Matisse et les "abstraits" : le musée Matisse du Cateau démontre les rapports


Samedi 14 Mars 2009 - 11:16
AFP/Bertrand Bollenbach


A sa mort en 1954, Matisse était considéré comme un peu "dépassé" par l'avant-garde française mais "essentiel" pour les "abstraits" américains : cette parenté surprenante apparaît dans une exposition au musée Matisse du Cateau-Cambrésis (Nord).


Intitulée "Ils ont regardé Matisse, une réception abstraite États-Unis/Europe 1948-1968", elle ouvre dimanche jusqu'au 14 juin.
Outre les Matisse de son fonds propre, ce musée départemental a su faire venir de prestigieux musées (centre Pompidou, Metropolitan, National Gallery de Washington) ou collections particulières quelques autres œuvres de l'enfant du pays et celles de 15 abstraits américains (Pollock, Rothko, Ellsworth Kelly, Morris Louis..) mais aussi français (Claude Viallat, François Rouan, Buren..) qui ont souvent reconnu plus tard son apport.
Comme un clin d'œil, l'exposition s'ouvre par un tableau de Matisse "Porte-fenêtre à Collioure" de 1914, qui a tout à fait l'allure d'un tableau abstrait.
C'est avec les expressionnistes abstraits Jackson Pollock, Mark Rothko et Barnett Newman que l'apport de Matisse pour le travail direct de la couleur sans intervention du dessin est le plus évident.
Dans une salle, les trois tableaux "Harmonie", ocre, bleue, grise de Matisse sur la danse. A côté, comme un prolongement évident, le "Hors de la toile, numéro 7", une œuvre monumentale de Pollock où le découpage d'une partie de la toile révèle le support d'aggloméré en suggérant des mouvements de danse.
Pour Rothko - qui a toujours proclamé sa "dette" envers Matisse - la similitude est plutôt à rechercher dans la construction de l'espace.
Selon le commissaire scientifique de l'exposition Éric de Chassey, certains comme Barnett Newman n'ont jamais fait référence à Matisse mais ont "pu s'inspirer de ses avancées alors qu'en retour leur travail a permis une plus grande compréhension des tableaux les moins figuratifs du maître français".
Du côté français, les "nouveaux réalistes" Raymond Hains et Jacques Villeglé se sont réappropriés les gouaches découpées de Matisse dans leur film inachevé "Pénélope" avec losanges et triangles animés.
Le Français d'origine hongroise Simon Hantaï et ses pliages de "Mariales", revient à Matisse par le biais de ses références à Pollock. Ellsworth Kelly retient le pouvoir de fragmenter un ensemble, développé par Matisse dans la version V de la sculpture "Jeannette".
La palette de tons purs avec une structure diagonale encadrant une scène centrale d'"Omega IV" de Morris Louis fait écho aux paysage de Collioure de Matisse. La référence de Claude Viallat à Matisse va jusqu'à la reprise d'un même titre "La vague", qui renvoie aux papiers découpés du maître.
"Matisse a déshinibé beaucoup d'artistes en utilisant les matériaux d'une façon totalement libre", souligne Émilie Ovaere, conservatrice adjointe du musée.
Le rapport avec Daniel Buren - qui affiche une détestation de certains tableaux de Matisse - est moins évident, mais Mme Ovaere retient "l'abolition de la distinction entre couleur et dessin et le goût du travail dans l'espace réel".
Le musée poursuit parallèlement la présentation de ses collections permanentes en y intégrant des oeuvres de Philippe Richard dont les motifs décoratifs investissent malicieusement les espaces libres des salles d'accueil et d'exposition.
--------------------------------------
(ouvert tous les jours sauf mardi de 10 h 00 à 18h 00. Renseignements sur muséematisse@cg59.fr


           

Nouveau commentaire :

Actus | Economie | Cultures | Médias | Magazine | Divertissement