Les diplômés chômeurs marocains brandissent la menace du suicide


Jeudi 2 Avril 2009 - 12:28
magharebia.com/Sarah Touahri


Ces dernières semaines, des dizaines de jeunes diplômés au chômage ont lancé une série d'actions de protestation devant le parlement et le siège de plusieurs ministères à Rabat, pour exiger "leur droit à la fonction publique". Certains ont même menacé de se suicider.


Les diplômés chômeurs marocains brandissent la menace du suicide
Ces manifestations, qui durent déjà depuis plusieurs mois, se sont intensifiées au cours des dernières semaines, lorsque des manifestants de certains groupes ont pu bénéficier d'emplois dans la fonction publique.
Les jeunes diplômés au chômage envisagent de continuer à mettre la pression sur le gouvernement, même s'ils sont souvent brutalement dispersés par la police à l'aide de matraques.
Soumia Bahmida, diplômée en 1999, a expliqué à Magharebia qu'une décision avait été prise d'adopter une stratégie coordonnée de suicide, mais que la date n'avait pas encore été fixée.
"En juillet de l’année dernière, nous avons fait la même chose. Mais on nous a sauvés en procédant à un lavage d’estomac. Par la suite, il n’y a eu aucune réaction de la part du gouvernement, ce qui ne nous laisse pas le choix. Le dialogue avec le conseiller du Premier ministre ne mène à rien", a-t-elle déclaré.
Le professeur de science politique Mehdi Barakat explique que ces jeunes sont victimes de la faillite d'un système éducatif qui ne leur permet pas de trouver un emploi dans le secteur privé.
"Ces mouvements de protestation, qui datent de plusieurs années, ont permis l’embauche dans la fonction publique de milliers de diplômés. Ce qui explique l’acharnement de ceux qui n’ont pas été intégrés."
Selon Salima Najimi, titulaire d'un diplôme en littérature française, la première grande manifestation cette année a eu lieu en février, lorsque des centaines de diplômés chômeurs ont fait pacifiquement irruption au salon du livre de Casablanca. La deuxième a été organisée le 3 mars, lorsque les manifestants ont bloqué le trafic ferroviaire en provenance de Casablanca en prenant d'assaut les voies de la gare de Rabat.
"Depuis, les actions de protestation n'ont jamais cessé, et nous envisageons même d'autres moyens de pression", a-t-elle déclaré.
"Nous poursuivrons notre bataille sur tous les fronts pour que les responsables reconnaissent notre droit au travail. Nous n’accepterons plus de vivre aux dépens de nos familles", explique Hassan B., docteur en physique-chimie.
Du côté du gouvernement, on ne cesse de souligner que des efforts sans relâche sont consentis pour régler la question des diplômés chômeurs. Une commission est en train d’étudier les dossiers des diplômés non encore intégrés dans la fonction publique. Plus de 750 personnes ont été embauchées en 2008.
Ces jeunes se regroupent en fonction des diplômes qu'ils ont obtenus.
"Tous les jeunes doivent avoir droit comme les autres à un emploi dans l’administration", affirme Najimi.
En février, le Premier ministre Abbas El Fassi avait envoyé une circulaire qui demandait aux ministères de réserver dix pour cent de leurs postes à des diplômés chômeurs. Le ministère de l'Education devait lancer les opérations en embauchant 280 personnes cette année.
Selon le ministère de l'Emploi, dix pour cent des emplois ont été réservés pour le recrutement de 1 134 jeunes disposant de diplômes de l'enseignement supérieur en 2009.
Lors de la réunion du conseil d’administration de l’Agence nationale de la promotion de l’emploi et des compétences en février dernier, M. El Fassi avait souligné que le gouvernement espérait amener les jeunes à changer leurs attitudes envers les mécanismes du marché de l'emploi, à travers la promotion des opportunités d'intégration dans le secteur privé et l'encouragement à la création d'entreprises par les jeunes, notamment les diplômés.
Le ministre de l'Emploi Jamal Aghmani a expliqué à Magharebia que ses services s'étaient fixé pour objectif d'encourager la formation professionnelle pour répondre aux besoins du marché du travail.
Il a ajouté que les familles marocaines sont trop nostalgiques de l’époque où la fonction publique absorbait 120 000 à 130 000 emplois par an.
"Mais il faut savoir que c'est une époque révolue car l’Etat n’a pas ni les mêmes moyens ni la même stratégie que par le passé. L’avenir des jeunes diplômés est dans le privé."


           

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