Hollande annonce quatre "Panthéonisés", incarnations de "l'esprit de résistance"


Vendredi 21 Février 2014 - 16:27
AFP


Mont-Valerien (France) - François Hollande a annoncé officiellement vendredi au Mont-Valérien (Hauts-de-Seine) le transfert au Panthéon en mai 2015 des cendres de quatre figures illustres de la Seconde Guerre mondiale, deux femmes et deux hommes, incarnations de "l'esprit de résistance".


Soixante-dix ans jour pour jour après l'exécution de 22 membres du groupe Manouchian en ce lieu où furent fusillés un millier de résistants par l'occupant nazi, le chef de l'Etat a annoncé que son choix s'était porté sur deux femmes, Germaine Tillion, ethnologue et résistante, et Geneviève de Gaulle-Anthonioz, ancienne présidente de ATD Quart Monde et nièce du général de Gaulle, qui toutes deux furent déportées à Ravensbruck, ainsi que deux hommes, Pierre Brossolette, journaliste et résistant, et Jean Zay, ministre de l'Education du Front populaire assassiné en juin 1944 par des miliciens.

"Deux femmes et de deux hommes qui ont incarné les valeurs de la France quand elle était à terre" et "autant d'exemples pour la Nation", a lancé le chef de l'Etat, annonçant que le transfert de leurs cendres interviendrait le 27 mai 2015 "lors de la journée nationale de la Résistance".

Ces quatre figures "ont permis par leur courage ou leur génie, à la France d'être la France", et même "au-delà de la France", a insisté le président, s'adressant "à tous les peuples qui se battent encore aujourd'hui pour leur liberté", claire allusion à l'insurrection en Ukraine.

En marge de la cérémonie, François Hollande a évoqué devant la presse la nécessité pour la France d'"être du côté de celles et ceux qui demandent la liberté et le vote", à propos de la situation à Kiev.

Pour le chef de l'Etat, Germaine Tilllon, "c'est l'égalité". Elle "sera l'une des premières à lutter pour l'émancipation du peuple algérien" et "fut aussi une grande scientifique", a-t-il rappelé. Quant à Geneviève Anthonioz-de Gaulle, "c'est la fraternité dans la déportation, la fraternité de la condition humaine".

- Un 'combat pour l'émancipation humaine' -

L'une et l'autre auront été "inséparables dans la déportation" et "leur combat pour l’émancipation humaine", a souligné le chef de l'Etat.

Pierre Brossolette, a-t-il poursuivi, "c’est la liberté, liberté d’expression comme journaliste, liberté de la pensée, comme intellectuel, liberté de l’action comme résistant" et Jean Zay, auquel il avait déjà rendu hommage en mai 2012, le jour de son investiture à l'Elysée, "c'est la République, l'école de la République".

Temple républicain sur le fronton duquel figure la devise: "Aux grands Hommes la patrie reconnaissante", le Panthéon n'accueillait jusqu'ici que deux femmes sur 71 personnalités, la physicienne Marie Curie, Prix Nobel de physique puis de chimie, et Sophie Berthelot. Cette dernière n'y figure toutefois qu'en qualité d'épouse du chimiste Marcellin Berthelot.

Décédée en 2008 à 100 ans, Germaine Tillion fut une résistante de la première heure. Elle participe en juin 1940 à la création du réseau du Musée de l'Homme. Dénoncée, elle est arrêtée en 1942 puis déportée à Ravensbrück. Rescapée, elle sera parmi les premiers à témoigner de l'enfer du système concentrationnaire.

Fille du frère aîné du général, Geneviève de Gaulle-Anthonioz, décédée en 2002, est étudiante lorsqu'elle rejoint la Résistance. Elle est également une rescapée de Ravensbrück. Elle prendra la tête du mouvement ATD Quart Monde en 1964.

Le radical de gauche Jean Zay a laissé une profonde empreinte sur le système éducatif et culturel français. On lui doit la scolarité obligatoire jusqu'à 14 ans ou encore l'interdiction du port d'insignes politiques et religieux à l'école.

Arrêté en mars 1944 avant de se donner la mort pour ne pas livrer de secrets à la Gestapo sous la torture, Pierre Brossolette fut l'un des principaux acteurs de la Résistance intérieure, sous les ordres du colonel Passy, chef des services de renseignement de la France Libre.

Compagnon de la Libération, il rejoindra au Panthéon quatre autres Compagnons de la Libération: Jean Moulin, René Cassin, Félix Eboué et André Malraux.

Durant l'été et l'automne 1943, le Groupe Manouchian réalisa près d'une centaine d'opérations armées et de sabotages en région parisienne dont, le 28 septembre 1943, l'exécution à Paris du général SS Julius Ritter, responsable du Service du travail obligatoire (STO).

Le 21 février 1944, 22 membres de ce réseau constitué de résistants communistes, juifs, arméniens, espagnols et polonais étaient fusillés au Mont-Valérien. Soixante-dix ans plus tard, la fameuse "Affiche rouge" de la propagande nazie, avec ses dix visages en noir et blanc, en est encore le symbole.

Comme dans la chanson de Léo Ferré sur le poème d'Aragon, "un grand soleil d'hiver éclaire la colline" plongée dans le silence quand le chef de l'Etat s'est recueilli dans la clairière où tous ces résistants ont vécu leurs derniers instants.


           

Nouveau commentaire :

Actus | Economie | Cultures | Médias | Magazine | Divertissement