Dans la cité royale de Méroé au Soudan, plus de peur que de mal


Vendredi 11 Septembre 2020 - 12:08
AFP


Al-Bajrawiya (Soudan) - Inscrite au patrimoine mondial de l'humanité, la cité royale de Méroé a eu plus de peur que de mal après les inondations record au Soudan. Des digues ont été rapidement érigées par les Antiquités pour contrer l'eau du Nil mais la menace demeure.


"Si l'eau était entrée dans les bains royaux, dont les peintures et les statues ont été récemment restaurées par le German Archeological Institute, cela aurait été une catastrophe", explique à l'AFP Mahmoud Suleiman, en charge du site.

"Nous avons réussi à l'éviter grâce à l'intervention rapide de nos équipes."

Située à quelque 200 km au nord de Khartoum, la cité royale qui fait partie du site antique de Méroé, était menacée par les eaux du Nil en raison des inondations qui ont poussé les autorités à déclarer la semaine dernière l'état d'urgence sur l'ensemble du territoire.

Dans cette cité, les bains royaux à ciel ouvert sont composés de deux pavillons séparés: une salle d'eau et un lieu de détente, peintes et décorées de statues. Dans l'antiquité, l'eau fraîche y arrivait du Nil via à un système d'adduction.

En guise de protection, les bains sont entourés de murs en brique construits depuis des années. Le site et le fleuve du Nil, distant de quelque centaines de mètres, sont séparés par des terrains agricoles.

"Chaque saison des pluies, le Nil recouvre (ces terrains) mais cette année il a pénétré dans les limites du site archéologique. Il a atteint l'extérieur des bâtiments", montre mercredi à l'AFP M. Suleiman, également directeur régional du service d'archéologie pour l'Etat du Nil, où se trouve Méroé.

Le 5 septembre, le gardien du site a envoyé à M. Suleiman des photos de l'intrusion de l'eau dans le site.

Ce dernier a réagi immédiatement. Le lendemain, il s'est rendu sur place avec huit inspecteurs et trois volontaires qui ont commencé à ériger deux digues de sacs de sable puis à pomper. Mercredi, le Nil avait reculé et le danger immédiat était écarté.

"Il n'y a eu aucun dommage. Nous sommes arrivés au bon moment et nous sommes intervenus rapidement. Nous avons protégé les bains et aussi l'ancien mur d'enceinte construit en grès et donc susceptible d'être érodé si l'eau stagne trop longtemps", a dit M. Suleiman.

Mais pour Marc Maillot, directeur de la section française de la direction des Antiquités du Soudan (SFDAS), le danger n'est pas totalement écarté pour autant.

"Il y a une remontée potentielle de la nappe phréatique et le Nil peut progressivement créer un nouveau bras. Il faut construire une digue solide et pérenne en pierre et béton", a-t-il indiqué en lançant un appel à financer sa construction.

L'objectif actuel, selon les Antiquités soudanaises, est de remplacer les murs entourant les bains royaux par une structure plus légère afin de permettre au public de les visiter et surtout de construire un toit en fer et en brique pour les couvrir.

Inscrit en 2003 par l'organisation de l'ONU pour la culture et l'éducation (Unesco) au patrimoine mondial de l'humanité, le site archéologique est connu internationalement sous le nom de Méroé mais les Soudanais le désignent par Al-Bajrawiya.

Le site, capitale de l'ancien empire méroïtique, est constitué de la nécropole, avec les célèbres pyramides de Méroé, et de la cité royale composée de palais, de temples et de bâtiments administratifs.

L'empire (350 avant J.-C. à 350 après J.-C.) s'étendait sur 1.500 km dans la vallée du Nil, du sud de Khartoum à la frontière égyptienne.

Vu l'étendue du site, les fouilles n'en ont mis au jour qu'une infirme partie. De nombreux sanctuaires ont été dégagés à l'extérieur de la cité et environ deux cents pyramides sont recensées dans les trois nécropoles.

Les pluies abondantes de juillet à septembre au Soudan ont été cette année particulièrement destructrices: 103 morts, des dizaines de blessés, plus de 70.00 habitations détruites ou endommagées et de vastes terres agricoles touchées, selon les autorités. Et d'après l'ONU, 557.000 personnes sont affectées.

Le niveau du Nil a, lui, atteint 17,62 mètres, un record absolu depuis plus d'un siècle, date du début des relevés sur le fleuve.


           

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