Elections: l'Europe sous le choc après le triomphe des europhobes


Lundi 26 Mai 2014 - 09:47
AFP


Bruxelles - L'Europe était lundi sous le choc après le séisme politique provoqué par le triomphe du Front national en France et des europhobes de l'Ukip en Grande-Bretagne qui témoignent du rejet de l'Europe de Bruxelles et des élites nationales au pouvoir.


La présidente du FN Marine Le Pen
La présidente du FN Marine Le Pen
En dépit de cette forte poussée de l'extrême droite et des eurosceptiques sur le vieux Continent, la droite conservatrice garde toutefois le plus grand nombre d'élus au Parlement des 28.

premier parti Tirant les premières leçons de ce vote historique, le Premier ministre français, Manuel Valls, a réclamé lundi matin une "réorientation" de l'Union européenne. "Je suis convaincu que l'Europe peut être réorientée pour soutenir davantage la croissance et l'emploi, ce qu'elle ne fait pas depuis des années", a-t-il dit.

Les europhobes de l'Ukip sont arrivés largement en tête au Royaume-Uni avec un score historique de 29% et ont obtenu 23 des 74 députés européens du pays. "Vous n'avez pas fini d'entendre parler de nous", a lancé, triomphant, son chef de file Nigel Farage, à un an des législatives.

En France, profitant de l'impopularité record des socialistes au pouvoir, le Front national de Marine Le Pen est devenu le premier parti avec un score historique de 24,96%. Il décrocherait 24 sièges sur les 74 accordés à la France, un des pays fondateurs de l'UE, selon un décompte de l'AFP.

Le FN devance largement l'opposition de droite UMP (20,8%) alors que le Parti socialiste subit une nouvelle déroute avec moins de 14% des suffrages. Mme Le Pen a immédiatement appelé le président François Hollande à "organiser des nouvelles élections".

"Séisme politique", titre lundi le Frankfurter Allgemeine Zeitung. Le quotidien allemand des affaires fait sa une, comme la quasi-totalité des médias germaniques et de la presse européenne, sur le triomphe du Front national.

Le ministre britannique des Affaires étrangères, William Hague, s'est dit "inquiet" de la victoire du FN. Interrogé pour savoir s'il s'agissait d'un "parti raciste", il a répondu: "Oui, et je pense que nous devrions être inquiets face à de tels développements dans le reste de l'Europe".

Selon des résultats communiqués par le Parlement européen, et qui restaient toujours provisoires lundi en début de matinée, les conservateurs du Parti populaire européen (PPE) sont en tête avec 212 sièges sur 751, contre 186 pour les socialistes. Les Libéraux obtiendraient 70 eurodéputés, suivis par les Verts (55). Les quatre partis pro-européens passent de 612 à 523 sièges.

Quant aux différents partis europhobes, qui ne constituent pas un bloc homogène, ils compteraient au total plus de 140 députés.

En Allemagne, qui envoie le plus fort contingent d'élus au Parlement européen (96), les conservateurs (CDU/CSU) de la chancelière Angela Merkel sont arrivés en tête, d'après des sondages sortie des urnes.

- Même des néonazis -

Mais, pour la première fois de son histoire, le parti néo-nazi allemand NPD va faire son entrée au Parlement européen. Crédité de quelque 300.000 voix et d'un score de 1%, le NPD obtient un élu.

Le nouveau parti anti-euro AFD, qui plaide pour une dissolution de la monnaie unique, fera lui aussi son entrée au Parlement avec un score d'environ 7%.

En Autriche, le parti d'extrême droite FPÖ, qui espère constituer un groupe avec le FN, progresserait nettement et arriverait en troisième position, avec près de 20% des suffrages, en hausse de plus de cinq points par rapport à 2009.

Au Danemark, c'est le Parti populaire, formation anti-immigration, qui est arrivé en tête avec près de 27% des voix et 4 des 13 sièges du pays.

Un petit parti europhobe polonais, le Congrès de la nouvelle droite (KNP), a obtenu 7,2% des voix et pourrait envoyer quatre députés au Parlement européen. En Hongrie, le scrutin a été largement dominé par le parti conservateur Fidesz du dirigeant Viktor Orban mais l'extrême droite ultra nationaliste du Jobbik arrivait en deuxième position avec près de 15% et trois sièges.

La forte poussée de l'extrême droite en Europe se traduit aussi par l'entrée du parti néonazi grec Aube dorée au Parlement. Crédité de 9 à 10% des voix, il pourrait envoyer trois élus à Strasbourg.

participation En Grèce, l'euroscepticisme se traduit en revanche par l'arrivée en tête du parti de la gauche Syriza d'Alexis Tsipras, qui obtiendrait six sièges, contre cinq à Nouvelle démocratie (droite), le parti au pouvoir.

En Espagne, les deux grands partis traditionnels, le Parti populaire de droite, et le Parti socialiste, ont connu une débâcle au profit de petites formations comme Podemos, né de la mouvance des indignés, qui obtient cinq sièges.

Mais en Italie, le populiste Beppe Grillo a été largement devancé par le parti démocrate, la formation de centre gauche du chef du gouvernement Matteo Renzi, qui a obtenu 41,5% des suffrages, selon les données des 3/4 des bureaux.

La gauche l'a aussi emporté en Roumanie et au Portugal.

- Appel au rassemblement -

La montée de l'extrême droite s'est faite sur fond de stabilisation de la participation à un faible niveau: 43,09% contre 43% en 2009, année où elle avait atteint son plus bas historique. Elle a même progressé dans plusieurs grands pays, notamment la France et l'Allemagne. Mais dans plusieurs pays d'Europe de l'Est en revanche, la participation, déjà très faible, a encore baissé.

Au total, la montée des forces anti-européennes "ne va pas changer la façon dont le Parlement travaille", avec un bloc pro-européen qui reste largement majoritaire. Mais il y aura des conséquences "sur les scènes politiques nationales et sur la façon dont les dirigeants nationaux agiront au sein de l'UE", estime Jan Techau, directeur du groupe de réflexion Carnegie Europe.

La bataille se profile déjà pour la présidence de la Commission européenne.

Le candidat du PPE, Jean-Claude Juncker a "revendiqué" la présidence de l'exécutif européen mais le candidat socialiste, Martin Schulz, a remis en question les projections du Parlement européen, qu'il préside, jugeant qu'elles n'étaient "pas vraies".

Aucun parti ne disposant de la majorité, cette situation pourrait inciter les dirigeants européens à chercher une autre personnalité acceptable par les députés. Ils se réuniront dès mardi soir à Bruxelles pour en discuter.


           

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