G20 : l'avènement d'un nouvel ordre mondial


Mardi 7 Avril 2009 - 08:55
RIA Novosti/Oleg Mitiaïev


Dans le document final du sommet du G20 publié le 2 avril, les dirigeants des grands pays ont tenté d'aplanir toutes les contradictions entre eux concernant les mécanismes permettant de sortir de la crise globale.


G20 : l'avènement d'un nouvel ordre mondial
Ce texte contient des dispositions préconisant aussi bien le renforcement de la régulation financière au niveau global que l'injection de plus de mille milliards de dollars dans l'économie mondiale, tout en rehaussant le rôle du Fonds monétaire international (FMI). La promesse est faite, une nouvelle fois, de lutter contre le protectionnisme et de contribuer au libre échange dans le monde entier.
Qu'a-t-il été décidé?
Les chefs d'Etat et de gouvernement se sont efforcés de manifester leur unité dans la lutte contre la crise globale, notamment en ce qui concerne la création d'un nouveau mécanisme de régulation financière mondiale. Le premier ministre britannique, Gordon Brown, dont le pays a accueilli le sommet, a déclaré sans ambages que cette rencontre marquait le début d'un "nouvel ordre mondial".
Selon le président américain Barack Obama, ce sommet a apporté la réponse internationale la plus hardie et la plus rapide de toute l'histoire à une crise financière, et marquera un tournant vers l'assainissement de l'économie.
Pour ce qui est des chiffres concrets, les grands pays ont décidé d'affecter 1.100 milliards de dollars à la lutte contre la crise mondiale. Cette somme inclut une augmentation des ressources du FMI, qui passeront de 250 à 750 milliards de dollars, ainsi que l'aide aux pays pauvres et les sommes destinées à réactiver le commerce mondial.
Grâce à l'accroissement de ses fonds, le FMI émettra des DST (SDR), ou droits de tirage spéciaux - sa propre monnaie combinée, que les grands pays pourront utiliser pour leurs réserves internationales et les paiements entre eux. Cette mesure rejoint les propositions de la Russie et de la Chine de créer une monnaie de réserve supranationale.
Une analyse attentive révèle, il est vrai, qu'il avait déjà été prévu d'octroyer une partie de cette somme de 1.100 milliards de dollars. Néanmoins, ces déclarations grandiloquentes des leaders mondiaux ont été accompagnées d'une progression des indices boursiers dans le monde entier.
En outre, les grands pays ont promis de créer, d'ici la fin de 2010, grâce à des dépenses budgétaires totales d'un montant de 5.000 milliards de dollars, des millions de nouveaux emplois en vue d'assurer le retour à la croissance.
Les États-Unis et les dirigeants européens se sont efforcés de prouver qu'il n'y avait pas de divergences entre eux sur l'importance des moyens à consacrer à la stimulation financière des économies et sur l'envergure de la régulation des marchés financiers mondiaux. Rappelons qu'avant le sommet, les grands États de l'Union européenne avaient émis des doutes quant à la nécessité, pour les pays industrialisés, d'allouer ensemble des sommes importantes en vue de sortir toute l'économie mondiale de la crise.
Le président français, Nicolas Sarkozy, a souligné que l'accord intervenu sur le régime de régulation des marchés financiers prévoyant, entre autres, d'agir contre les paradis fiscaux (ou offshore), de contrôler rigoureusement les fonds spéculatifs, les agences de notation et le versement des bonus aux top managers, témoignait qu'une page était tournée dans l'histoire, une page symbolisant, selon son expression, l'ère du capitalisme "anglo-saxon" de l'après-guerre. Cette ère étant synonyme de cette idéologie de grande dérégulation des marchés, particulièrement marquée dans les années 1990-2000, idéologie qui a été, en fait, officiellement qualifiée d'erronée au sommet du G20 du 2 avril 2009.
Ce faisant, la France a admis in extremis que le G20 ne publierait pas sa "liste noire" des paradis fiscaux, et reprendrait celle dressée par l'Organisation pour la coopération et le développement économiques (OCDE).
Quel sera le "nouvel ordre"?
Si l'on se fonde sur les décisions prises par le G20 de Londres, on peut imaginer que la domination des Etats-Unis diminuera dans le "nouvel ordre mondial", alors que le rôle d'économies émergentes comme celles de la Chine, de l'Inde, du Brésil et de la Russie sera, au contraire, plus important.
Les précédentes tentatives globales de faire face aux crises mondiales s'étaient soldées, c'est à noter, par un échec. Ainsi, le président américain Franklin Roosevelt avait fait capoter, en 1933, une conférence de Londres analogue pendant la Grande Dépression.
Il est difficile de dire ce qu'aurait fait l'ancien président américain George W. Bush, qui préférait, comme style politique, le "je fais ce qu'il me plaît". Le nouveau président américain Barack Obama a adopté, pour sa part, une position plus constructive à l'égard des autres pays, étant bien conscient que, dans les conditions de la crise, il vaut mieux entretenir avec eux des rapports de partenariat que tenter de leur dicter sa volonté.
D'autre part, il est évident que le rôle de régulateur financier mondial du FMI s'accroîtra, car ses ressources vont tripler. Il disposera désormais de moyens suffisants pour aider les pays qui ont besoin de crédits, par exemple ceux d'Europe de l'Est.
Dans le même temps, le nombre de voix du Japon, de l'UE et de la Chine augmentera au FMI. Ce sont ces pays qui seront les premiers à verser 250 milliards de dollars supplémentaires dans ses statuts. Mais on ignore pour l'instant qui apportera les 250 autres milliards.
Le plus difficile, dans les conditions de la crise, sera de ramener le commerce mondial à son niveau précédent. D'après les données de l'OCDE, son chiffre d'affaires baissera cette année de 13%, car bien des banques, au bord de la faillite, réduisent leurs crédits aux opérations d'import-export.
C'est pourquoi les pays du G20 vont affecter, au cours des deux prochaines années, par l'intermédiaire de la Banque mondiale, 250 milliards de dollars pour financer le commerce international. Le G20 a également promis, en paroles, de combattre le protectionnisme sous tous ses aspects, car c'est lui qui avait aggravé la récession économique des années 1930.
La principale question qui se pose, désormais, est de savoir si les gouvernements des grands pays ont l'intention d'appliquer avec conséquence le premier programme commun de l'histoire de lutte contre une crise mondiale. S'ils tiennent leurs promesses, le sommet du 2 avril de Londres pourrait marquer un jalon dans la sortie de l'économie mondiale de la récession.


           

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