Discrimination raciale : Le Conseil d'État annule les résultats d'un concours de police


Jeudi 16 Avril 2009 - 13:51
lepoint.fr


Le Conseil d'État a annulé, vendredi 10 avril, les résultats du concours interne de la promotion 2007 des officiers de police après la plainte d'un policier des Yvelines, Abdeljalel El Haddioui, pour discrimination raciale.


"Il ressort des pièces du dossier que, lors de l'entretien d'évaluation qui était au nombre des épreuves d'admission, le jury lui a posé plusieurs questions portant sur son origine et sur ses pratiques confessionnelles ainsi que sur celles de son épouse", explique l'arrêt que s'est procuré lepoint.fr.
Pour justifier cette décision, la plus haute juridiction administrative en France souligne : "Ces questions, (...) qui sont étrangères aux critères permettant au jury d'apprécier l'aptitude d'un candidat, (...) révèlent une méconnaissance du principe d'égal accès aux emplois publics." Annulant la délibération du 5 octobre 2007 du jury du concours interne d'officier de la police nationale, le Conseil d'État précise que l'État versera à Abdeljalel El Haddioui une somme de 3.000 euros pour la prise en charge de ses frais de justice.
"Faites-vous le ramadan ?"
L'affaire ? Le 27 septembre 2007, Abdeljalel El Haddioui, 40 ans, passe devant le jury du concours interne pour un oral, dernière étape du processus d'admission. Seul candidat à porter un nom et un prénom maghrébins, il fait partie des 50 candidats admissibles et est donc encore en lice pour les 27 postes à pourvoir.
"Le jury s'est basé sur mes origines arabo-musulmanes et ma confession pour m'éliminer", estime ce gardien de la paix en place depuis 1997, devenu en 2005 brigadier chef. "Faites-vous le ramadan ?", "Votre femme porte-t-elle le voile ?", "Votre avis sur la corruption des fonctionnaires de police marocains ?", ou encore "Vous ne trouvez pas bizarre ce gouvernement de la France avec des ministres arabes et un président à moitié hongrois ?" sont les questions qui lui ont été posées, rapporte-t-il. Finalement, il obtient 4/20 et est recalé. Abdeljalel El Haddioui saisit alors la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité (Halde) et le Conseil d'État pour discrimination raciale à l'embauche.
Interrogée jeudi sur France Inter, la ministre de l'Intérieur Michèle Alliot-Marie a indiqué qu'elle allait "bien entendu tenir compte de la décision du Conseil d'État". Et d'insister : "Ce qui est important pour l'honneur, mais également pour la crédibilité du corps [de la police] et pour la confiance qu'on lui fait, c'est qu'il y ait des sanctions quand il y a des problèmes."
Dans ses conclusions, que s'est procurées lepoint.fr, le rapporteur public Jean-Philippe Thiellay souligne que le ministère de l'Intérieur s'est montré "assez discret" à propos des sujets abordés avec le policier lors de son oral, "par delà la contestation de la réalité des faits". La Place Beauvau a rappelé "que les membres du jury doivent adapter les questions posées au profil de chaque candidat", poursuit le rapporteur. Quant au président du jury du concours, le préfet Jean-Michel Fromion, il a reconnu dans son rapport "que certaines interrogations ont pu porter sur la problématique de la discrimination , mais qu'aucune question posée n'a eu de caractère raciste... tout en ajoutant même si le candidat a malheureusement pu le ressentir autrement ", poursuit le rapporteur Jean-Philippe Thiellay. Et ce dernier de conclure : "Nous sommes frappés par le fait que le choix de la note éliminatoire n'est justifiée par aucun élément objectif étranger à toute discrimination."


           

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