Règlement de comptes chez les Tolstoï et guéguerre des éditeurs


Mardi 20 Juillet 2010 - 10:46
AFP


Paris - Dans la famille Tolstoï, je voudrais Léon et Sophie : deux éditeurs publient chacun le 19 août un ouvrage incluant deux oeuvres du couple, une nouvelle traduction de "La Sonate à Kreutzer" du grand écrivain russe, et "A qui la faute ?", roman de son épouse, inédit en français.


Léon Tolstoï
Léon Tolstoï
Ce doublon éditorial d'Albin Michel et des Editions des Syrtes s'explique en grande partie par le centième anniversaire de la mort de l'auteur de "Guerre et Paix" et d'"Anna Karenine" en novembre. Les oeuvres sont aussi tombées dans le domaine public.

Traduit pour la première fois en français et méconnu en Russie, "A qui la faute ?, réponse à La Sonate à Kreutzer", n'a été publié qu'en 1994 en russe dans la revue "Octobre".

Se murmure aussi que Christine Zeytounian-Beloüs, traductrice des deux textes chez Albin Michel, aurait expliqué voici deux ans son projet de les réunir à son ancien professeur Michel Aucouturier, auteur de la nouvelle traduction de "La Sonate" aux Syrtes.

"Nous ne voulons pas polémiquer", assure à l'AFP Joëlle Faure, directrice de la communication d'Albin Michel, en confirmant que Christine Zeytounian-Beloüs a bien parlé à M. Aucouturier de ce texte inédit de Sophie Tolstoï, retrouvé par hasard en rangeant sa bibliothèque. "Christine s'est quand même sentie trahie. Mais l'essentiel, c'est que toutes ces publications, c'est bon pour Tolstoï", conclut-elle.

"C'est une coïncidence. Nous avions ce projet éditorial, et d'autres, depuis deux ans, pour célébrer l'anniversaire de Tolstoï (1828-1910). Nous devions publier cet ouvrage en octobre, en même temps que +Ma vie+, l'autobiographie de Sophie. Nous avons avancé la parution pour ne pas être à la traîne", expliquent les Editions des Syrtes.

Leur publication d'août inclut aussi "Le prélude de Chopin" de Léon Tolstoï fils, réplique aux deux textes de ses parents et inédit en français, ainsi que "Romance sans paroles", autre inédit de Sophie, tous traduits par Eveline Amoursky. L'autobiographie paraîtra le 7 octobre.

Quand Tolstoï écrit "La Sonate à Kreutzer", il traverse une grave crise morale et mystique. Il y assimile la femme à la tentation et la chair au vice. Ce violent réquisitoire contre le mariage et la procréation suscite la polémique dès sa diffusion en 1889. Sophie le perçoit comme une attaque personnelle.

Sa vengeance sera littéraire. Pour elle, loin d'être la tentatrice décrite par Léon, la femme idéalise et poétise l'amour, l'éveil sexuel est secondaire. Et Sophie peuple son roman de tout ce qu'elle a sur le coeur : rancoeurs, disputes... Son entourage la dissuade de publier.

C'est en 1862 que Sophie Andréïevna Behrs (1844-1919) épouse le comte Tolstoï. Elle a 18 ans. Il en a presque le double et est en pleine gloire.

Commencent 48 ans de vie commune. De cette union, plutôt faite de guerre que de paix, naîtront 13 enfants, dont quatre mourront en bas âge.

Chacun des deux époux tient un journal et le fait lire à l'autre, ce qui attise les conflits.

Toute sa vie, Sophie aidera son génie de mari en jouant la secrétaire et la copiste. Elle retranscrit ainsi sept fois "Guerre et Paix", Léon reprenant sans cesse son texte. Elle gère aussi le domaine familial de Yasnaïa Poliana (La clairière lumineuse), à 200 km de Moscou, et s'occupe de sa nombreuse progéniture.

("A qui la faute?" - Sophie Tolstoï - "La Sonate à Kreutzer" - Léon Tolstoï - Albin Michel - 333 p. - 19 euros)

("La Sonate à Kreutzer" - Léon Tolstoï - "A qui la faute?" et "Romance sans paroles" - Sofia Tolstoï - "Le prélude de Chopin" - Léon Tolstoï fils - Editions des Syrtes - 404 p. - 23 euros)


           

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