La France avance nettement ses pions économiques et diplomatiques dans le Golfe


Mardi 5 Mai 2015 - 15:54
AFP


La France a spectaculairement resserré ses liens avec les monarchies du Golfe lors d'une visite de son président, François Hollande, marquée par la vente du Rafale au Qatar et la perspective de "dizaines de milliards d'euros" de contrats avec l'Arabie saoudite.


La France avance nettement ses pions économiques et diplomatiques dans le Golfe
Le chef de l'Etat avait déjà salué lundi le "good choice" ("bon choix") du Qatar pour l'achat de 24 avions de combat Rafale, un contrat estimé à 6,3 milliards d'euros.

Et le lendemain, en marge de sa visite à Ryad, le chef de la diplomatie française, Laurent Fabius, a annoncé que l'Arabie saoudite et la France discutaient de 20 projets économiques "représentant plusieurs dizaines de milliards d'euros" s'ils étaient "menés intégralement à bien".

Ces projets, dont certains pourraient faire l'objet d'une conclusion "rapide", concernent les investissements croisés, le secteur de l'armement où "un certain nombre de projets vont être finalisés avec des conséquences dans les mois qui viennent" ou encore l'énergie, "surtout dans le domaine solaire, avec une perspective sur le nucléaire".

Laurent Fabius a également énuméré l'aéronautique civile, les infrastructures de transport, citant les grandes villes de La Mecque et Jeddah (ouest de l'Arabie saoudite), ainsi que la santé.

"Ce sont des prospects extrêmement importants qui signifient que le partenariat passe à une nouvelle vitesse, avec des conséquences très concrètes", s'est-il félicité, parlant d'une volonté de la nouvelle direction saoudienne "d'aller vite".

Au chapitre diplomatique, François Hollande était "l'hôte d'honneur" mardi après-midi d'un sommet du Conseil de coopération du Golfe (CCG), alors que la région est secouée par une série de crises, à commencer par la guerre au Yémen voisin.

Cette invitation est sans précédent pour un chef d'Etat occidental depuis la création en 1981 du CCG qui réunit l'Arabie saoudite, Bahreïn, les Emirats arabes unis, le Koweït, Oman et le Qatar.

Cinq des six Etats se sont alliés fin mars à quatre autres nations arabes pour faire reculer des rebelles chiites au Yémen et contrer ce qu'ils perçoivent comme une tentative de mainmise de l'Iran sur ce pays pauvre de la péninsule arabique.

Le programme nucléaire de Téhéran et l'accord-cadre conclu début avril sous l'impulsion de Washington étaient également à l'ordre du jour du sommet, tout comme la lutte contre le groupe jihadiste Etat islamique en Irak et en Syrie.

"Nous sommes maintenant un partenaire majeur de la région", s'est félicité un haut responsable français, assurant que la France venait d'abord parler politique aux Etats, avant de parler affaires.

Tout au long de sa visite, le président français lui-même n'a cessé de souligner la "fiabilité" et la "constance" de la relation de son pays avec les pays du Golfe.

- 'Pas de religion contre une autre' -

Paris profite manifestement du désamour des pétromonarchies sunnites à l'égard de Washington. Elles se sont senties trahies à au moins deux reprises quand, en 2011, les Américains ont soudainement lâché l'ex-président égyptien Hosni Moubarak puis quand ils ont renoncé in extremis à intervenir contre le régime syrien de Bachar Al-Assad en 2013.

Elles s'inquiètent aussi d'un éventuel rapprochement entre l'Iran chiite et les Etats-Unis alors qu'un accord final est âprement négocié avec Téhéran sur son programme nucléaire, soupçonné de dissimuler des fins militaires.

Dans une déclaration conjointe lundi soir après une rencontre entre M. Hollande et le roi Salmane d'Arabie saoudite, les deux parties ont de nouveau manifesté cette fermeté, insistant sur "la nécessité de parvenir avant le 30 juin, à un accord robuste, durable, vérifiable, incontestable et contraignant pour l'Iran", qui doit "garantir" que ce pays n'ait pas la bombe atomique.

Pour autant, la France n'a pas "fait le choix d'une religion contre une autre", des sunnites contre les chiites, a assuré Laurent Fabius. "Ce n'est pas du tout notre critère", a-t-il martelé.

Sur le Yémen, le président français a donné un gage à son hôte saoudien en confirmant, dans le texte commun, "l'importance de la mise en oeuvre de la résolution 2216 du Conseil de sécurité" de l'ONU qui somme les rebelles chiites de se retirer de toutes les zones qu'ils ont conquises depuis le début de leur offensive en juillet 2014.

Selon une source proche du dossier, outre l'appui politique à la coalition sous commandement saoudien, les Français ont fourni des informations de nature militaire, sous la forme d'images satellitaires du Yémen.

En se rendant au sommet du CCG à Ryad, le président Hollande a quelque peu brûlé la politesse à la rencontre prévue à la mi-mai aux Etats-Unis des dirigeants du CCG avec le président Barack Obama, qui tentera de les rassurer sur les négociations nucléaires avec l'Iran.


           

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