"Peurs sur la ville": la guerre, ça n'arrive pas qu'aux autres


Lundi 31 Janvier 2011 - 12:39
AFP


Paris - La carcasse d'un blindé au pied de l'Arc de Triomphe, la Tour Montparnasse bombardée, le Pont Alexandre III pris d'assaut par des chars: Patrick Chauvel présente à la Monnaie de Paris une série de photomontages choc pour appeler à la "vigilance".


"Peurs sur la ville": la guerre, ça n'arrive pas qu'aux autres
"La paix n'est pas un acquis. C'est un travail constant", explique à l'AFP le photographe de guerre, 60 ans, qui a couvert les conflits majeurs de la planète depuis quatre décennies.

Son travail est présenté dans le cadre d'une exposition "Peurs sur la ville", qui se tient jusqu'au 17 avril à la Monnaie de Paris. Elle réunit également des photos d'archives de Paris-Match sur l'histoire en marche à Paris: images de la Libération, de la guerre d'Algérie, de Mai 68, des attentats des années 1980 et 1990 et des émeutes de 2005 en banlieue.

S'y ajoutent des images de Michael Wolf, photographe né en Allemagne, qui a travaillé à partir de captures d'écran du logiciel "Street view" de Google.

Ces 3 expositions en 1 forment un cocktail anxiogène, auquel l'académicien Max Gallo a été chargé de donner un sens. "Paris est un champ de bataille. Nous l'avions oublié", écrit-il dans son introduction.

"Paris est un volcan assoupi mais en activité. L'épicentre symbolique de la violence nationale. L'un des cratères d'où surgissent les violences mondiales", considère l'écrivain.

L'exposition est "un appel à la lucidité et à la vigilance. Il faut des décennies pour imaginer et construire la paix et un seul geste pour la détruire", poursuit Max Gallo.

Le travail de Patrick Chauvel, qui aime à se définir comme un "rapporteur de guerre", est présenté par la Galerie Photo 12 dirigée par Valérie-Anne Giscard d'Estaing.

Le photographe explique que ce projet lui "trotte dans la tête depuis longtemps". "Les gens ont du mal à comprendre ce qui se passe sur le terrain. Alors j'ai eu l'idée d'amener la guerre à Paris", dit-il.

Avec l'aide de Paul Biota, Chauvel a réalisé des photomontages saisissants, mêlant des vues de monuments parisiens et des scènes de guerre ramenées de ses reportages en Tchétchénie, au Proche-Orient, en Afghanistan.

Dans l'exposition, chaque photomontage est accompagné de l'image d'origine assortie d'explications.

Sur la place de l'Etoile, un char détruit s'est arrêté au pied de l'Arc de Triomphe. Un homme est assis devant, écrasé par les événements.

"C'est un Russe dont le fils est mort carbonisé dans ce blindé détruit par les forces tchétchènes à Grozny. Le père est resté là pendant une semaine, à boire et à pleurer. Le char, lui, avait fait disparaître juste avant deux habitations et deux familles tchétchènes", se souvient Patrick Chauvel.

L'armée américaine (une photo prise en Afghanistan) patrouille devant l'Hôtel de la Monnaie. Des soldats canadiens (toujours l'Afghanistan) ont pris position devant Notre-Dame.

"Ce projet, cela fait des années que je le propose à des institutions parisiennes qui me disent non car elles trouvent les images trop provocantes", indique le baroudeur.

En 1997, Chauvel avait réalisé un photomontage des Twin Towers de New York et de l'Intifada. Puis il y a eu le 11 septembre 2001. Il avait travaillé sur des photomontages à Londres mais il y a eu les attentats. Il était passé à Madrid, frappée elle aussi par le terrorisme, raconte-t-il.

Quand on lui demande si ses images ne risquent pas de porter la poisse à Paris, il s'exclame "j'espère que non, ce serait horrible".

Le photographe envisage à présent de travailler sur Berlin.


           

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