La révolution Facebook au service des Israéliens et des Palestiniens


Mardi 28 Juin 2011 - 11:06
CGNews - Rami Mehdawi


Ramallah - Il y a encore quelques mois, au poste de contrôle de Qalandia, près de Ramallah, j'attendais une journaliste de la première chaîne de la télévision israélienne. Elle devait m'interviewer au sujet de la révolution Facebook. L'attente fut longue. Elle d'un côté, moi de l'autre. Au bout du compte, l'armée ne lui a pas délivré son laissez-passer, et nous avons dû annuler l'interview.


Rami Mehdawi
Rami Mehdawi
Ce fut pour moi l'occasion de réfléchir sur l'occupation. Celle-ci ne se contente pas de séparer physiquement Palestiniens et Israéliens. Et le mur qu'elle a érigé est aussi intellectuel, informationnel et émotionnel.

J'ai ainsi compris que les restrictions imposées aux journalistes désireux de pénétrer dans les territoires de l'Autorité nationale palestinienne reviennent à priver effectivement les médias israéliens de récits sur l' "Autre” - le Palestinien. Et même si quelques journalistes israéliens se sont donné pour mission de venir s'informer sur les Palestiniens et leur société, ils sont encore bien rares.

Il est très important, je crois, de réfléchir aux moyens que l'on a pour contourner ces restrictions et cet “autre mur” qui empêche nos voix de parvenir jusqu'aux oreilles des Israéliens.

Quand on me demande : “Les Israéliens ne savent donc pas ce qui se passe ici?”, je réponds qu'ils sont isolés, physiquement par le mur et par les postes de contrôle, de ce qui se passe dans le monde palestinien réel, et psychologiquement par les médias.

Mais je suis persuadé que nous sommes capables de briser cette barrière grâce aux “médias du peuple”, arme suprême du pacifisme et de la non-violence.

Qui aurait pu s'imaginer, voici encore quelques mois, que la mort d'un jeune Tunisien, diffusée sur Facebook, allait donner lieu à des manifestations massives ? N'est-ce pas un succès de taille, démontrant que la jeunesse est parfaitement capable d'utiliser avec brio les outils modernes ? N'est-ce pas la preuve évidente qu'Internet n'est pas qu’un simple monde virtuel? Ses héros le prennent en main pour amener des changements réels.

La manière dont on utilise les réseaux sociaux en Tunisie, en Egypte et en Syrie n'est pas la même que chez nous. Dans ces pays Internet est utilisé pour galvaniser et coordonner des jeunes qui ont un programme clair en vue du changement social et politique. Les Palestiniens que nous sommes vivons sous l’occupation, enfermés derrière des barrières qui nous empêchent de connaître d'autres sociétés. Nous utilisons les outils de la toile pour nous relier au reste du monde. Ils nous procurent le moyen de voir ce que les gens appartenant à d'autres sociétés pensent et ressentent, et l'occasion de nous former nos propres jugements et opinions.

Hélas, ils sont encore rares aujourd’hui les sites qui relient les jeunes Palestiniens et les jeunes Israéliens, si tant est qu’ils existent. Il appartient aux jeunes Palestiniens, en particulier aux étudiants et aux universitaires, de prendre l'initiative d'utiliser Internet comme un moyen de contourner les médias ordinaires pour parvenir jusqu’à la société israélienne réelle.

Nous ne dépendons plus du prêt à porter médiatique. Nous sommes désormais des participants critiques, qui analysons et forgeons nos propres jugements, qui prenons part au débat public et contribuons à le façonner.

L'émergence de nouveaux médias populaires est un pas important qui nous rapprochera de ces passerelles que nous voulons lancer. Tant qu'il y aura, de l'autre côté, des gens pour nous écouter, nous avons une chance de briser le monopole qu'exerce l’establishment et ses médias sur les connaissances, les pensées et les opinions des peuples de part et d’autre du mur.

De toutes les nouveautés spectaculaires apparues ces derniers mois, le rôle des sites et des réseaux pour rapprocher les gens est sans doute ce qui donne le plus l’espoir qu’une entente entre Israéliens et Palestiniens est possible.


           

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