Deux écrivains cubains à succès qui refusent l'exil...


Mercredi 13 Mai 2009 - 07:57
AFP/Sylvie BRIAND


L'écrivain cubain Wendy Guerra est à 38 ans et deux romans une étoile montante de la littérature, sauf dans son pays où ses livres ne sont pas publiés mais où ils circulent quand même sous le manteau.


Deux écrivains cubains à succès qui refusent l'exil...
Cette Havanaise qui ne se connaît pas d'autre origine que cubaine ne compte cependant pas pour autant prendre le chemin de l'exil comme l'ont fait nombre de ses compatriotes, écrivains ou non, ainsi que le rappelle son roman au titre évocateur: "Tout le monde s'en va".
"Je ne veux pas partir d'ici, j'aime mon pays... Mes romans seront sans doute publiés à Cuba quand ils ne seront plus d'actualité" comme cela a été le cas pour les œuvres de José Lezama Lima ou de Virgilio Piñera, deux éminents écrivains cubains, estime cette femme menue interrogée dans son appartement de la banlieue havanaise.
"Tout le monde s'en va", son premier roman paru en 2006, narre sous forme de journal intime le parcours parfois très dur de la petite Nieve (neige) dans une société en "hibernation" que tous finissent par quitter.
"Il paraît que "Tout le monde s'en va" est devenu une sorte de livre culte à Cuba" où il circule clandestinement, assure, non sans satisfaction cette ancienne comédienne dont les poèmes ont eux été publiés sur l'île communiste des frères Castro.
Son deuxième roman, "Nunca fui primera dama" (Je n'ai jamais été première dame), qui raconte l'histoire de trois générations de Cubaines, doit paraître le mois prochain en France.
Au contraire de Wendy Guerra, l'écrivain Leonardo Padura, 53 ans, peut se targuer d'être publié avec succès autant à l'étranger qu'à Cuba, où ses romans sont considérés comme des "best-sellers" avec des tirages atteignant 20.000 exemplaires.
"Je déteste la politique. Je ne veux pas que mes livres soient une tribune. Ce qui m'intéresse, c'est de décrire une réalité sociale, comme la corruption, l'exil ou la marginalité. Par exemple, dans "Passé parfait", le délinquant du roman est un vice-ministre", poursuit l'auteur de huit romans et d'essais.
Il met actuellement la dernière main à "L'Homme qui aimait les chiens", un récit attendu en septembre en Espagne et début 2010 en France "sur l'assassinat de Trotsky par Ramon Mercader qui a passé les quatre dernières années de sa vie à La Havane".
"Ce qui m'intéresse avec ce livre, c'est de voir comment la grande utopie du 20e siècle a disparu", dit cet homme, visage hâlé, barbe grisonnante, dont la "vision du monde a radicalement changé avec la chute l'URSS" en 1991, une disparition qui avait provoqué une catastrophe économique à Cuba.
Même si les espoirs de changements suscités par l'arrivée au pouvoir de Raul Castro en juillet 2006 sont, selon les mots de l'écrivain, "retombés" et qu'"est revenu le désenchantement", il ne voudrait pour rien au monde quitter son pays, matière première de ses romans.
Il assure écrire avec "toute la liberté voulue" en tant qu'écrivain, ce qui n'a pas toujours été le cas avec le journalisme. "Les médias n'existent pas pour décrire la réalité ou nourrir la réflexion sociale. Ce sont des outils de propagande", clame cet ancien journaliste culturel du quotidien Juventud Rebelde.
Wendy Guerra n'aime pas non plus la politique, mais difficile d'y échapper, surtout à Cuba. "Tout est politique. Et à Cuba, 'pour échapper à la politique, il faut s'échapper de Cuba' aimait dire ma mère", une journaliste "hippie" aujourd'hui décédée, raconte Wendy Guerra.
Accusée si souvent à l'étranger de bafouer les droits et libertés, l'île de Cuba est une "terre entourée d'eau et de beaucoup de silence", résume dans un sourire l'écrivain.


           

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