Comédie Française: Muriel Mayette monte Shakespeare en pleine guerre de succession


Mercredi 5 Février 2014 - 17:22
AFP


Paris - C'est un "Songe" qui aurait pu virer au cauchemar: la patronne de la Comédie-Française Muriel Mayette-Holtz dirige un bon tiers de la troupe dans "Le Songe d'une nuit d'été", dans un climat tendu par la guerre de succession pour la direction de la prestigieuse maison.


Muriel Mayette-Holtz
Muriel Mayette-Holtz
A quelques jours de la première samedi, les comédiens concentrés répètent dans un beau décor blanc, "le lit des songes", dit-elle. Les querelles sont restées au vestiaire. Le professionnalisme l'emporte.

"La fin de mon mandat, c'est au mois d'août, je me tue à le dire. Là, je suis concentrée sur +Le Songe+, point", balaie l'administratrice générale. Pour autant, elle sait "évidemment" qu'on l'attend au tournant avec cette mise en scène du chef-d'oeuvre de Shakespeare.

Muriel Mayette, 49 ans, première femme nommée à la tête de la Comédie-Française en 2006, fait face à une salve de critiques depuis quelques mois: elle aurait surmédiatisé son mariage avec le journaliste sportif Gérard Holtz en avril 2013, sa programmation serait "médiocre", ses choix de metteurs en scène discutables. En octobre, le quotidien Le Monde fustigeait le "Hamlet" monté par l'Anglais Dan Jemmett comme "le ratage de trop pour Muriel Mayette-Holtz".

En décembre, la fuite dans Le Figaro d'une lettre des sociétaires adressée à la ministre de la Culture demandant "unanimement une autre étape" ouvrait la succession avec six mois d'avance sur le calendrier.

Une "maladresse", dit Muriel Mayette. "Pourquoi cette lettre est sortie alors qu'elle ne devait pas sortir, certains ont même dit que c'était moi qui l'avait donnée, surréaliste !"

Selon une source interne à la maison, cette lettre voulait surtout prendre date face à d'éventuelles candidatures extérieures, comme celle de Christian Schiaretti, qui dirige le TNP de Villeurbanne. En interne, Eric Ruf, comédien et metteur en scène, est candidat.

"Je ne suis pas morte !"

Pas question pour Muriel Mayette de dire maintenant si elle sera candidate à un nouveau mandat, même si elle glisse que "ce n'est pas une fin en soi d'être là". "Etre comédien ce n'est pas forcément être comédien ici. Je ne suis pas morte", lance-t-elle, manière de dire que oui, il y a une vie après la Comédie-Française.

Pour l'instant, seul compte "Le Songe": "la folie et la réalité c'est que je travaille très bien avec eux, j'adore mes acteurs et le travail qu'on fait ensemble".

Sur la scène, une bande de jeunes acteurs prodiges qui font dire dans le monde du théâtre que la troupe n'a jamais été si talentueuse. "Les jeunes premiers c'est Sébastien Pouderoux, Laurent Lafitte, Adeline d'Hermy et Suliane Brahim", énumère Muriel Mayette, ajoutant fièrement, "c'est moi qui les ai engagés". "C'est un bonheur d'être avec eux parce que je pense que c'est une pièce de jeunes, il faut de l'engagement physique pour jouer ça, Shakespeare n'est pas un auteur psychologique, il faut un rapport au corps."

Des costumes inspirés du peintre Jérôme Bosch donnent au monde des fées "un rapport à la sexualité animale". La Cour, en habit d'aujourd'hui, est "dans la salle avec les spectateurs". "Ce pourrait être le prince Rainier ou la reine d'Angleterre, des gens qui ont de l'argent et qui pour leur fête ou leur mariage convoquent la Comédie-Française pour leur faire du théâtre", explique-t-elle.

Si elle défend le "Hamlet" iconoclaste de Dan Jemmett, transposé dans un pub avec juke-box - "je défie des metteurs en scène d'intéresser des jeunes de 15 ans à +Hamlet+" -, Muriel Mayette s'inscrit dans "une école classique".

"Ma signature, c'est toujours un acteur le plus seul possible, le plus libre possible, je ne mets quasiment pas d'accessoires, et je veux qu'il soit assez solide pour simplement être là et nous dire le texte."


           

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