Obama tend la main aux musulmans, plus ou moins séduits


Vendredi 5 Juin 2009 - 10:41
Reuters


Barack Obama a lancé du Caire son discours très attendu en faveur d'un "nouveau départ" entre l'Amérique et le monde musulman, lequel a été plus ou moins convaincu par ses propos empreints de bonne volonté mais assez généraux et sans grande surprise.


Barack Obama
Barack Obama
L'objectif affiché du nouveau président américain, qui avait peaufiné son intervention la veille à Ryad avec le roi Abdallah d'Arabie, était de resserrer les liens avec une communauté de plus d'un milliard d'individus que l'aventure irakienne, l'enlisement afghan et l'antagonisme avec l'Iran hérités de la présidence de George Bush ont braqués contre son pays.

"Je suis venu ici pour rechercher un nouveau départ entre les Etats-Unis et les musulmans du monde entier, fondé sur l'intérêt commun et le respect mutuel. L'Amérique et l'islam ne doivent pas s'exclure. Le cycle du soupçon et de la discorde doit prendre fin", a-t-il dit dans son allocution d'environ une heure à l'université du Caire.

Pour brouiller visiblement ce message très attendu de bonne volonté, la mouvance djihadiste sunnite d'Al Qaïda a diffusé simultanément sur internet un message d'Oussama ben Laden appelant les musulmans à une longue croisade contre "les infidèles du monde entier et leurs agents".

"Si un musulman devient l'allié des infidèles et soutient ceux-ci contre les musulmans, il perd sa foi et devient un apostat infidèle", y affirme à propos du Pakistan Ben Laden, dont le bras droit égyptien Aymane al Zaouahri avait qualifié l'avant-veille Obama de "criminel.

"UN PAS IMPORTANT"

Dans le camp musulman adverse chiite, l'ayatollah Ali Khamenei avait également anticipé dans la matinée les gestes d'ouverture du nouveau chef de la Maison blanche en rappelant que les Etats-Unis font l'objet d'une "haine profonde" au Moyen-Orient, que quelques "slogans" ne sauraient effacer. "Il faut des actes", a-t-il ajouté.

Barack Obama n'a pas annoncé de nouvelle initiative pour régler le conflit entre les Palestiniens et Israël, que le guide de la révolution islamique a qualifié de "tumeur cancéreuse au coeur" du monde musulman et que le président iranien sortant Mahmoud Ahmadinejad avait qualifié la veille de "plus grand régime criminel de l'histoire de l'humanité".

Evoquant la situation en Cisjordanie, Barack Obama a réaffirmé avec vigueur son opposition aux colonies juives et son engagement en faveur de la création d'un Etat palestinien aux côtés d'Israël, tout en demandant à tout les Palestiniens, donc au Hamas, de renoncer à la violence et de reconnaître le droit à l'existence de l'Etat juif.

La solution à deux Etats, que le nouveau Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, répugne à reprendre à son compte, tout comme il refuse de geler la colonisation, "est dans l'intérêt d'Israël, dans l'intérêt de la Palestine, dans l'intérêt de l'Amérique, dans l'intérêt du monde entier", a dit Barack Obama

"C'est pourquoi je compte poursuivre personnellement cet objectif, avec toute la patience que cette tâche exige", un engagement qui a été salué par le porte-parole du président palestinien Mahmoud Abbas, Nabil Abou Rdaïnah. "Le discours du président Obama est un bon début et un pas important vers une nouvelle politique américaine."

"LAISSER L'IRAK AUX IRAKIENS"

Israël a publié un communiqué disant partager "l'espoir d'Obama de voir les efforts américains ouvrir une ère nouvelle qui mette fin au conflit et conduise à une reconnaissance arabe d'Israël en tant que nation du peuple juif vivant en paix au Proche-Orient", dit un communiqué officiel.

"Israël est déterminé à faire la paix et fera tout pour élargir le cercle de la paix tout en préservant ses intérêts nationaux, au premier rang desquels figure la sécurité", a toutefois ajouté le gouvernement Netanyahu, dominé par la droite et en froid avec la nouvelle administration américaine.

Pour ce qui est de l'Irak et de l'Afghanistan, a dit le chef de la Maison blanche, l'objectif n'est pas d'y maintenir indéfiniment des troupes américaines. Il a notamment promis de "laisser l'Irak aux Irakiens".

"Le gouvernement irakien est satisfait que le président s'engage sans équivoque à respecter ses engagements envers l'Irak", a dit son porte-parole, Ali Al Dabbagh, parlant de "discours historique et important (qui) illustre l'approche positive de la nouvelle administration et marque un nouveau départ".

Sur l'Iran, le président américain a estimé qu'une course aux armements nucléaires au Proche-Orient entraînerait la région sur "une voie extrêmement dangereuse", tout en reconnaissant le droit de Téhéran à se doter du nucléaire civil "s'il assume ses responsabilités dans le cadre du traité de non-prolifération nucléaire".

"TRES INSPIRE"

Sur la question des droits de l'homme et de la démocratie dans le monde arabe, que de nombreux militants arabes voulaient voir abordée dans ce discours prononcé dans un pays arabe où la question est particulièrement sensible, Barack Obama ne s'est guère étendu.

"Il aurait dû parler haut et fort sur la démocratie et les principes universels des droits de l'homme", a déploré à Damas l'avocat syrien Mohannad al Hassani. Au Liban, un des chefs du Hezbollah, Hassan Fadlallah, a estimé au contraire que les musulmans n'avaient "pas besoin de leçon de morale et de sermon politique.

"Le monde musulman a besoin d'un changement fondamental de la politique américaine, à commencer par l'arrêt complet du soutien à l'agression israélienne dans la région (...) le retrait américain d'Irak et d'Afghanistan et la fin de son ingérence dans les affaires des pays musulmans", a dit le cheikh Fadlallah."

Mais l'analyste égyptien Khalil al Anani a conclu : "Ce discours était très inspiré et beaucoup de gens l'auront bien accueilli, car Obama s'est efforcé d'être neutre, honnête et objectif".


           

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