En Syrie, les vieilles pierres de Palmyre retournent à la poussière, emportées par les explosifs des miliciens de l’État islamique. Dernièrement, les soldats djihadistes ont fait sauter le temple dédié à Baalshamin, le dieu des Cieux adoré par les Phéniciens et adopté par la plupart des peuples sémitiques alentours. Plus tôt, c'était la cité antique d'Hatra qui subissait la rage des islamistes. Ces outrages ne faisaient eux-mêmes que succéder à la destructions des œuvres préislamiques du musée de Mossoul.
Si les hommes de l’État islamique ont la bombe facile en matière de temples, sculptures, statues qui sont autant de perles de l'histoire de l'humanité c'est parce qu'ils se battent au nom de la doctrine salafiste, qui prône un retour à la pratique originelle de l'islam que les musulmans auraient abandonnée au fil des siècles. Ils ne voient dans ces chefs-d’œuvres que les traces d'un crime commis par les hommes envers Dieu, un mal à extirper du monde: l'idolâtrie.
S'opposer au culte qui précède
Cette hostilité déclarée à la face des idoles ne date pas d'hier mais plonge ses racines dans l'histoire de la péninsule arabe et le Coran. À sa fondation, la religion musulmane se construit naturellement en opposition au culte qui la précède et qu'elle entend supplanter. Au début du VIIe siècle avant Jésus-Christ, les Arabes sont généralement polythéistes et vénèrent des pierres qu'ils ont façonnées à l'image de leurs divinités, bien que des communautés chrétiennes et surtout juives soient présentes, en particulier à Médine. Les païens commettent l'un des plus grands des pêchés pour le prophète Mahomet: ils associent des égaux au Dieu unique, Allah.
Dieu a dit: “N’adorez point deux dieux, car lui est un Dieu unique. Craignez-moi donc”
Le Coran
Le Coran s'en prend explicitement aux polythéistes à de nombreuses reprises. Pour ne citer que deux exemples, on lira ce passage de la sourate 16, dite «de l'abeille» (dans la traduction d'Albin de Kaimirski-Biberstein):
«Dieu a dit: “N’adorez point deux dieux, car lui est un Dieu unique. Craignez-moi donc.” À lui appartient tout ce qui est dans les cieux et sur la terre. Un culte perpétuel lui est dû. Craignez-vous un autre que Dieu?» (versets 53-54).
Ou encore le verset 24 de la sourate XXIX, dite «de l'araignée»:
«Vous avez pris à côté de Dieu des idoles pour l’objet de votre culte, par l’amour de ce monde, qui existe chez vous; mais, au jour de la résurrection, une partie de vous reniera l’autre, les uns maudiront les autres; le feu sera votre demeure, et vous n’aurez aucun protecteur.»
Le souvenir effacé des cultes anciens
La tradition musulmane a même assuré a posteriori que Mahomet et Ali, futur Calife de l'islam, avaient procédé à la destruction des sanctuaires païens pendant la conquête de l'Arabie. On raconte ainsi qu'après la prise de La Mecque par ses troupes, Mahomet se serait rendu à la Kaaba, ce lieu saint en forme de cube que les Musulmans vénèrent, le considérant comme un temple construit à l'origine par Abraham en l'honneur du Dieu créateur mais que les Arabes païens des régions centrales de la péninsule adoraient déjà. Là, il aurait voué à la destruction 360 idoles installées dans la Kaaba par les tribus préislamiques locales.
Aux origines de l'idolâtrie
Elle éclaire notamment aussi les raisons pour lesquelles le message de Mahomet s'est imposé dans cette région du monde, chauffée à blanc par un soleil impitoyable, parcourue par des caravanes de marchands et d'hommes en armes, de nomades et de citadins sédentaires. C'est cependant à des savants musulmans du haut Moyen-âge que l'on doit en grande partie d'avoir pu conserver quelques traces du paganisme arabe. Au premier rang d'entre eux, on trouve un historien du VIIIe-IXe siècle après Jésus-Christ, Hicham Ibn Al-Kalbi, auteur du Livre des Idoles. L'homme a longtemps fait figure de référence et son texte fait partie des rares extraits de la littérature musulmane traitant de l'Arabie à l'époque où celle-ci priait plusieurs divinités et n'avait pas encore entendu parler du Prophète, à nous être parvenus.
Son apport à la connaissance des temps d'avant l'islam est précieux bien qu'il ne faille pas oublier qu'écrit par un musulman médiéval, Le Livre des Idoles ne va pas sans une certaine partialité. Dans son ouvrage, Hicham Ibn Al-Kalbi donne deux origines possibles à l'idolâtrie. L'une joue sur un registre purement mythique tandis que l'autre prend une résonance plus historique.
«Les enfants de Seth allaient de temps en temps prier devant la tombe d'Adam et rendre hommage à l'âme de leur grand-père. C'est alors qu'un individu du clan de Qâbil (Caïn) dit aux siens: “Les fils de Seth vénèrent un lieu autour duquel ils font des tours pieux alors que vous n'avez rien.” Un jour, il leur présenta un bétyle (une pierre sacrée) qu'ils acceptèrent de vénérer. C'est ainsi que naquit l'idolâtrie au sein de l'humanité.»
«Chaque famille qui quittait La Mecque emportait dans ses ballots, en guise de souvenir, une pierre ramassée au hasard dans la cour du sanctuaire, par vénération du lieu et par nostalgie de La Mecque. Là où une famille campait “la pierre-souvenir” était pieusement déposée, inspirant à ses admirateurs bon augure et optimisme qui stimulaient leur fidélité et leur attachement au sanctuaire.»
Divinités mineures et déesses-sœurs
L'idolâtrie renvoie alors à une myriade d'entités divines. Parmi celles-ci, on trouve par exemple Wadd, un personnage qui semble personnifier la vertu et appeler à la chasteté selon Ibn Al-Kalbi, ou encore Al-Uqaycer que ses thuriféraires honoraient en jetant des mèches de leurs cheveux avec des poignées de farine (l'historien assure que des pauvres récupéraient parfois la poudre pour la cuisiner, cheveux et poux compris). Mais le culte de ces divinités mineures est éclipsé par celui d'une triade de déesses-sœurs: Manât, l’aînée, qui incarne le Destin et Al-Uzzâ, la benjamine, encadrent Al-Lât, incarnant la féminité, la fécondité et est associée au soleil.
Leur notoriété provient de la mention de leurs noms dans le Coran, dans la sourate de l'étoile:
«Que vous semble d'Al-Lât et d'Al-Uzzâ, et de cette autre, Manât, la troisième idole? (…) Ce ne sont que des noms; c’est vous et vos pères qui les avez ainsi nommés. Dieu ne vous a révélé aucune preuve à ce sujet; vous ne suivez que vos idées et vos penchants, et cependant vous avez reçu une direction de votre Seigneur.» (versets 19-20 puis 23).
Un «polythéisme» très différent de l'Occident
On en fait souvent les filles d'un Dieu supérieur, appelé Houbal, dont la statue taillée dans l'agate aurait trôné au centre de la Kaaba. Ibn Al-Kalbi indique que sept flèches jonchaient le sol au pied de la statue. Deux d'entre elles importaient particulièrement car elles servaient à rassurer ou à accabler les pères inquiets quant à leur paternité. Sur l'une, on lisait en arabe «franc», sur l'autre «pièce rapportée». Le père tirait une de ses flèches en aveugle et devant témoins. L'inscription décidait ensuite du sort de l'enfant, de son abandon ou de son appartenance au foyer.
L'historien musulman se fait d'ailleurs le conteur d'une autre angoisse paternelle confiée à Houbal. Selon lui, le père de Mahomet, Abdallah, avait sollicité le dieu pour l'exécution d'un vœu en l'échange du sacrifice de son prochain né. Son désir ayant été satisfait, il préféra sacrifier cent chameaux plutôt que son fils, le futur Prophète de l'islam. Pour Rachid Benzine, islamologue et auteur, entre autres du Coran expliqué aux jeunes, Houbal est surtout la créature de l'esprit de musulmans postérieurs soucieux d'en faire le symbole de l'idolâtrie des païens. Il nous explique ce qui sépare la religion arabe antéislamique des polythéismes voisins:
«On ne peut pas parler de panthéon. Je ne parlerai pas de polythéisme non plus dans la mesure où il s'agit d'un ensemble de divinités autonomes alliées à diverses tribus. Les rapports entre chaque groupe sont ceux de l'alliance scellée par le serment et la parole donnée. Cette structure sociale se trouve en quelque sorte dupliquée dans les rapports avec le divin. Celui-ci est vu comme entretenant avec les hommes la même relation d'alliance que celle qui unit les hommes de la tribu entre eux.»
L'importance du tissu social
Les dieux tribaux sont loin de l'image que les monothéismes ont conçu autour d'une divinité unique et créatrice dont la présence se lirait dans le monde entier. Pour comprendre le culte arabe, il faut s'attarder sur le tissu local et ses difficultés:
«Dans l'Arabie centrale, la pluviosité est aléatoire voire inexistante. Le divin est forcément impliqué directement dans l'obsession sociale de la survie du groupe qui est liée à l'eau et à la pluie. Chaque tribu semble donc avoir eu son dieu protecteur ou sa dame protectrice, des dieux terrestres représentés comme des puissances vitales. Si ceux-ci sont liées à l'eau, c'est qu'il s'agit du principe vital par excellence en Arabie.»
Mais dans le désert, les difficultés excèdent la simple rareté de l'eau et là encore, les différents dieux protecteurs avaient à charge d'aplanir la route sous les pas des nomades:
«Ces divinités avaient une autre fonction vitale: celle de la guidance sur la bonne piste car dans le désert, perdre la piste c'est mourir. La question pour un groupe est de réussir à s'allier avec un dieu efficace qui assure sa survie comme il le ferait dans le cadre d'une alliance avec une autre tribu», ajoute Rachid Benzine.
La pratique de l'infanticide de filles
Le cadre aride associé à la culture tribale donne à l'Arabie païenne un visage parfois peu amène. La violence est, naturellement, partie intégrante d'une civilisation qui voue son existence à la survie. Et, les ressources étant faibles et les dangers nombreux, il arrive alors que les tribus décident de se délester de ses éléments les plus vulnérables. Il arrivait même, sans qu'on puisse pour le moment se faire une certitude sur l'ampleur de cette pratique, qu'on enterrât vivants les nourrissons féminins. Haoues Seniguer est maître de conférences à l'IEP de Lyon et spécialiste de la sociologie politique des mondes arabe et musulman l'assure: «Le phénomène a incontestablement existé mais il concernait probablement seulement quelques tribus nomades, pas forcément les citadins.»
Le Coran s'élève à plusieurs reprises contre l'infanticide des filles. Ainsi, la petite fille est décrite comme un «don» de Dieu au même titre qu'un petit garçon, dans la sourate 42 au verset 49: «À Allah appartient la royauté des cieux et de la terre. Il crée ce qu'Il veut. Il fait don de filles à qui Il veut, et don de garçons à qui Il veut.» Le texte sacré blâme ainsi les parents songeant à commettre un tel acte, dans la sourate 16 aux versets 60-61: «Si l'on annonce à quelqu’un d’entre eux la naissance d’une fille, son visage s’obscurcit, et il devient comme suffoqué par la douleur. Il se cache des siens, à cause de la désastreuse nouvelle. Doit-il la garder et en subir la honte, ou l’ensevelir dans la poussière? Que leurs jugements sont déraisonnables!»
«Mahomet était un grand pragmatique»
Cette opposition du texte musulman à l'enterrement de filles à peine nées pourrait bien s'enraciner dans un détail biographique de la vie de Mahomet selon Rachid Benzine qui nous explique: «Sur le plan personnel, Muhammad n'a eu que des filles dont une seule Fatima lui a survécu quelques mois. Il avait certainement une sensibilité personnelle sur le sujet. Il a été insulté par les Mecquois comme châtré (abtar en Arabe), c'est-à-dire homme sans fils survivant comme le rappelle la sourate 108, dite de l'abondance.» Raisons biographiques ou non, l'Arabie du Prophète rompt , là aussi, avec celle des idoles.
Le polythéisme, ses valeurs et ses pratiques auraient donc été emportés, détruits totalement par l'islam? Au contraire, celui-ci apparaît davantage comme une rupture dans la continuité par rapport aux cultes qui la précèdent. Elle a dû composer à l'origine avec des traditions bien ancrées dans les mœurs. Haoues Seniguer y voit le génie pratique de Mahomet:
«Mahomet était un grand pragmatique. Pour qu'une doctrine existe, il faut qu'elle se singularise mais aussi qu'elle s'appuie sur des symbole déjà communément admis. Par exemple, La Mecque continuera à être un lieu de pèlerinages mais sera réaménagée ou encore l'islam abolit l'infanticide des filles mais pas la polygamie.»
La survie de croyances populaires
En un sens, la religion musulmane, en dépassant le polythéisme, en aurait sauvé les traits fondamentaux. Car à partir de la fin du VIe siècle, l'Arabie change, connaît un phénomène de sédentarisation sous l'effet duquel la société païenne se sclérose.
«Dans le contexte tribal et nomade, il y avait des solidarités bien établies, liées aux identités collectives. Avec la sédentarisation, vient la puissance d'une oligarchie citadine. Le polythéisme avait un versant économique non négligeable pour les oligarques, autour des pèlerinages et des cérémonies. L'islam vient sauver l'esprit tribal corrompu par les citadins. Paradoxalement, la sédentarisation vient accélérer la popularisation du message islamique», ajoute Haoues Seniguer.
Le triomphe de l'islam
Dans le Coran, la sourate 15 évoque leur création tandis que la sourate 72 leur est intégralement consacrée (dans la traduction de Kazimirski suivie ici, les Djinns sont cependant rendus par «Génies»). Les Djinns ont même jeté un trouble dans les esprits d'occidentaux rêveurs comme Victor Hugo. Cette persistance de récits surnaturels nés avant le règne du Dieu unique forment une des trames du Coran qui s'ingénie cependant à le cacher, comme le remarque Rachid Benzine: «C'est comme si le texte s'ingéniait à masquer cette continuité fondamentale.»
Cette partie de cache-cache littéraire et doctrinale ne doit pas occulter le succès de l'islam qui a réussi à édifier un monothéisme strict sur les terres d'un paganisme original, éclaté et décousu. Dans cette mesure, l'islam a réussi là où le judaïsme et le christianisme pourtant présents et vivaces, car les conversions à ces deux religions sont relativement courantes dans les dernières décennies du polythéisme, avaient échoué. On peut analyser ce triomphe islamique dans la péninsule arabe sous un angle géopolitique, comme Haoues Seniguer nous invite à le faire:
«L'islam a agi comme une religion fédératrice pour les peuples locaux. Il y a des éléments conjoncturels à sa réussite: le monde perse, tenant du zoroastrisme, et l'empire byzantin, chrétien, étaient perçus comme des menaces. Mahomet a apporté du crédit à son message car il a donné des lettres de noblesse à des peuplades arabes en prise avec ces empires colossaux.»
Après que les troupes musulmanes de Mahomet ont triomphé des clans polythéistes d'Arabie, les croyants ne tardent pas à partir à la conquête du monde derrière la bannière des Califes. Les empires byzantin et perse, pourtant de si inquiétants voisins, seront d'ailleurs mis en pièces. Cette puissance militaire, cet enthousiasme guerrier démontreraient la fougue d'un peuple désormais sûr de sa foi, et fier de son unique Dieu.
«L'islam pour les Arabes du VIIe siècle, ce ne fut pas adhérer à un texte»
Pour Rachid Benzine, on commet un contresens en souscrivant à cette théorie. C'est au contraire parce que les chefs musulmans décident d'adopter une politique d'expansion territoriale et de razzias d'une ampleur inconnue jusque là, et que celles-ci sont couronnées de succès que l'islam assure son assise populaire. C'est parce que les gains obtenus dans le sentier d'Allah sont les plus importants que la religion musulmane vainc l'ordre païen et dépasse judaïsme ou christianisme:Après que les troupes musulmanes de Mahomet ont triomphé des clans polythéistes d'Arabie, les croyants ne tardent pas à partir à la conquête du monde derrière la bannière des Califes. Les empires byzantin et perse, pourtant de si inquiétants voisins, seront d'ailleurs mis en pièces. Cette puissance militaire, cet enthousiasme guerrier démontreraient la fougue d'un peuple désormais sûr de sa foi, et fier de son unique Dieu.
«Contrairement à ce que proposaient chrétiens et juifs, il ne s'agit plus de convertir mais de faire entrer dans une alliance. L'islam pour les Arabes du VIIe siècle, ce ne fut pas adhérer à un texte. C'est la divinité efficace qui a mobilisé les hommes de l'Arabie tribale et les fruits du butin immense qui résulta des razzias extra arabiques. Ce n'était pas une question d'idéologie.
Leurs chefs mecquois et médinois furent de grands pragmatiques et d'une grande intelligence politique. C'est cette absence de religiosité (telle que nous l'entendons aujourd'hui, ndlr) qui leur a permis d'asseoir leur pouvoir et surtout de le faire durer. L'islam-religion va mettre plus de deux siècles à se construire dans une société complètement différente de celle du Muhammad, c'est alors que naîtront les conflits religieux au sein de l'islam lui-même.»
Un désaveu à l'action des islamistes
C'est en satisfaisant les appétits, trop longtemps frustrés, d'une Arabie tribale et polythéiste et en opérant un retour aux valeurs portées par les païens mais un temps mises à mal que l'islam va prospérer. Et c'est seulement au fil des siècle que l'arrivée tardive d'un dogme plus sophistiqué tendra à enterrer dans les sables le souvenir de peuples arabes antérieurs à l'islam. Haoues Seniguer dresse le même constat. Cette parenté aussi obscure que réelle entre l'islam et les cultes plus lointains porte ainsi selon lui un vigoureux désaveu à l'action des islamistes destructeurs d'idoles de notre époque:
«On pourrait formuler l'hypothèse suivante: l'islam ne doit sa réussite qu'à ce qui le précède. C'est une véritable ruse de la raison. Et c'est un démenti très clair qu'on peut apporter aux intégristes contemporains.»
Source
Si les hommes de l’État islamique ont la bombe facile en matière de temples, sculptures, statues qui sont autant de perles de l'histoire de l'humanité c'est parce qu'ils se battent au nom de la doctrine salafiste, qui prône un retour à la pratique originelle de l'islam que les musulmans auraient abandonnée au fil des siècles. Ils ne voient dans ces chefs-d’œuvres que les traces d'un crime commis par les hommes envers Dieu, un mal à extirper du monde: l'idolâtrie.
S'opposer au culte qui précède
Cette hostilité déclarée à la face des idoles ne date pas d'hier mais plonge ses racines dans l'histoire de la péninsule arabe et le Coran. À sa fondation, la religion musulmane se construit naturellement en opposition au culte qui la précède et qu'elle entend supplanter. Au début du VIIe siècle avant Jésus-Christ, les Arabes sont généralement polythéistes et vénèrent des pierres qu'ils ont façonnées à l'image de leurs divinités, bien que des communautés chrétiennes et surtout juives soient présentes, en particulier à Médine. Les païens commettent l'un des plus grands des pêchés pour le prophète Mahomet: ils associent des égaux au Dieu unique, Allah.
Dieu a dit: “N’adorez point deux dieux, car lui est un Dieu unique. Craignez-moi donc”
Le Coran
Le Coran s'en prend explicitement aux polythéistes à de nombreuses reprises. Pour ne citer que deux exemples, on lira ce passage de la sourate 16, dite «de l'abeille» (dans la traduction d'Albin de Kaimirski-Biberstein):
«Dieu a dit: “N’adorez point deux dieux, car lui est un Dieu unique. Craignez-moi donc.” À lui appartient tout ce qui est dans les cieux et sur la terre. Un culte perpétuel lui est dû. Craignez-vous un autre que Dieu?» (versets 53-54).
Ou encore le verset 24 de la sourate XXIX, dite «de l'araignée»:
«Vous avez pris à côté de Dieu des idoles pour l’objet de votre culte, par l’amour de ce monde, qui existe chez vous; mais, au jour de la résurrection, une partie de vous reniera l’autre, les uns maudiront les autres; le feu sera votre demeure, et vous n’aurez aucun protecteur.»
Le souvenir effacé des cultes anciens
La tradition musulmane a même assuré a posteriori que Mahomet et Ali, futur Calife de l'islam, avaient procédé à la destruction des sanctuaires païens pendant la conquête de l'Arabie. On raconte ainsi qu'après la prise de La Mecque par ses troupes, Mahomet se serait rendu à la Kaaba, ce lieu saint en forme de cube que les Musulmans vénèrent, le considérant comme un temple construit à l'origine par Abraham en l'honneur du Dieu créateur mais que les Arabes païens des régions centrales de la péninsule adoraient déjà. Là, il aurait voué à la destruction 360 idoles installées dans la Kaaba par les tribus préislamiques locales.
Les vieilles croyances arabes ont largement sombré dans l'oubli, devenant méconnaissables, comme si l'islam était apparu dans les sables d'un désertS'il est à noter que cette histoire ne s'appuie non pas sur le Coran mais sur le 3.333e hadith Muslim (les Hadith sont des recueils de paroles attribuées à Mahomet ou à ses premiers compagnons), il est incontestable que l'islam a veillé à effacer au fil des siècles le souvenir de ce culte plus ancien qu'elle. Aujourd'hui, les vieilles croyances arabes ont largement sombré dans l'oubli, devenant méconnaissables, comme si l'islam était apparu dans les sables d'un désert aussi bien géographique que mystique. Il n'en est pourtant rien et la religion arabe préislamique dessine les contours d'une spiritualité et de rites bien différents des polythéismes grec ou romain, en même temps qu'elle aide à y voir plus clair sur l'islam des origines.
Aux origines de l'idolâtrie
Elle éclaire notamment aussi les raisons pour lesquelles le message de Mahomet s'est imposé dans cette région du monde, chauffée à blanc par un soleil impitoyable, parcourue par des caravanes de marchands et d'hommes en armes, de nomades et de citadins sédentaires. C'est cependant à des savants musulmans du haut Moyen-âge que l'on doit en grande partie d'avoir pu conserver quelques traces du paganisme arabe. Au premier rang d'entre eux, on trouve un historien du VIIIe-IXe siècle après Jésus-Christ, Hicham Ibn Al-Kalbi, auteur du Livre des Idoles. L'homme a longtemps fait figure de référence et son texte fait partie des rares extraits de la littérature musulmane traitant de l'Arabie à l'époque où celle-ci priait plusieurs divinités et n'avait pas encore entendu parler du Prophète, à nous être parvenus.
Son apport à la connaissance des temps d'avant l'islam est précieux bien qu'il ne faille pas oublier qu'écrit par un musulman médiéval, Le Livre des Idoles ne va pas sans une certaine partialité. Dans son ouvrage, Hicham Ibn Al-Kalbi donne deux origines possibles à l'idolâtrie. L'une joue sur un registre purement mythique tandis que l'autre prend une résonance plus historique.
«Les enfants de Seth allaient de temps en temps prier devant la tombe d'Adam et rendre hommage à l'âme de leur grand-père. C'est alors qu'un individu du clan de Qâbil (Caïn) dit aux siens: “Les fils de Seth vénèrent un lieu autour duquel ils font des tours pieux alors que vous n'avez rien.” Un jour, il leur présenta un bétyle (une pierre sacrée) qu'ils acceptèrent de vénérer. C'est ainsi que naquit l'idolâtrie au sein de l'humanité.»
L'idolâtrie renvoie alors à une myriade d'entités divinesL'explication historique semble elle aussi fantasmée et remonte à un mouvement d'exode supposé après une guerre des clans à La Mecque:
«Chaque famille qui quittait La Mecque emportait dans ses ballots, en guise de souvenir, une pierre ramassée au hasard dans la cour du sanctuaire, par vénération du lieu et par nostalgie de La Mecque. Là où une famille campait “la pierre-souvenir” était pieusement déposée, inspirant à ses admirateurs bon augure et optimisme qui stimulaient leur fidélité et leur attachement au sanctuaire.»
Divinités mineures et déesses-sœurs
L'idolâtrie renvoie alors à une myriade d'entités divines. Parmi celles-ci, on trouve par exemple Wadd, un personnage qui semble personnifier la vertu et appeler à la chasteté selon Ibn Al-Kalbi, ou encore Al-Uqaycer que ses thuriféraires honoraient en jetant des mèches de leurs cheveux avec des poignées de farine (l'historien assure que des pauvres récupéraient parfois la poudre pour la cuisiner, cheveux et poux compris). Mais le culte de ces divinités mineures est éclipsé par celui d'une triade de déesses-sœurs: Manât, l’aînée, qui incarne le Destin et Al-Uzzâ, la benjamine, encadrent Al-Lât, incarnant la féminité, la fécondité et est associée au soleil.
Leur notoriété provient de la mention de leurs noms dans le Coran, dans la sourate de l'étoile:
«Que vous semble d'Al-Lât et d'Al-Uzzâ, et de cette autre, Manât, la troisième idole? (…) Ce ne sont que des noms; c’est vous et vos pères qui les avez ainsi nommés. Dieu ne vous a révélé aucune preuve à ce sujet; vous ne suivez que vos idées et vos penchants, et cependant vous avez reçu une direction de votre Seigneur.» (versets 19-20 puis 23).
Un «polythéisme» très différent de l'Occident
On en fait souvent les filles d'un Dieu supérieur, appelé Houbal, dont la statue taillée dans l'agate aurait trôné au centre de la Kaaba. Ibn Al-Kalbi indique que sept flèches jonchaient le sol au pied de la statue. Deux d'entre elles importaient particulièrement car elles servaient à rassurer ou à accabler les pères inquiets quant à leur paternité. Sur l'une, on lisait en arabe «franc», sur l'autre «pièce rapportée». Le père tirait une de ses flèches en aveugle et devant témoins. L'inscription décidait ensuite du sort de l'enfant, de son abandon ou de son appartenance au foyer.
Je ne parlerai pas de polythéisme non plus dans la mesure où il s'agit d'un ensemble de divinités autonomes alliées à diverses tribusRachid Benzine, islamologue
L'historien musulman se fait d'ailleurs le conteur d'une autre angoisse paternelle confiée à Houbal. Selon lui, le père de Mahomet, Abdallah, avait sollicité le dieu pour l'exécution d'un vœu en l'échange du sacrifice de son prochain né. Son désir ayant été satisfait, il préféra sacrifier cent chameaux plutôt que son fils, le futur Prophète de l'islam. Pour Rachid Benzine, islamologue et auteur, entre autres du Coran expliqué aux jeunes, Houbal est surtout la créature de l'esprit de musulmans postérieurs soucieux d'en faire le symbole de l'idolâtrie des païens. Il nous explique ce qui sépare la religion arabe antéislamique des polythéismes voisins:
«On ne peut pas parler de panthéon. Je ne parlerai pas de polythéisme non plus dans la mesure où il s'agit d'un ensemble de divinités autonomes alliées à diverses tribus. Les rapports entre chaque groupe sont ceux de l'alliance scellée par le serment et la parole donnée. Cette structure sociale se trouve en quelque sorte dupliquée dans les rapports avec le divin. Celui-ci est vu comme entretenant avec les hommes la même relation d'alliance que celle qui unit les hommes de la tribu entre eux.»
L'importance du tissu social
Les dieux tribaux sont loin de l'image que les monothéismes ont conçu autour d'une divinité unique et créatrice dont la présence se lirait dans le monde entier. Pour comprendre le culte arabe, il faut s'attarder sur le tissu local et ses difficultés:
«Dans l'Arabie centrale, la pluviosité est aléatoire voire inexistante. Le divin est forcément impliqué directement dans l'obsession sociale de la survie du groupe qui est liée à l'eau et à la pluie. Chaque tribu semble donc avoir eu son dieu protecteur ou sa dame protectrice, des dieux terrestres représentés comme des puissances vitales. Si ceux-ci sont liées à l'eau, c'est qu'il s'agit du principe vital par excellence en Arabie.»
Mais dans le désert, les difficultés excèdent la simple rareté de l'eau et là encore, les différents dieux protecteurs avaient à charge d'aplanir la route sous les pas des nomades:
«Ces divinités avaient une autre fonction vitale: celle de la guidance sur la bonne piste car dans le désert, perdre la piste c'est mourir. La question pour un groupe est de réussir à s'allier avec un dieu efficace qui assure sa survie comme il le ferait dans le cadre d'une alliance avec une autre tribu», ajoute Rachid Benzine.
Allah fait don de filles à qui Il veut, et don de garçons à qui Il veutLe Coran
La pratique de l'infanticide de filles
Le cadre aride associé à la culture tribale donne à l'Arabie païenne un visage parfois peu amène. La violence est, naturellement, partie intégrante d'une civilisation qui voue son existence à la survie. Et, les ressources étant faibles et les dangers nombreux, il arrive alors que les tribus décident de se délester de ses éléments les plus vulnérables. Il arrivait même, sans qu'on puisse pour le moment se faire une certitude sur l'ampleur de cette pratique, qu'on enterrât vivants les nourrissons féminins. Haoues Seniguer est maître de conférences à l'IEP de Lyon et spécialiste de la sociologie politique des mondes arabe et musulman l'assure: «Le phénomène a incontestablement existé mais il concernait probablement seulement quelques tribus nomades, pas forcément les citadins.»
Le Coran s'élève à plusieurs reprises contre l'infanticide des filles. Ainsi, la petite fille est décrite comme un «don» de Dieu au même titre qu'un petit garçon, dans la sourate 42 au verset 49: «À Allah appartient la royauté des cieux et de la terre. Il crée ce qu'Il veut. Il fait don de filles à qui Il veut, et don de garçons à qui Il veut.» Le texte sacré blâme ainsi les parents songeant à commettre un tel acte, dans la sourate 16 aux versets 60-61: «Si l'on annonce à quelqu’un d’entre eux la naissance d’une fille, son visage s’obscurcit, et il devient comme suffoqué par la douleur. Il se cache des siens, à cause de la désastreuse nouvelle. Doit-il la garder et en subir la honte, ou l’ensevelir dans la poussière? Que leurs jugements sont déraisonnables!»
Sur le plan personnel, Muhammad n'a eu que des filles dont une seule Fatima lui a survécu quelques moisRachid Benzine
«Mahomet était un grand pragmatique»
Cette opposition du texte musulman à l'enterrement de filles à peine nées pourrait bien s'enraciner dans un détail biographique de la vie de Mahomet selon Rachid Benzine qui nous explique: «Sur le plan personnel, Muhammad n'a eu que des filles dont une seule Fatima lui a survécu quelques mois. Il avait certainement une sensibilité personnelle sur le sujet. Il a été insulté par les Mecquois comme châtré (abtar en Arabe), c'est-à-dire homme sans fils survivant comme le rappelle la sourate 108, dite de l'abondance.» Raisons biographiques ou non, l'Arabie du Prophète rompt , là aussi, avec celle des idoles.
Le polythéisme, ses valeurs et ses pratiques auraient donc été emportés, détruits totalement par l'islam? Au contraire, celui-ci apparaît davantage comme une rupture dans la continuité par rapport aux cultes qui la précèdent. Elle a dû composer à l'origine avec des traditions bien ancrées dans les mœurs. Haoues Seniguer y voit le génie pratique de Mahomet:
«Mahomet était un grand pragmatique. Pour qu'une doctrine existe, il faut qu'elle se singularise mais aussi qu'elle s'appuie sur des symbole déjà communément admis. Par exemple, La Mecque continuera à être un lieu de pèlerinages mais sera réaménagée ou encore l'islam abolit l'infanticide des filles mais pas la polygamie.»
La survie de croyances populaires
En un sens, la religion musulmane, en dépassant le polythéisme, en aurait sauvé les traits fondamentaux. Car à partir de la fin du VIe siècle, l'Arabie change, connaît un phénomène de sédentarisation sous l'effet duquel la société païenne se sclérose.
«Dans le contexte tribal et nomade, il y avait des solidarités bien établies, liées aux identités collectives. Avec la sédentarisation, vient la puissance d'une oligarchie citadine. Le polythéisme avait un versant économique non négligeable pour les oligarques, autour des pèlerinages et des cérémonies. L'islam vient sauver l'esprit tribal corrompu par les citadins. Paradoxalement, la sédentarisation vient accélérer la popularisation du message islamique», ajoute Haoues Seniguer.
De curieuses créatures, issues des tréfonds de la tradition arabe préislamique, viennent prendre une place inconfortable: les DjinnsEt le paganisme survit également, l'idolâtrie en moins, à travers les croyances populaires recyclées par l'islam. Ainsi, de curieuses créatures, issues tout droit des tréfonds de la tradition arabe préislamique, viennent prendre une place inconfortable entre les Anges, dont la nature est d'adorer Dieu, et les hommes, dont la tâche est la même mais que le libre-arbitre conféré par la bienveillance divine peut égarer: les Djinns. Les Djinns ont été créés à partir du feu et vivent sur Terre bien qu'ils soient généralement invisibles. Là ils peuvent prendre diverses formes et même converser avec les hommes, en adoptant des tournures plus ou moins étranges.
Le triomphe de l'islam
Dans le Coran, la sourate 15 évoque leur création tandis que la sourate 72 leur est intégralement consacrée (dans la traduction de Kazimirski suivie ici, les Djinns sont cependant rendus par «Génies»). Les Djinns ont même jeté un trouble dans les esprits d'occidentaux rêveurs comme Victor Hugo. Cette persistance de récits surnaturels nés avant le règne du Dieu unique forment une des trames du Coran qui s'ingénie cependant à le cacher, comme le remarque Rachid Benzine: «C'est comme si le texte s'ingéniait à masquer cette continuité fondamentale.»
Cette partie de cache-cache littéraire et doctrinale ne doit pas occulter le succès de l'islam qui a réussi à édifier un monothéisme strict sur les terres d'un paganisme original, éclaté et décousu. Dans cette mesure, l'islam a réussi là où le judaïsme et le christianisme pourtant présents et vivaces, car les conversions à ces deux religions sont relativement courantes dans les dernières décennies du polythéisme, avaient échoué. On peut analyser ce triomphe islamique dans la péninsule arabe sous un angle géopolitique, comme Haoues Seniguer nous invite à le faire:
«L'islam a agi comme une religion fédératrice pour les peuples locaux. Il y a des éléments conjoncturels à sa réussite: le monde perse, tenant du zoroastrisme, et l'empire byzantin, chrétien, étaient perçus comme des menaces. Mahomet a apporté du crédit à son message car il a donné des lettres de noblesse à des peuplades arabes en prise avec ces empires colossaux.»
L'islam ne doit sa réussite qu'à ce qui le précède. C'est une véritable ruse de la raisonHaoues Seniguer
Après que les troupes musulmanes de Mahomet ont triomphé des clans polythéistes d'Arabie, les croyants ne tardent pas à partir à la conquête du monde derrière la bannière des Califes. Les empires byzantin et perse, pourtant de si inquiétants voisins, seront d'ailleurs mis en pièces. Cette puissance militaire, cet enthousiasme guerrier démontreraient la fougue d'un peuple désormais sûr de sa foi, et fier de son unique Dieu.
«L'islam pour les Arabes du VIIe siècle, ce ne fut pas adhérer à un texte»
Pour Rachid Benzine, on commet un contresens en souscrivant à cette théorie. C'est au contraire parce que les chefs musulmans décident d'adopter une politique d'expansion territoriale et de razzias d'une ampleur inconnue jusque là, et que celles-ci sont couronnées de succès que l'islam assure son assise populaire. C'est parce que les gains obtenus dans le sentier d'Allah sont les plus importants que la religion musulmane vainc l'ordre païen et dépasse judaïsme ou christianisme:Après que les troupes musulmanes de Mahomet ont triomphé des clans polythéistes d'Arabie, les croyants ne tardent pas à partir à la conquête du monde derrière la bannière des Califes. Les empires byzantin et perse, pourtant de si inquiétants voisins, seront d'ailleurs mis en pièces. Cette puissance militaire, cet enthousiasme guerrier démontreraient la fougue d'un peuple désormais sûr de sa foi, et fier de son unique Dieu.
«Contrairement à ce que proposaient chrétiens et juifs, il ne s'agit plus de convertir mais de faire entrer dans une alliance. L'islam pour les Arabes du VIIe siècle, ce ne fut pas adhérer à un texte. C'est la divinité efficace qui a mobilisé les hommes de l'Arabie tribale et les fruits du butin immense qui résulta des razzias extra arabiques. Ce n'était pas une question d'idéologie.
Leurs chefs mecquois et médinois furent de grands pragmatiques et d'une grande intelligence politique. C'est cette absence de religiosité (telle que nous l'entendons aujourd'hui, ndlr) qui leur a permis d'asseoir leur pouvoir et surtout de le faire durer. L'islam-religion va mettre plus de deux siècles à se construire dans une société complètement différente de celle du Muhammad, c'est alors que naîtront les conflits religieux au sein de l'islam lui-même.»
Un désaveu à l'action des islamistes
C'est en satisfaisant les appétits, trop longtemps frustrés, d'une Arabie tribale et polythéiste et en opérant un retour aux valeurs portées par les païens mais un temps mises à mal que l'islam va prospérer. Et c'est seulement au fil des siècle que l'arrivée tardive d'un dogme plus sophistiqué tendra à enterrer dans les sables le souvenir de peuples arabes antérieurs à l'islam. Haoues Seniguer dresse le même constat. Cette parenté aussi obscure que réelle entre l'islam et les cultes plus lointains porte ainsi selon lui un vigoureux désaveu à l'action des islamistes destructeurs d'idoles de notre époque:
«On pourrait formuler l'hypothèse suivante: l'islam ne doit sa réussite qu'à ce qui le précède. C'est une véritable ruse de la raison. Et c'est un démenti très clair qu'on peut apporter aux intégristes contemporains.»
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