Syrie: Damas et Moscou s'activent contre un recours à la force


Mercredi 18 Septembre 2013 - 16:12
AFP


Damas - Le président Bachar al-Assad a remercié mercredi la Russie pour son soutien à la Syrie, face à "l'attaque féroce dont elle fait l'objet", en recevant à Damas le vice-ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Riabkov, a rapporté la télévision d'Etat.


Bachar al-Assad et Sergueï Riabkov
Bachar al-Assad et Sergueï Riabkov
Moscou, allié indéfectible de Damas, a accusé de "parti pris" les inspecteurs de l'ONU qui ont enquêté sur une attaque chimique en Syrie, et affirmé avoir reçu de Damas des éléments appuyant la thèse d'une provocation des rebelles, raidissant un peu plus le bras de fer diplomatique entre Russes et Occidentaux, à peine conclu un accord sur un plan de démantèlement des armes chimiques syriennes.

M. Assad, qui recevait à Damas le vice-ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Riabkov, a remercié la Russie pour son soutien "face à l'attaque féroce" dont son pays fait l'objet. Son vice-ministre des Affaires étrangères a dit à l'AFP être persuadé qu'il n'y aurait pas de résolution à l'ONU autorisant un usage de la force contre Damas.

Les Etats-Unis et la France sont pour leur part convaincus de la responsabilité de Damas dans une attaque chimique qui a fait selon eux près de 1.500 morts le 21 août près de la capitale.

Paris et Washington poussent pour une résolution "contraignante" à l'ONU contre le gouvernement syrien s'il manquait aux obligations contenues dans l'accord russo-américain signé samedi sur le démantèlement de son arsenal chimique.

Lors de l'audience avec le diplomate russe, Bachar al-Assad a "exprimé ses remerciements à la Russie" et "estimé que la position russe pouvait contribuer à créer "un nouvel équilibre mondial", selon la télévision d'Etat.

La Syrie s'est en effet dit certaine que le Conseil de sécurité n'adopterait pas de résolution sur le démantèlement de ses armes chimiques sous le chapitre VII de la Charte des Nations unies qui prévoit des "mesures coercitives", allant de sanctions économiques à l'usage de la force.

"Nous croyons que (le chapitre VII) ne sera jamais utilisé car il n'y a pas de justification à son usage", a déclaré mercredi à l'AFP le vice-ministre des Affaires étrangères Fayçal Moqdad.

La Russie bloque depuis le début du conflit en Syrie toute résolution contraignante ou menaçante au Conseil de sécurité de l'ONU.

Des diplomates des cinq membres permanents du Conseil de sécurité de l'ONU (Etats-Unis, France, Russie, Chine, Royaume-Uni) ont examiné mardi, sans progrès majeur, un projet de résolution visant à assurer le démantèlement effectif de l'arsenal chimique syrien.

Des conclusions "politisées", selon Moscou

Le rapport des inspecteurs de l'ONU sur l'attaque du 21 août, présenté lundi par le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon, n'accuse pas explicitement les autorités syriennes, mais a été interprété comme tel par les Occidentaux, alors que Moscou rejette un rapport "politisé".

"Nous sommes déçus, c'est le moins qu'on puisse dire, de l'approche qui a été celle du secrétariat de l'ONU et des inspecteurs de l'ONU qui se trouvaient en Syrie, qui ont préparé leur rapport de manière sélective et incomplète, sans prendre en compte des éléments que nous avions à plusieurs reprises signalés", a déclaré à l'agence Ria Novosti le vice-ministre Sergueï Riabkov.

"Sans avoir un tableau complet de ce qui se passe ici, on ne peut considérer les conclusions auxquelles sont parvenues les inspecteurs de l'ONU que comme des conclusions politisées, de parti pris et unilatérales", a-t-il déclaré.

Le diplomate russe a ajouté que des "éléments" avaient été transmis aux Russes par la Syrie pour appuyer la thèse d'une provocation des rebelles.

Le quotidien russe Vedomosti, peu suspect de proximité avec le pouvoir russe, a de son côté interrogé deux experts militaires pour identifier des fragments de roquettes sol-sol comportant des inscriptions en cyrillique, qui figurent sur des photographies jointes au rapport de l'ONU.

Selon ces experts russes, certains fragments, sans inscription, paraissent de fabrication artisanale.

Des munitions datant de 1967

L'inscription lue sur d'autres fragments indique qu'il s'agit de munitions de lance-roquette multiple de fabrication soviétique produites "en 1967 par l'usine n°179 de Novossibirsk".

Ces munitions sont depuis longtemps obsolètes, leur délai d'utilisation est dépassé et l'armée syrienne dispose en grande quantité de munitions plus modernes "dont l'utilisation paraîtrait plus logique", soulignent les experts cités. Ils estiment que ces éléments pousseraient davantage à incriminer les rebelles.

L'attaque chimique du 21 août avait entraîné la menace de frappes occidentales, évitées in extremis par l'initiative lancée le 9 septembre par Moscou d'un plan de démantèlement de l'arsenal chimique syrien.

Le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov et le secrétaire d'Etat américain John Kerry ont scellé samedi à Genève un accord sur ce plan, accepté par Damas.

Le ministre français, Laurent Fabius, dont le pays milite pour une résolution "forte et contraignante" à ce sujet au Conseil de sécurité de l'ONU, s'est vu opposer mardi par M. Lavrov une fin de non recevoir. Mercredi, M. Fabius a estimé mercredi que "personne ne peut mettre en cause l'objectivité" des inspecteurs de l'ONU.

Entre-temps, la situation en Syrie ne cesse d'empirer selon l'ONU, qui a souligné mardi que près de sept millions de Syriens avaient besoin d'une aide humanitaire d'urgence. Plus de 110.000 personnes sont mortes depuis le début du conflit, selon une ONG syrienne.


           

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