Jihadistes de l'EI détenus dans le nord-est syrien: ce que l'on sait


Mercredi 30 Octobre 2019 - 11:31
AFP


Beyrouth - Les milliers de jihadistes du groupe Etat islamique (EI) détenus par les forces kurdes en Syrie restent un casse-tête pour la communauté internationale, après l'annonce dimanche par Washington de la mort du chef de l'organisation Abou Bakr al-Baghdadi.


L'offensive turque, lancée début octobre contre les forces kurdes dans le nord-est de la Syrie, a suscité des craintes de voir l'EI ressurgir à la faveur d'éventuelles évasions massives des prisons gardées par les Kurdes, obligés de se mobiliser sur le front. Malgré un accord russo-turc conclu le 22 octobre qui a mis fin à cette opération, les inquiétudes persistent sur l'avenir des jihadistes dans cette région.

Voilà ce que l'on sait sur ces détenus de l'EI.

Selon l'administration kurde, 12.000 jihadistes présumés de l'EI sont détenus par leurs forces de sécurité dans le nord-est syrien.

Outre quelque 4.000 Syriens et environ autant d'Irakiens, au moins 2.500 d'entre eux sont issus d'une cinquantaine de pays étrangers, dont une majorité de Tunisiens.

Des responsables français ont fait état de 60 à 70 de leurs ressortissants parmi ces détenus, tandis que Bruxelles n'a confirmé la présence que de 13 Belges. Les Kurdes ne divulguent pas de statistiques par nationalité.

Arrêtés essentiellement lors de combats menés par les forces kurdes avec le soutien de la coalition antijihadiste dirigée par les Etats-Unis, les détenus sont disséminés dans au moins sept structures.

Les Forces démocratiques syriennes (FDS), dominées par les Kurdes, ne révèlent pas le lieu exact de ces centres de détention, mais certains sont connus comme Roj, Dachicha, Jerkin, Navkur et Derik, dans le nord et l'est de la Syrie.

Le niveau de sécurité dans ces structures est jugé faible: Ce sont des "bâtiments" insuffisamment fortifiés, selon un haut responsable kurde.

Après l'annonce de la mort de Baghdadi dimanche, le commandant en chef des FDS, Mazloum Abdi, a averti que les combattants de l'EI en cavale chercheraient à se venger.

"On s'attend à tout, y compris des attaques contre les prisons", a-t-il déclaré.

Cette mise en garde intervient alors que des dizaines de prisonniers de l'EI se sont déjà échappés après l'offensive turque.

La semaine dernière, James Jeffrey, émissaire américain pour la Syrie, a déclaré au Congrès que "plus de 100" prisonniers de l'EI s'étaient évadés et que leur sort était inconnu.

Vendredi, le ministre américain de la Défense Mark Esper a déclaré que les forces kurdes avaient réussi à "récupérer" des dizaines de prisonniers de l'EI échappés lors de l'offensive turque.

Les FDS ont longtemps prévenu que la surveillance des prisonniers étrangers de l'EI serait "secondaire" en cas d'opération militaire turque.

L'offensive turque a souligné l'urgence de trouver une solution au sort des prisonniers jihadistes, que les Kurdes disent ne pas pouvoir retenir longtemps, et encore moins juger.

Les Européens craignent pour leur sécurité si les Kurdes ne peuvent plus garder ces prisonniers.

Mais ils hésitent toujours, comme la France, à rapatrier leurs ressortissants figurant parmi les détenus. Ils cherchent à transférer certains d'entre eux en Irak.

Les Etats-Unis ont saisi au début de l'offensive turque deux membres hauts placés de l'EI. Selon la presse américaine, ils seraient détenus en Irak.

Outre les combattants de l'EI, les forces kurdes détiennent des milliers de leurs proches, femmes, enfants et parents, dans des camps aménagés à cette fin.

Celui d'Al-Hol, surpeuplé, accueille plus de 70.000 personnes --des Syriens et des Irakiens, mais aussi des Françaises, des Belges ou des Allemandes-- dont la colère et les tentatives récurrentes d'évasion sont contenues à grande peine.

Une autre structure abritant des "familles de l'EI" se trouve à Aïn Issa, d'où 800 personnes se sont évadées dans le sillage de l'offensive turque.

Certaines auraient réintégré le camp depuis, d'autres seraient passées du côté turc de la ligne de front ou auraient rejoint des cellules de l'EI opérant dans la région.

Le redéploiement des FDS pour faire face aux Turcs a créé un vide sécuritaire dans la région susceptible de profiter à l'EI.

Le risque d'une résurgence est d'autant plus réel que les cellules clandestines de l'EI n'ont jamais cessé leurs activités, selon les experts, depuis la chute en mars du "califat" qui avait un temps étendu son pouvoir sur un immense territoire à cheval entre l'Irak et la Syrie.


           

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