Conférence à l'Académie du Royaume du Maroc sous le thème "Sijilmâsa, porte de l’Afrique, patrimoine en partage, site en péril"


Jeudi 6 Décembre 2018 - 11:50
MAP



L'Académie du Royaume du Maroc a organisé, mercredi soir à Rabat, une conférence sous le thème "Sijilmâsa, porte de l’Afrique, patrimoine en partage, site en péril", l'occasion de mettre en valeur les différents vestiges archéologiques de cette cité médiévale qui dispose d'un patrimoine important pour l’histoire du Maroc, du monde africain et musulman et des relations transsahariennes. 

Initiée dans le cadre des activités culturelles et scientifiques de l'Académie du Royaume du Maroc et en hommage à l’historien marocain Larbi Mezzine, cette conférence a été animée par François-Xavier Fauvelle, directeur de recherche au Centre national de la recherche scientifique à l’université de Toulouse (France) et co-directeur de la mission maroco-française à Sijilmâsa, qui a mis l’accent sur le rôle de cette cité, située au sud-est du Maroc, dans l’oasis du Tafilalelt, au cœur des steppes présahariennes, notant qu’elle est un carrefour majeur de l’histoire de l’Afrique-Monde et du monde méditerranéen au Moyen-Âge.

Dans son intervention, M. Fauvelle, également historien et archéologue français spécialiste de l'Afrique, récemment élu à la Chaire pérenne dédiée au continent africain et intitulée "Histoire et archéologie des mondes africains’’ et professeur au Collège de France à Paris, a fait savoir que cette cité médiévale fut une charnière connectée entre le Maroc, l’Afrique du Nord et plus largement le monde musulman, l’Afrique subsaharienne et le monde méditerranéen, sachant qu'elle fut un connecteur entre différentes communautés, berbère, arabe, juive et musulmane.

L'histoire de cette ville charnière se reflète dans le site archéologique et ses vestiges telles que la céramique, les murs et les murailles de différentes époques et les mausolées, a-t-il poursuivi, relevant que ce patrimoine connecté illustre à la fois l’histoire du Maroc et ses relations entre les différents monde du moyen âge.

Plusieurs campagnes de fouilles ont été menées pour essayer de mettre au jour les vestiges de ce passé prestigieux, a rappelé M.Fauvelle, citant à cet égard les fouilles archéologiques sur le site de Sijilmâsa qui commencèrent en 1971 et 1972 sous la direction de Boris de Rachewiltz, un égyptologue italien, alors qu’en 1974, l’inspecteur des monuments historiques à Meknès, Mohamed Ben Chemsi a effectué des fouilles extensives dans la même zone.

Depuis 2012, une équipe maroco-française dirigée par Elarbi Erbati de l'Institut national des sciences de l'archéologie et du patrimoine (INSAP) a repris des fouilles sur le site de Sijilmâsa, a-t-il encore rappelé, soulignant que les travaux de cette équipe ont permis de dégager un premier plan chronologique de répartition des vestiges archéologiques de Sijilmâsa montrant que le site présente plusieurs ensembles urbains distincts dans le temps et déconnectés dans l’espace.

Par ailleurs, il a souligné que le site archéologique de Sijilmâsa est en péril, pointant du doigt les extensions urbaines et la multiplication de certaines pratiques telles que le pillage de sable, les rejets des déchets urbains et gravats qui compromettent la conservation du site, alors même que des fouilles sont en cours, soulignant l’impératif de sauvegarder ce site, qui relève de la responsabilité collective de toutes les parties prenantes.

L’archéologue français a, dans ce sens, appelé à protéger le site par un enclos et des gardiens, et une législation et des mesures faisant appel à l’archéologie préventive, afin d’empêcher que des vestiges midrarides, fatimides, almoravides, almohades, mérinides, saadiens et alaouites continuent d’être détruits et de disparaître. 

Pour sa part, le secrétaire perpétuel de l'Académie du Royaume du Maroc, Abdeljalil Lahjomri, a indiqué que l’Académie du Royaume du Maroc attache une importance particulière au patrimoine national et contribue à une meilleure connaissance de ses principales composantes, à même qu’elle veille à leur valorisation et à leur préservation, notant que Sijilmâsa, cette belle oasis, reste un des mythes par excellence des cités disparues ayant un passé prestigieux.

M. Lahjomria, par ailleurs, indiqué que l’Académie du Royaume du Maroc lance l’alerte afin que les acteurs, à tous les échelons, soient davantage sensibilisés aux enjeux majeurs, en termes de protection de ce patrimoine de grande valeur, de développement local et d’aménagement du territoire, relevant l’impérieuse exploration rigoureuse et méthodique de ce site archéologique que le Maroc partage avec l’Afrique, le monde méditerranéen et d’autres pays.

Pour sa part, le ministre de la Culture et de la Communication, Mohamed Laaraj a indiqué que ces fouilles archéologiques au niveau du site ont permis de révéler les aspects inconnus de l’histoire de Sijilmâsa, soulignant que cette rencontre académique constitue une occasion idoine pour informer les chercheurs et les personnes intéressées du bilan de ces travaux archéologiques et mettre l’accent sur les problématiques rencontrées et les orientations de futur.

Cette rencontre constitue également une occasion pour examiner les moyens susceptibles de protéger et réhabiliter ce site archéologique, en collaboration avec les partenariats locaux et régionaux, a-t-il dit.

Dans ce cadre, il a fait savoir que la Direction du patrimoine culturel relevant du ministère veille à la préservation de ce site contre tous les périls, dans la mesure où elle a élaboré en 2016 un texte de loi, en vertu duquel Sijilmasa a été classée sur la liste du patrimoine national marocain, rappelant que le budget de 2017 a consacré une enveloppe budgétaire pour réhabiliter une bâtisse ancienne située dans le site, en tant que maison des archéologues.

Dans le cadre des projets futures, le ministère envisage en coopération avec le Conseil communal de Moulay Ali Cherif de créer un Centre qui permettra aux touristes de mieux connaitre l'histoire de ce site, soulignant la nécessité d’inscrire ce site sur la liste des parcours touristiques de la région.

Cette conférence a été marquée par la présence notamment du président du Conseil National des Droits de l'Homme, Driss El Yazami, de l’ancien secrétaire général du gouvernement, Driss Dahak, des membres de l'Académie du Royaume du Maroc, Mohammed Kettani et Driss Alaoui Abdellaoui, ainsi qu’une pléiade d’archéologues marocains et étrangers, historiens et professeurs universitaires. 


           

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