Le Printemps arabe et la cause palestinienne


Jeudi 22 Mars 2012 - 12:10
CGNews - Dawoud Abu Lebdeh


Jérusalem – La vague de révoltes, qui a provoqué la chute successive des dirigeants tunisien, égyptien, libyen et yéménite, a commencé à déferler il y a plus d’un an. En Syrie, des dizaines de personnes continuent à mourir tous les jours, dans l’espoir d’atteindre le même objectif: vivre libres, dans la dignité, sous un régime démocratique. Les Palestiniens, pour leur part, sont nombreux à s’interroger sur l’impact des bouleversements survenus dans le monde arabe sur leur propre combat pour l’indépendance.


Le Printemps arabe et la cause palestinienne
Au lendemain de la guerre des Six Jours en 1967, qui marqua la dissolution de l’identité panarabe, de nombreux Palestiniens comprirent qu’ils étaient seuls dans leur lutte. Un sondage effectué récemment par le Centre palestinien pour l’opinion publique (PCPO) montre que depuis cette époque, les Palestiniens n’ont pas changé d’avis sur la façon dont le monde arabe, au sens large, perçoit leur cause. Par ailleurs, la majorité des sondés (65 pour cent) pense que le Printemps arabe aura un impact négatif sur la cause palestinienne. Le président du PCPO, Nabil Kukali, explique qu’effectivement pour la plupart des Palestiniens, le Printemps arabe « sonne le glas de la cause palestinienne» ; la préoccupation principale des nouveaux gouvernements et des citoyens des pays concernés étant de régler les problèmes internes et non l’avenir des Palestiniens.

Il est vrai que la situation des pays qui viennent de vivre une révolution est encore très chaotique. Il est tout à fait normal que leurs nouveaux dirigeants essaient d’abord de remettre de l’ordre chez eux, en donnant la priorité aux affaires intérieures, notamment à l’économie et à la sécurité.

Cependant du point de vue palestinien, cela a été ressenti comme une indifférence totale de la rue arabe face à la demande de l’autorité palestinienne d’une reconnaissance d’un Etat palestinien au sein de l’ONU. En effet, si la rue arabe s’était exprimée, si elle avait lancé un appel au reste du monde, pour soutenir cette reconnaissance, cela aurait peut-être pu influencer des Etats membres de poids, comme le Royaume-Uni et les Etats-Unis, et les rendre plus réceptifs à l’admission de la Palestine en tant que membre – d’autant plus que ces deux pays occidentaux sont liés au monde arabe par des intérêts primordiaux.

Cela prendra un certain temps avant que la poussière de la révolution ne retombe et que les pays arabes en transition arrivent au point où ils peuvent se permettre de restructurer leur politique étrangère et leurs relations diplomatiques. Il suffit d’observer l’Egypte pour comprendre que son statut dans la région a profondément changé depuis la révolution. L’Egypte était auparavant sans doute considérée comme la plus grande puissance arabe au Moyen-Orient, jouant un rôle important de médiateur entre le monde arabe et l’Occident. C’est d’ailleurs pour cela, que Barack Obama avait choisi d’y prononcer en juin 2009, son premier discours, en tant que président des Etats-Unis, à l’attention du monde musulman.

Mais aujourd’hui du fait que ses affaires intérieures sont en fluctuation, le rôle joué par l’Egypte sur la scène politique internationale est devenue marginale. Quand des dizaines de personnes meurent en assistant à un match de football, la priorité n’est pas la politique extérieure.

Les Palestiniens n’ont pas le temps d’attendre que la rue arabe s’intéresse davantage à leurs problèmes ; ils doivent aller de l’avant et construire les fondements d’un futur Etat. Ils ne doivent compter que sur eux-mêmes, cela est primordial pour l’avenir d’un Etat palestinien indépendant. Il suffit de se rappeler toutes les étapes accomplies par les Sionistes pour fonder l’Etat d’Israël. Ils n’ont en effet pas attendu que le monde se réveille. Ils se sont attelés à construire l’infrastructure de leur Etat, durant des dizaines d’années précédant sa création en 1948. Le monde a apporté son soutien au nouvel Etat, seulement une fois que tous les éléments étaient en place.

La nouvelle génération palestinienne a le potentiel pour en faire de même. La jeunesse qui a déclenché le Printemps arabe s’est peut-être inspirée de la lutte palestinienne, de la première intifada et du mouvement non violent de ces dernières années. Je suis convaincu que les jeunes Palestiniens ont la capacité de déclencher leur propre Printemps.

Bien entendu, il est évident qu’un soutien éventuel du monde arabe, dans un proche avenir, renforcerait la position palestinienne, en créant des conditions plus favorables pour les négociations avec le gouvernement israélien. Des pressions diplomatiques notamment de la part des Etats du Golf, de la Jordanie et de l’Egypte qui sont liés par des traités économiques et militaires aux grandes puissances de ce monde – pourraient aussi changer les règles du jeu et faire accélérer les choses. D’ailleurs, l’aide des pays arabes serait plus efficace, si ceux-ci s’harmonisaient davantage dans leur approche de la cause palestinienne.

Cependant, même sans l’aide du monde arabe, les Palestiniens peuvent mettre tous leurs espoirs dans l’énorme potentiel de leur jeunesse, pour qu’un changement se produise sur le terrain et pour gagner la liberté de leur peuple.


           

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