Les tribulations du crâne de René Descartes


Mercredi 18 Mars 2009 - 09:38
AFP/Annick BENOIST


Le crâne du philosophe René Descartes, trésor des collections anthropologiques du Musée de l'Homme, a connu des tribulations qui auraient fait se retourner dans sa tombe le père du "Discours de la Méthode".
Cette "tête bien faite", comme aurait dit Montaigne à propos de l'un des plus grands esprits du XVIIe siècle, continue aujourd'hui encore à susciter la convoitise.


Les tribulations du crâne de René Descartes
C'est précisément au moment de sa mort, le 11 février 1650 (il était né en 1596), que débute "la plus invraisemblable des sagas posthumes", comme la raconte Philippe Mennecier, chargé de la conservation des collections anthropologiques au musée.
"Invité de la Reine Christine de Suède, pour l'initier à sa philosophie, René Descartes, peu habitué aux rigueurs du climat et du froid glacial qui règne au palais royal, meurt d'une pneumonie peu après son arrivée".
"Il est alors enterré au cimetière de Stockholm, avec tous les honneurs dus à son génie. Enfin... presque".
Des admirateurs peu scrupuleux ont soudoyé les fossoyeurs pour qu'on les laisse emporter la tête du philosophe, physicien et mathématicien. Profanation qui n'est découverte qu'en 1667, lorsque les restes de Descartes sont rapatriés en France, pour être inhumés à l'église Sainte Geneviève à Paris.
Plus d'un siècle plus tard, échappant aux ravages de la Révolution de 1789, les ossements sont transférés au couvent des Bernardins, puis ré-inhumés dans une chapelle abbatiale de l'église Saint Germain-des-Prés.
"Mais, note Philippe Mennecier, il y a probablement une erreur d'attribution dans ces ossements".
Entretemps, le "vrai" crâne de Descartes continue de circuler en Suède. On ne lui connaît pas moins d'une demi-douzaine de collectionneurs. Jusqu'à ce qu'une vente aux enchères à Stockholm mette un terme à son errance, à l'orée du XIXe siècle.
Le chimiste suédois Jöns Jacob Berzélius, membre de l'Académie des Sciences à l'Institut de France, parvient alors à racheter le crâne, gravé du nom de ses propriétaires successifs et d'un poème en latin sur le front.
Berzélius fait aussitôt parvenir la précieuse relique à Georges Cuvier, biologiste français, promoteur de l'anatomie comparée et de la paléontologie, directeur du Muséum.
"Ce n'est pas un hasard, relève Philippe Mennecier. C'est au Muséum que se sont constituées les disciplines scientifiques d'après les idées de Descartes fondant le rationalisme, la séparation entre l'âme et le corps, la possibilité de vérifier par les faits et non par les croyances".
Récemment, le Premier ministre François Fillon, avait émis le souhait - avant de se rétracter - que le crâne de Descartes rejoigne le Prytanée militaire de la Flèche (Sarthe), où le philosophe avait travaillé pendant quelques années.
"Tout le monde le convoite, soupire-t-on au Musée de l'Homme. Bientôt, ce sera sa ville natale (en Touraine). Mais, si le crâne devait un jour quitter le Muséum, ce que nous ne voulons pas, la priorité n'en reviendrait-elle pas au Panthéon, si l'on se conforme à un décret de la Convention signé en 1792 ?"


           

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