
A.Tnifass : Encore une fois Marrakech est trop près de nous, et nous ne voyons pas assez son originalité et la fascination qu’elle exerce sur les étrangers. Et ainsi elle a manqué d’un projet à sa hauteur. Elle est devenue un peu tout et n’importe quoi, alors qu’elle a de quoi être l’équivalente d’une ville de la Renaissance espagnole ou italienne. Maintenant je vais vous dire une chose: la crise actuelle est en train de corriger tout cela, le n’importe quoi va céder la place à une vision pour cette ville, sinon elle risque de perdre pour toujours le secret de son attractivité.
Est-ce que d’autres villes ou régions connaissent actuellement ce phénomène au Maroc?
A.Tnifass : Au contraire Tanger est en train de chambouler son image, comme Rabat d’ailleurs, en misant toutes les deux sur la culture. Ici je veux aborder un sujet tabou, celui du tourisme sexuel. La nuit à Paris, il y a Pigalle, la rue Saint Denis, le Crazy horse…, mais le jour il y a le Louvre, Orsay, le Musée de l’homme…etc. C’est quand il n’y a que le sexe, que la vulgarité et l’indécence deviennent visibles.
Que proposez- vous aux décideurs centraux ou locaux pour sauvegarder l’authenticité patrimoniale et culturelle de Marrakech tout en développant la ville ?
A. Tnifass : Il faut réellement un plan d’actions pour redorer le blason de cette ville. Je ne crois pas aux études et autres élucubrations, il faut faire un appel d’offre à idées, avec des garanties de transparences. Prendre les meilleurs et les appliquer. Moi- même j’en ai deux ou trois.
Un mot pour les lecteurs du magazine Emarrakech
A. Tnifass : Il faut simplement aimer cette ville, en gardant son authenticité.
A.Tnifass : Marrakech à la différence de nombreuses cités marocaines a gardé sa population citadine et ses savoirs vivre durant le XXème siècle, et la modernité l’a juste effleuré. Finalement elle s’est retrouvée dépositaire d’un style de vie d’une grande authenticité, que d’autre avaient un peu perdu. C’était son atmosphère comme mise sous cloche, qui a fasciné d’abord les hippys des années 70, et dix ans après, les bobos (bourgeois bohèmes) qui ont apprécié le confinement et le raffinement de ses riads, las qu’ils étaient de la trépidante modernité. Les objets anciens de Marrakech avaient séduit aussi tous les esthètes, pour leur patine.
Il nous faut reconnaitre que les marocains n’étaient pour rien dans le démarrage de l’engouement pour Marrakech. Nous avons pris un train en marche sans savoir la direction qu’il prenait. Au lieu de faire une densification de l’offre culturelle, nous avons multiplié les boites de nuit.
Marrakech aurait pu être une sorte de Florence avec des musées qui se respectent, une redéfinition de la ville autour des places, des jardins (ce qui a été fait sans esprit de cohérence), avec un choix audacieux et serein de limiter son urbanisation galopante. Regardez les monuments que les touristes visitent, ils sont en deçà des normes d’accueil et de leur mise en valeur intellectuelle. Tout cela est un fait relâché, et sans qualité.
Encore une fois Marrakech doit se repositionner sur la culture et les savoirs- faire anciens, et arrêter avec ce travestissement en Marbella continentale.
Cette perte de l’identité culturelle spécifique de la ville ocre est la raison qui vous a poussé à écrire votre livre « Esprit de Marrakech ». Les décideurs de la ville ont-ils besoin d’être sensibilisés ou vous adressez-vous, par votre livre, à tout le monde ?
A.Tnifass : Sincèrement ce livre est parti d’une colère contre ce que je viens de dire, et en tant qu’historien de l’art et critique je me devais de dire combien Marrakech est une ville inspiratrice pour les artistes marocains et étrangers depuis au moins un siècle. Les décideurs publics et privés semblent ignorer cela. Donc modestement, d’ailleurs je ne suis pas le seul à l’avoir fait, j’ai voulu rappeler cette vérité. J’espère qu’elle touchera les visiteurs étrangers mais aussi les étudiants Marrakchis fiers de leur ville. Ailleurs ce genre de publication n’est vraiment pas originale, vous trouvez dans toutes les villes européennes les traces des artistes qui y ont vécu.
Marrakech a été l’objet de plusieurs reportages de la presse écrite et de chaines de télévision étrangères, depuis une quinzaine d’années, et j’ai comme l’impression que cela n’a pas eu d’impact pour arrêter les dégâts ; l’identité de cette ville continue de disparaitre et son âme de plus en plus aussi. Que pensez-vous de cela ?
A.Tnifass : Encore une fois Marrakech est trop près de nous, et nous ne voyons pas assez son originalité et la fascination qu’elle exerce sur les étrangers. Et ainsi elle a manqué d’un projet à sa hauteur. Elle est devenue un peu tout et n’importe quoi, alors qu’elle a de quoi être l’équivalente d’une ville de la Renaissance espagnole ou italienne. Maintenant je vais vous dire une chose: la crise actuelle est en train de corriger tout cela, le n’importe quoi va céder la place à une vision pour cette ville, sinon elle risque de perdre pour toujours le secret de son attractivité.
Est-ce que d’autres villes ou régions connaissent actuellement ce phénomène au Maroc?
A.Tnifass : Au contraire Tanger est en train de chambouler son image, comme Rabat d’ailleurs, en misant toutes les deux sur la culture. Ici je veux aborder un sujet tabou, celui du tourisme sexuel. La nuit à Paris, il y a Pigalle, la rue Saint Denis, le Crazy horse…, mais le jour il y a le Louvre, Orsay, le Musée de l’homme…etc. C’est quand il n’y a que le sexe, que la vulgarité et l’indécence deviennent visibles.
Que proposez- vous aux décideurs centraux ou locaux pour sauvegarder l’authenticité patrimoniale et culturelle de Marrakech tout en développant la ville ?
A. Tnifass : Il faut réellement un plan d’actions pour redorer le blason de cette ville. Je ne crois pas aux études et autres élucubrations, il faut faire un appel d’offre à idées, avec des garanties de transparences. Prendre les meilleurs et les appliquer. Moi- même j’en ai deux ou trois.
Un mot pour les lecteurs du magazine Emarrakech
A. Tnifass : Il faut simplement aimer cette ville, en gardant son authenticité.