Rithy Panh adapte Duras: "Un barrage contre le Pacifique" sans souffle


Vendredi 2 Janvier 2009 - 21:47
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PARIS (AFP) - Avec "Un barrage contre le Pacifique", qui sort mercredi dans les salles, le documentariste cambodgien Rithy Panh dirige la comédienne Isabelle Huppert dans une adaptation du roman éponyme de Marguerite Duras dépourvue de souffle.


En Indochine, au début des années 30, une veuve française (Isabelle Huppert) tente d'exploiter une concession acquise auprès de l'administration coloniale, mais les terres dans lesquelles elle a investi ses économies se révèlent inondables, et donc impropres à toute culture.
Malgré l'énergie déployée pour édifier, avec l'aide des paysans de la région, un barrage qui protègera ses rizières de l'avancée des eaux, l'argent vient vite à manquer.
Cette mère autoritaire et possessive consent alors à ce que sa fille Suzanne (Astrid Berges-Frisbey) se laisse courtiser par M. Jo (Randal Douc), un riche homme d'affaires sino-cambodgien aux manières occidentales.
Imprégné de l'idéologie raciste qui sous-tend la société coloniale, Joseph (Gaspard Ulliel), le frère de Suzanne, espère, à l'instar de sa mère, tirer le plus d'argent possible d'une liaison qui lui répugne.
Ce roman d'inspiration autobiographique signé par Marguerite Duras en 1950 a été adapté dès 1958 par l'auteur de "Jeux interdits" et de "La bataille du rail", René Clément, en un film à gros budget avec Silvana Mangano et Anthony Perkins intitulé "Barrage contre le Pacifique".
Auteur d'une dizaine de documentaires axés sur la culture de son pays et le génocide perpétré par le régime de Pol Pot --"S21, la machine de mort khmère rouge" a reçu le Prix Albert Londres en 2004--, le Cambodgien Rithy Panh a souhaité adapter ce texte au cinéma à son tour.
Grand admirateur du film "Hiroshima mon amour", écrit par Duras et tourné par Alain Resnais, Rithy Panh voit dans le texte d'"Un barrage contre le Pacifique", qu'il a transformé en scénario avec l'aide deMichel Fessler, une belle "partition de jeunesse" évoquant l'enfance de Duras dans les colonies.
C'est pour lui le "roman de la fin d'une illusion", celle d'une famille qui vit dans "l'utopie d'un barrage toujours à reconstruire, contre l'inexorable fatalité du malheur, contre la faim qui tue les enfants de la plaine, contre l'injustice et la corruption des fonctionnaires du cadastre".
Mais en dépit de la beauté des paysages et de la richesse des thèmes brassés par le roman, nul souffle épique n'anime ce "Barrage contre le Pacifique".
Après avoir évoqué la vénalité et la déroute morale de la famille, Rithy Panh peine à faire émerger un fort enjeu dramatique, plombé par un scénario dont les lignes de force s'effilochent rapidement.
Une mise en scène peu inventive, des personnages au caractère et aux motivations à peine ébauchés, parfois ternement interprétés, et des dialogues sans saveur achèvent de faire bâiller le spectateur.
Seule Isabelle Huppert fait vivre l'héroïne, inspirée de la mère de Duras, faisant d'elle une femme tantôt sinistre tantôt pathétique, broyée par son amer combat de femme seule.
L'actrice de 55 ans, qui sera bientôt à l'affiche de "Villa Amalia" de Benoît Jacquot et de "White material" de Claire Denis, présidera le jury du 62e Festival de Cannes, du 13 au 24 mai.


           

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