L'Opéra de Lille ose une adaptation de "La Métamorphose" de Kafka


Mardi 8 Mars 2011 - 16:53
AFP


Lille - L'Opéra de Lille a donné lundi soir la première de "La Métamorphose", création mondiale tirée de la nouvelle éponyme de Franz Kafka et pari audacieux du compositeur Michaël Levinas pour donner un visage et une voix au célèbre cancrelat, diversement accueilli par le public.


L'Opéra de Lille ose une adaptation de "La Métamorphose" de Kafka
L'univers confiné de Kafka, notamment cette chambre aux portes closes dans laquelle le représentant de commerce Gregor Samsa se réveille un matin transformé en insecte, ne se prête guère a priori à la forme de l'opéra.

Le pari "de représenter l'irreprésentable" par une mise en scène suggestive et dépouillée accompagnée d'une musique hybride acoustique "live" et électronique n'a fonctionné qu'auprès d'une partie du public lillois... les inconditionnels de Kafka ?

Il est vrai que la représentation place le public dans un état de malaise. Mais on peut y voir une réussite dans l'adaptation de la nouvelle de l'écrivain tchèque de langue allemande, qui refusait toute représentation de son insecte.

La métamorphose enferme Gregor Samsa dans la solitude. Tout le monde se détourne de cet individu transformé en bête répugnante, ayant perdu toute part d'humanité... y compris ses parents et sa soeur. Kafka tente une description de sa part obscure, celle dont il souhaitait se débarrasser, mais aussi celle qu'il voyait en chaque individu.

Le contre-ténor Fabrice di Falco, qui incarne Samsa, se tient debout sur un piédestal comme une silhouette humaine dépouillée, vêtu d'une simple combinaison proche du corps. Il est quasi immobile, tout proche de cette créature aux six pattes et aux deux longues antennes qui domine tout et tout le monde par son volume et les ombres qu'elle projette.

Quelques jeux de scène, mais surtout des jeux de lumières comme des variations de clair-obscur, ainsi que des effets spéciaux sonores, donnent du mouvement à cet unique tableau. Les voix et les textes s'entremêlent comme pour souligner la solitude des êtres, reclus dans un petit appartement mais à qui personne ne semble répondre.

La mort de l'insecte achève un récit qui s'étire comme une longue plainte.

Pour son troisième ouvrage lyrique, né d'une commande de l'Opéra de Lille et du ministère de la Culture, Michaël Levinas avait d'abord envisagé une partition baroque avant de faire le choix de la modernité.

Pour autant, il réfute le label "musique contemporaine" et revendique même des réminiscences ravéliennes ("L'enfant et les sortilèges") qui témoignent, selon ce pianiste émérite, de son attachement à l'harmonie.

La mise en scène est assurée par Stanislas Nordey, qui avait déjà commis avec Levinas "Les Nègres", d'après Jean Genet. Le livret est signé du dramaturge Valère Novarina, avec l'écrivain et poète Emmanuel Moses et Benoit Meudic de l'Ircam (Institut de recherche et coordination acoustique/musique).


           

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