Fabrice Luchini, en magistrat aigri et amoureux dans "L'Hermine"


Mardi 17 Novembre 2015 - 10:32
AFP


Dans "L'Hermine" de Christian Vincent, en salles mercredi, Fabrice Luchini campe un magistrat bourru et aigri qui va se révéler plus humain qu'il n'y paraît au contact d'une femme aimée autrefois.


Fabrice Luchini
Fabrice Luchini
Le film a été doublement récompensé à la dernière Mostra de Venise, par le prix du scénario et celui du meilleur interprète pour Fabrice Luchini.

Nouvelle session d'assises à Saint-Omer (Pas-de-Calais) pour Xavier Racine: ce magistrat "aigri, réac, misanthrope", comme le qualifie l'acteur français de 64 ans, y va en traînant la patte car il a la grippe.

"Il est en fin de carrière, il a raté sa vie personnelle en épousant une femme plus riche que lui qui vient de le quitter, il est amer, il vit provisoirement à l'hôtel et plus personne ne le regarde. C'est effrayant de ne plus être regardé", a expliqué à l'AFP le réalisateur, Christian Vincent.

Alors que sortent un à un les noms des jurés du procès pour infanticide que Xavier Racine va présider, l'un va retenir son attention: celui d'une femme, anesthésiste à l'hôpital de Lille, qu'il a aimée autrefois et n'a jamais oubliée.

A ses côtés pendant toute la durée du procès, cette femme, incarnée par l'actrice danoise Sidse Babett Knudsen (interprète de la Première ministre Birgitte Nyborg dans la série "Borgen"), va le ramener à la vie et lui apprendre la compassion, cette "vertu la plus merveilleuse de toutes", selon Christian Vincent.

Et si l'on croit à cette histoire d'amour qui se noue en quelques jours, tout vient de l'écriture, assure Fabrice Luchini, car "l'acteur ne fait qu'interpréter une partition". "Mon personnage est un coincé qui se décoince grâce à la puissance amoureuse", résume-t-il.

Le film mêle l'histoire de cet amour (re)naissant à celle du procès, dont tous les rouages sont minutieusement reconstitués.

- Mélange des classes -

"A l'idée qu'on va voir un film sur un procès, on se dit +on va se faire chier terriblement+ mais un miracle s'opère, ça devient passionnant, il y a un moment de grâce, on est invité à entrer dans un procès, où des gens modestes, accablés par la vie, vont être mis en scène", souligne Fabrice Luchini.

"Mon choix d'inscrire une histoire dans une cour d'assises vient de la volonté avant tout de parler de mon pays, et des gens qui la composent", précise le réalisateur.

"On y pratique l'exercice de la démocratie et c'est un lieu extraordinaire, l'un des rares où toutes les classes sociales se mélangent. Avec l'hôpital et, de moins en moins, l'école", ajoute-t-il.

Personnage à part entière du film, le jury est composé d'habitants du nord de la France, "où Marine Le Pen fait 30%, un pays abandonné par la France, un îlot de désespérance", selon Fabrice Luchini.

Le long-métrage accorde beaucoup d'importance à l'envers du décor, aux coulisses, explique le metteur en scène, passionné de Georges Simenon.

L'idée de l'affaire examinée lors du procès lui est venue en parlant avec deux pénalistes: un homme vivant dans une cité s'accuse du meurtre de sa fillette de sept mois, mais des éléments manquent ou sont imprécis: la police a-t-elle voulu aller trop vite en besogne en l'inculpant ?

C'est ce que le président de la cour doit déterminer: "C'est quelqu'un qui met en scène les éléments d'un dossier et qui donne la parole, explique Fabrice Luchini, j'ai adoré ça, être à l'écoute, pratiquer la maïeutique comme le faisait Socrate".

Avant le tournage, Olivier Leurent, président de cour d'assises, lui a donné ce conseil: "Simplement parler aux gens avec énormément de gentillesse et d'empathie". Une compétence que Luchini assure avoir eu en lui mais avoir jusqu'à présent "rarement montrée".


           

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