En Inde, une mutation génétique entraîne des maladies cardiaques


Mercredi 21 Janvier 2009 - 07:05
Le Monde.fr/Catherine Vincent


En Inde, pays qui héberge près de 20 % de la population mondiale, surviennent 60 % des maladies cardiaques. Les causes de cette fréquence élevée restent mal comprises, mais une piste prometteuse vient de s'ouvrir : il existe dans la population indienne une mutation génétique fort répandue, qui aggrave considérablement les risques de cardiomyopathies.


En Inde, une mutation génétique entraîne des maladies cardiaques
Etudiées de longue date, ces affections diverses du myocarde peuvent être favorisées par d'autres mutations, peu répandues mais très nombreuses : plus de 200 ont été recensées, sur 20 gènes différents.

Celle qui vient d'être étudiée sous la direction de Kumarasamy Thangaraj, du Centre de Biologie cellulaire et moléculaire d'Hyderabad (capitale de l'Inde du Sud) est, au contraire, extraordinairement fréquente. Elle serait portée par 4 % de la population du sous-continent (Inde, Pakistan, Bangladesh, Sri Lanka). Soit quelque 60 millions de personnes.

Selon les travaux mis en ligne dimanche 18 janvier par la revue Nature Genetics, cette mutation touche le gène de la protéine MYBPC3, impliquée dans le fonctionnement du myocarde. Elle avait été identifiée pour la première fois en 2003, sur deux familles indiennes présentant des cardiomyopathies. Soupçonné depuis lors, son impact sur le coeur est désormais incontestable. Les chercheurs ont suivi les conséquences de la mutation dans 28 familles indiennes : certains des porteurs de la délétion, ont-ils découvert, manifestent la maladie dès la trentaine, et plus de 90 % des porteurs les plus âgés en sont affectés.

"Cette mutation conduit à la formation d'une protéine anormale", précise Kumarasamy Thangaraj. "Lorsqu'ils sont jeunes, ceux qui en sont porteurs peuvent la dégrader et rester en bonne santé. Mais son taux augmente à mesure qu'ils vieillissent". Au total, sa présence multiplierait par sept le risque de maladie cardiaque. Plus fréquente dans le sud de l'Inde, elle pourrait à l'avenir être systématiquement recherchée dans la population afin de réduire les autres facteurs de risque chez ceux qui en sont porteurs.

Apparue il y a 33 000 ans

Pourquoi seulement en Asie du Sud ? Les chercheurs, qui ont cherché la mutation sur plus de 2 000 personnes issues de 26 autres pays, ne l'ont en effet retrouvée qu'en Malaisie (qui compte une minorité indienne) et en Indonésie. Ailleurs, rien.

"La mutation est sans doute apparue en Inde il y a environ 33 000 ans", répond Chris Tyler-Smith, du Wellcome Trust Sanger Institute (Hinxton, Grande-Bretagne), l'un des 25 signataires de l'étude. Elle se serait ensuite répandue parmi la population. Sans être éliminée par la sélection naturelle, puisque la maladie se manifeste le plus souvent alors que les personnes concernées ont déjà eu des enfants.


           

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