Jeux vidéos : Guerre des images


Lundi 16 Février 2009 - 10:17
La Gazette du Maroc


La guerre des images qui est en train de se dérouler sous nos yeux depuis la guerre israélienne contre Gaza, avait été modélisée depuis septembre dernier via Internet et les jeux vidéos. Petit florilège instructif. Seule consolation : la bêtise - pour ne pas dire plus - est bien partagée !


Jeux vidéos : Guerre des images
Terrorist Takedown 2 : Brigade Spéciale
Proposé une nouvelle fois à un prix défiant toute concurrence, ce nouvel opus renoue vaillamment avec les joyeux travers de ses glorieux ancêtres et nous livre une aventure inédite, pleine de terroristes en mousse, de turbans, de clichés, mais également de dialogues acides, dignes d’un Pulp Fiction.
Se coltiner un épisode de Terrorist Takedown, c’est comme les nanars dont Chuck Norris et Steven Seagal ont le secret: c’est rigolo quelques minutes, si on ne l’a pas payé. Il y est donc question de soldats, balancés dans un pays moyen-oriental fictif pour y délivrer des otages et massacrer tout ce qui porte un turban, une ceinture d’explosifs, ou simplement une barbe. Voilà pour le pitch. Saluons l’effort de localisation franchouillarde de City Interactive : les US Navy Seals de la version d’origine ont fait place à des troufions français, membres de la «Brigade Spéciale». Brigade de quoi, on ne saura jamais, mais toujours est-il que de jolis écussons tricolores ornent les belles épaules de trois combattants que l’on suivra tout au long du jeu. Amis tueurs, veuillez donc accueillir le fougueux Pierre Bernelle (vous), le félin Jean et le grassouillet Philippe. Trois bonshommes qui, au cours de leurs pérégrinations, s’adresseront aux autochtones dans le magnifique anglais sarkosien, suintant le sauciflard. Rien que pour ses dialogues, Terrorist Takedown 2 vaut franchement le détour. Ce bon vieux Pierre nous gratifiera ainsi de superbes et fréquents «bullshit !» ou de répliques d’anthologie, type «it iz opeune sizonne one youre ass». Succulent ! Le jeu réserve donc quelques généreuses surprises, involontaires certes, mais tellement plus efficaces que les pitoyables tentatives de rebondissements des scénaristes. Car très vite - attention au spoiler - on observera nos alliés initiaux nous cracher au visage par derrière et nos anciens ennemis nous tapoter dans le dos par devant. Dans le même registre, les fameux otages, pour lesquels on est quand même censés se faire trouer la peau rappelons-le, disparaîtront de votre vue, sans raison particulière, pour ne plus jamais revenir… Du coup, les deux trois civils effarouchés que l’on croisera sur notre route pourront être joyeusement descendus, sans qu’on soit pénalisé pour autant. Ne restera donc plus qu’à se débrancher le cerveau et à partir dégommer tout ce qui bouge. Les fans de la série (si, si, il y en a) peuvent donc être rassurés, Terrorist Takedown 2 conserve tout le charme des opus précédents. On profite une fois encore d’une plongée bon marché vers le néant insondable de la médiocrité vidéoludique.
Les jeux vidéo, outils de propagande terroriste
Les jeux vidéo qui, selon des experts de la Défense de la Maison Blanche du temps pas si lointain de Georges W Bush, serviraient pour inciter la jeunesse musulmane à prendre les armes contre l’ennemi américain. «Tout jeu vidéo au contenu guerrier qui est lancé sur le marché voit son contenu modifier par les groupes terroristes, qui les manient afin de servir leurs propres besoins», a expliqué un spécialiste en diplomatie, Dan Devlin, devant le Congrès américain, en septembre dernier.
Selon Devlin, les groupes terroristes de la trempe d’Al Qaida modifient le contenu de populaires jeux vidéo en inversant les rôles : dans ces nouvelles versions, ce sont les troupes de soldats américains qui héritent du rôle des méchants.
Ces nouvelles versions de jeux se retrouvent sur des sites Web sur lesquels les enfants peuvent s’inscrire dès l’âge de sept ans. Ils peuvent ainsi prétendre faire partie de guérillas devant éliminer les occupants occidentaux.
L’un de ces jeux qui s’est vu modifier par les groupes terroristes est le populaire Battlefield 2, de l’éditeur Electronic Arts. Comme un porte-parole de la compagnie l’explique, «nous n’avons aucun contrôle sur ce type de modifications. C’est comme dessiner une moustache sur une photo.» Un peu plus quand même.
On y voit entre autres gracieusetés, les insultes au Coran, les pillages et massacres menés par les Américains et aussi de jeunes enfants violés par les marines… C’est Nabil Al Awadi chef religieux koweitien qui est le fer de lance de cette nouvelle sorte de détournement. Il le justifie par deux arguments imparables. Le fait que tous les jeux vidéos présentent constamment le Musulman comme le méchant. Ce qui est vrai. Il cite aussi toutes ces images de populaires télévangélistes américains y allant de remarques dénigrantes à l’endroit de l’Islam. C’est vrai également.
Aujourd’hui le jeune public moyen-oriental a le plus grand choix. Du film-jeu pseudo-historique qui raconte l’Islam victorieux des «croisés» au dernier-né, un jeu de poursuite qui se passe à Hevron en 1994. Le méchant juif, Goldstein s’apprête à trucider les Croyants qui prient dans le caveau des Patriarches. Le jeu consiste à délivrer les pèlerins et à tuer Goldstein et le maximum de juifs…
Obsession, le DVD anti-musulmans qui inonde l’Amérique
Depuis quelques jours aux Etats-Unis, le DVD d’un documentaire intitulé «Obsession», véritable provocation à l’égard des musulmans, est distribué gratuitement et massivement. Qui se cache derrière une opération d’une telle envergure ? En effet, à quelques semaines de l’élection présidentielle américaine, un bien étrange DVD était massivement distribué aux Etats-Unis. Intitulé «Obsession, Radical Islam’s war against the West» («Obsession, la guerre de l’Islam radical contre l’Occident»), il se présente comme un «documentaire» et établit un parallèle entre l’Islam radical et le nazisme, juxtaposant par exemple des images d’enfants musulmans embrigadés et des documents d’archives sur les jeunesses hitlériennes.
La thèse du film est claire, comme on peut le lire sur son site (voir les bannières) : «Il y a 70 ans, l’Europe était en guerre contre l’une des pires figures de l’histoire moderne : Adolf Hitler. (… ) Aujourd’hui, nous sommes confrontés à un nouvel ennemi, lui aussi engagé dans une violente bataille pour transformer notre monde. Alors que nous dormons bien à l’abri dans nos maisons, un nouveau mal nous menace (… ) avec à sa disposition tous les moyens nécessaires pour placer la civilisation occidentale sous le joug de ses valeurs. Cet ennemi, c’est l’Islam radical». On ne peut pas être plus clair.
Réalisé à partir d’«images des télévisions arabes rarement vues en Occident», Obsession a reçu le concours de divers «experts» comme «un ancien terroriste de l’OLP», «un journaliste pakistanais indépendant» ou encore «la fille d’un martyr de la guérilla». Une obscure fonctionnaire du Pentagone explique doctement entre des images d’apocalypse (attentats de New-York, Madrid, Paris, etc) la réalité du danger islamiste.
Le «documentaire» est une coproduction de Honest reporting - une organisation de veille médiatique destinée à lutter contre «les articles tendancieux sur Israël» dirigée par un rabbin orthodoxe israélo-canadien, Ephraim Shore – et de The Clarion Fund, créée en 2006 par Raphael Shore, le frère d’Ephraim… Elle a quant à elle pour vocation d’«éduquer les Américains sur les questions de sécurité nationale» !
«Obsession» n’est cependant pas une nouveauté. Déjà diffusé sur la chaîne conservatrice Fox News en 2006, il est également régulièrement projeté sur les campus universitaires - du moins quand les étudiants ne s’y opposent pas - par les membres de Clarion Fund. Mais cette fois-ci, ses producteurs ont mis le paquet sur la diffusion : 28 millions de DVD ont été distribués sur tout le territoire, déposés dans les boîtes aux lettres ou encartés dans les plus grands quotidiens américains. Ainsi, le très sérieux New York Times en a distribué 145 000 exemplaires.
Où Clarion Fund a-t-il trouvé les fonds nécessaires à une telle opération ? On l’ignore encore. En revanche, en pleine campagne présidentielle, il n’y a aucun doute sur l’identité de celui à qui elle devait – théoriquement - profiter : Clarion Fund comme Honest Reporting étaient pro-McCain. ■


           

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