Patron de l’Onu de 1997 à 2006, le Ghanéen avait été pendant dix ans le visage reconnu de la diplomatie internationale, mais son nom reste aussi attaché aux échecs de la communauté internationale au Rwanda pendant le génocide de 1994, en Bosnie, au Darfour, en Somalie ou bien encore en Irak, où il n’avait su empêcher l’intervention militaire des Etats-Unis en 2003.
En 2001, Kofi Annan s’était vu décerner le prix Nobel de la paix, conjointement avec l’Organisation des Nations unies, pour leur travail “pour un monde mieux organisé et plus pacifique”.
Le comité Nobel avait salué le travail effectué par Annan pour redynamiser la machine onusienne et faire des droits de l’homme une priorité. Il avait également reconnu son engagement dans la lutte contre le sida en Afrique.
Kofi Annan est mort tôt samedi matin dans un hôpital de Berne, en Suisse, ont précisé deux de ses proches à Accra, la capitale ghanéenne.
Dans un communiqué, sa Fondation a fait part de son “immense tristesse”. Elle ajoute qu’il a succombé à une brève maladie, entouré de sa seconde épouse, Nane, et de ses enfants.
“De bien des manières, Kofi Annan était les Nations unies. Il en a gravi les échelons jusqu’à diriger l’organisation et la faire entrer dans le nouveau millénaire avec une dignité et une détermination sans égales”, a réagi l’actuel secrétaire général de l’Onu, Antonio Guterres, dans un communiqué.
Pour Zeïd Ra’ad al Hussein, dont le mandat de haut commissaire aux droits de l’homme des Nations unies s’achève, il était “le meilleure exemple, la quintessence de la décence et de la grâce”.
Et dans son hommage à Annan, le diplomate jordanien, qui s’est souvent heurté aux grandes puissances pendant les quatre années de son mandat, raconte que lorsqu’il se sentait isolé politiquement, il allait chercher conseil auprès de son mentor, au gré de longues marches à pied dans Genève.
“Lorsque je lui ai dit un jour que le monde entier grognait contre moi, il m’a regardé, comme un père regarderait son fils, et m’a dit avec fermeté: ‘Ce que tu fais, c’est ce qui doit être fait. Laisse-les grogner’.”
LE CAUCHEMAR RWANDAIS ET LA GUERRE EN IRAK
Né en avril 1938 à Kumasi, au Ghana, Kofi Annan avait fait ses études aux Etats-Unis et à Genève avant de faire l’essentiel de sa carrière au sein de l’administration onusienne, débutant au tout début des années 1960 à l’Organisation mondiale de la santé (OMS) avant de siéger à la commission économique des Nations unies pour l’Afrique puis de rejoindre le siège new-yorkais de l’organisation en 1988.
Entre 1993 et 1996, en pleine guerre en ex-Yougoslavie et pendant le génocide rwandais de 1994, où 800.000 Tutsis et Hutus modérés sont massacrés, il était sous-secrétaire général chargé des opérations de maintien de la paix.
“Je pensais à l’époque que je faisais de mon mieux. Mais j’ai réalisé après le génocide que j’aurais pu faire plus et que j’aurais dû tirer la sonnette d’alarme et battre le rappel”, avait-il déclaré des années plus tard à propos du cauchemar rwandais.
Il lui était notamment reproché de ne pas avoir réagi à un télégramme du général canadien Roméo Dallaire, commandant des casques bleus, l’exhortant d’agir contre les caches d’armes que les extrémistes hutus multipliaient dans l’optique du génocide.
Mais dans ses mémoires, le général Dallaire, implacable dans son réquisitoire contre l’impuissance des nations à stopper les meurtres de masse au Rwanda, n’avait eu que des louanges pour Annan, décrivant “son humanisme et son dévouement pour la détresse des autres”.
En 1997, il était devenu le septième secrétaire général de l’Onu.
L’intervention militaire américaine de 2003 en Irak - qu’il avait qualifiée d’”illégale” - lui avait fait perdre sa voix pendant plusieurs mois.
Un attentat à la bombe contre le QG de l’Onu à Bagdad, le 19 août 2003, avait fait ensuite 22 morts parmi des membres du personnel onusien qu’Annan avait fini par accepter de renvoyer en Irak à la demande des Etats-Unis. “Cela m’a presque autant touché que la perte de ma soeur jumelle”, avait-il confié.
En 2003 éclate aussi le scandale du programme “pétrole contre nourriture”, dont il s’avère qu’il a été en partie détourné de son objectif - compenser les effets sur la population irakienne de l’embargo onusien sur l’Irak - par Saddam Hussein.
Peu de responsables de l’Onu avaient été accusés d’enrichissement personnel, mais l’organisation avait été taxée de négligence et de manque de transparence et Annan personnellement touché, puisque son fils, Kojo, avait été impliqué.
“NOUS AVONS POUSSÉ DE LOURDS ROCHERS”
Après son départ de la tête de l’Onu, Kofi Annan avait poursuivi son oeuvre de médiateur. En 2007, au Kenya, il avait su stopper la spirale sanglante des violences post-électorales, enfermant les protagonistes du conflit dans une pièce et les conduisant à accepter un accord de partage du pouvoir.
Mais une mission sur la Syrie avait en revanche tourné à l’échec. En février 2012, au début de la guerre en Syrie, Annan avait été nommé envoyé spécial de l’Onu. Il évoquait alors son “devoir sacré” de tenter de résoudre cette crise. Mais il avait jeté l’éponge deux mois plus tard, fustigeant la paralysie du Conseil de sécurité des Nations unies.
“L’Onu peut être améliorée, elle n’est pas parfaite mais si elle n’existait pas, il faudrait la créer”, avait-il dit en avril dernier lors d’une interview accordée à la BBC à l’occasion de son 80e anniversaire.
Lors de son discours d’adieu devant l’Assemblée générale des Nations unies en septembre 2006, celui qui se présentait comme un optimiste inaltérable avait emprunté au mythe de Sisyphe:
“Ensemble, avait-il dit, nous avons poussé de lourds rochers vers le haut de la montagne, même si certains nous ont échappé et sont redescendus. Mais cette montagne, avec ses bourrasques et sa vue panoramique, est le meilleur point de vue sur la terre (...) Même si j’aspire à me reposer du fardeau de ces rochers obstinés dans la prochaine phase de ma vie, je sais que la montagne me manquera.”
En 2001, Kofi Annan s’était vu décerner le prix Nobel de la paix, conjointement avec l’Organisation des Nations unies, pour leur travail “pour un monde mieux organisé et plus pacifique”.
Le comité Nobel avait salué le travail effectué par Annan pour redynamiser la machine onusienne et faire des droits de l’homme une priorité. Il avait également reconnu son engagement dans la lutte contre le sida en Afrique.
Kofi Annan est mort tôt samedi matin dans un hôpital de Berne, en Suisse, ont précisé deux de ses proches à Accra, la capitale ghanéenne.
Dans un communiqué, sa Fondation a fait part de son “immense tristesse”. Elle ajoute qu’il a succombé à une brève maladie, entouré de sa seconde épouse, Nane, et de ses enfants.
“De bien des manières, Kofi Annan était les Nations unies. Il en a gravi les échelons jusqu’à diriger l’organisation et la faire entrer dans le nouveau millénaire avec une dignité et une détermination sans égales”, a réagi l’actuel secrétaire général de l’Onu, Antonio Guterres, dans un communiqué.
Pour Zeïd Ra’ad al Hussein, dont le mandat de haut commissaire aux droits de l’homme des Nations unies s’achève, il était “le meilleure exemple, la quintessence de la décence et de la grâce”.
Et dans son hommage à Annan, le diplomate jordanien, qui s’est souvent heurté aux grandes puissances pendant les quatre années de son mandat, raconte que lorsqu’il se sentait isolé politiquement, il allait chercher conseil auprès de son mentor, au gré de longues marches à pied dans Genève.
“Lorsque je lui ai dit un jour que le monde entier grognait contre moi, il m’a regardé, comme un père regarderait son fils, et m’a dit avec fermeté: ‘Ce que tu fais, c’est ce qui doit être fait. Laisse-les grogner’.”
LE CAUCHEMAR RWANDAIS ET LA GUERRE EN IRAK
Né en avril 1938 à Kumasi, au Ghana, Kofi Annan avait fait ses études aux Etats-Unis et à Genève avant de faire l’essentiel de sa carrière au sein de l’administration onusienne, débutant au tout début des années 1960 à l’Organisation mondiale de la santé (OMS) avant de siéger à la commission économique des Nations unies pour l’Afrique puis de rejoindre le siège new-yorkais de l’organisation en 1988.
Entre 1993 et 1996, en pleine guerre en ex-Yougoslavie et pendant le génocide rwandais de 1994, où 800.000 Tutsis et Hutus modérés sont massacrés, il était sous-secrétaire général chargé des opérations de maintien de la paix.
“Je pensais à l’époque que je faisais de mon mieux. Mais j’ai réalisé après le génocide que j’aurais pu faire plus et que j’aurais dû tirer la sonnette d’alarme et battre le rappel”, avait-il déclaré des années plus tard à propos du cauchemar rwandais.
Il lui était notamment reproché de ne pas avoir réagi à un télégramme du général canadien Roméo Dallaire, commandant des casques bleus, l’exhortant d’agir contre les caches d’armes que les extrémistes hutus multipliaient dans l’optique du génocide.
Mais dans ses mémoires, le général Dallaire, implacable dans son réquisitoire contre l’impuissance des nations à stopper les meurtres de masse au Rwanda, n’avait eu que des louanges pour Annan, décrivant “son humanisme et son dévouement pour la détresse des autres”.
En 1997, il était devenu le septième secrétaire général de l’Onu.
L’intervention militaire américaine de 2003 en Irak - qu’il avait qualifiée d’”illégale” - lui avait fait perdre sa voix pendant plusieurs mois.
Un attentat à la bombe contre le QG de l’Onu à Bagdad, le 19 août 2003, avait fait ensuite 22 morts parmi des membres du personnel onusien qu’Annan avait fini par accepter de renvoyer en Irak à la demande des Etats-Unis. “Cela m’a presque autant touché que la perte de ma soeur jumelle”, avait-il confié.
En 2003 éclate aussi le scandale du programme “pétrole contre nourriture”, dont il s’avère qu’il a été en partie détourné de son objectif - compenser les effets sur la population irakienne de l’embargo onusien sur l’Irak - par Saddam Hussein.
Peu de responsables de l’Onu avaient été accusés d’enrichissement personnel, mais l’organisation avait été taxée de négligence et de manque de transparence et Annan personnellement touché, puisque son fils, Kojo, avait été impliqué.
“NOUS AVONS POUSSÉ DE LOURDS ROCHERS”
Après son départ de la tête de l’Onu, Kofi Annan avait poursuivi son oeuvre de médiateur. En 2007, au Kenya, il avait su stopper la spirale sanglante des violences post-électorales, enfermant les protagonistes du conflit dans une pièce et les conduisant à accepter un accord de partage du pouvoir.
Mais une mission sur la Syrie avait en revanche tourné à l’échec. En février 2012, au début de la guerre en Syrie, Annan avait été nommé envoyé spécial de l’Onu. Il évoquait alors son “devoir sacré” de tenter de résoudre cette crise. Mais il avait jeté l’éponge deux mois plus tard, fustigeant la paralysie du Conseil de sécurité des Nations unies.
“L’Onu peut être améliorée, elle n’est pas parfaite mais si elle n’existait pas, il faudrait la créer”, avait-il dit en avril dernier lors d’une interview accordée à la BBC à l’occasion de son 80e anniversaire.
Lors de son discours d’adieu devant l’Assemblée générale des Nations unies en septembre 2006, celui qui se présentait comme un optimiste inaltérable avait emprunté au mythe de Sisyphe:
“Ensemble, avait-il dit, nous avons poussé de lourds rochers vers le haut de la montagne, même si certains nous ont échappé et sont redescendus. Mais cette montagne, avec ses bourrasques et sa vue panoramique, est le meilleur point de vue sur la terre (...) Même si j’aspire à me reposer du fardeau de ces rochers obstinés dans la prochaine phase de ma vie, je sais que la montagne me manquera.”