La vente du trésor de la Bank of Ireland suscite polémique et intérêt


Vendredi 26 Novembre 2010 - 15:02
AFP


Dublin - "Du vol", "un suicide culturel", "une honte": la mise aux enchères de la collection d'art de la Bank of Ireland, icône déchue du "tigre celtique" renflouée par les contribuables, suscite la polémique, mais également l'intérêt des investisseurs, venus à la chasse aux bonnes affaires.


La vente du trésor de la Bank of Ireland suscite polémique et intérêt
50.000 euros, 51, 52, 55, 60... : les chiffres roulent dans la bouche du commissaire priseur, puis, au bout de quelques minutes, le marteau tombe d'un coup sec. "66.000 euros", c'est le prix auquel s'envole une des oeuvres d'un peintre national, "Clouds at Sunset", de Paul Henry.

En quelques heures, mercredi soir, 144 des 145 peintures et sculptures présentées trouveront preneurs, pour un total relativement modeste d'un million et demi d'euros. La vente est la première d'une série visant à céder les deux mille oeuvres environ qu'a accumulées au fil des siècles la "Bank of Ireland".

Dans la salle de bal lambrissée du prestigieux hôtel Shelbourne, dans le centre de Dublin, est ainsi dispersée l'une des plus prestigieuses collections d'art de toute l'Irlande.

"C'est une honte", lance Breda O'Byrne, 67 ans. "La collection aurait dû être gardée en tant que garantie de tout l'argent que les contribuables ont dû donner", enrage la retraitée, venue manifester devant l'hôtel avec une dizaine d'autres mécontents dénonçant un "suicide culturel".

Fondée en 1783, Bank of Ireland est la plus ancienne banque du pays. L'établissement faisait jusqu'à peu la fierté des Irlandais, à l'image de son imposant siège en plein centre de Dublin, un monument qui est le passage obligé de tout touriste. A la faveur de la croissance exceptionnelle des années 1990, la banque était devenue un fleuron du "tigre celtique".

Elle n'est plus aujourd'hui qu'une montagne de dettes. Après l'éclatement de la bulle immobilière, en 2008, elle a fait partie des cinq banques qui n'ont dû leur salut qu'à une injection de 46 milliards d'euros d'argent public. Mais cela n'a pas suffi et Dublin a été contraint, dans un geste humiliant, de faire appel à l'aide de l'Union européenne et du Fonds monétaire international pour mettre en place un vaste plan de sauvetage.

Bank of Ireland assure que la vente de sa collection n'a rien à voir avec sa situation financière : "nous avons décidé de réinvestir dans l'art", explique Anne Mathews, son porte-parole, en promettant que "tous les bénéfices iront à des organisations d'artistes".

"Et vous les croyez ?", interroge Gemma Mastroianni Carroll, également venue manifester. "Les banquiers nous ont volés et ils nous volent encore", pense cette "ancienne banquière de Wall Street".

"Les banques nous appartiennent et j'aimerais que les tableaux aillent dans les musées publics", renchérit Bruce Ballagh, 35 ans, fils d'un peintre qui a refusé qu'une de ses toiles soit incluse dans les enchères.

Mais, dans la salle des ventes, on ne s'embarrasse guère de ces considérations. "Je cherche à faire une affaire", explique un quadragénaire qui a difficilement trouvé sa place parmi les quelque 500 participants se pressant devant le commissaire priseur. "Les prix de départ étaient très bas et je pense que beaucoup de personnes sont ici pour essayer de faire une affaire", ajoute-t-il.

La présentation des oeuvres a attiré "4.000 visiteurs", selon le directeur général d'Adam's, James O'Halloran. "C'est un franc succès. On a bien vendu, souvent nettement au-dessus du prix de départ".

Trop bien vendu, estime une quinquagénaire, rendant son numéro d'enchérisseur à la réception, après seulement une demi-heure de présence. "Je suis une amateur. Je pensais que je viendrais tenter ma chance, mais c'est trop cher. Les gens ont encore de l'argent en Irlande".


           

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