Thaïlande: les "chemises rouges" à la rencontre des touristes de Bangkok


Samedi 3 Avril 2010 - 13:28
AFP


Bangkok - Quelque 60.000 manifestants paralysaient samedi un quartier touristique du centre de Bangkok, dans une nouvelle épreuve de force avec le Premier ministre thaïlandais, dont ils réclament depuis trois semaines la démission.


Thaïlande: les "chemises rouges" à la rencontre des touristes de Bangkok
Les touristes étrangers regardaient avec surprise mais sans crainte ce nouveau défilé des "chemises rouges", partisans de l'ex-Premier ministre en exil Thaksin Shinawatra, qui exigent la tête d'Abhisit Vejjajiva et l'organisation d'élections anticipées.

Le mouvement, toujours solide après une vingtaine de jours de lutte et malgré une chaleur écrasante, s'est concentré cette fois autour d'un carrefour majeur de Bangkok où sont établis des hôtels de luxe, des centres commerciaux et un célèbre lieu de prière, le sanctuaire d'Erawan.

"Ils provoquent les autorités afin qu'elles utilisent la force pour les disperser", a assuré Abhisit lors d'une conférence de presse en préconisant le dialogue pour obtenir l'évacuation du quartier avant "d'envisager" des méthodes coercitives.

Les "rouges", qui s'appuient notamment sur les paysans du nord et du nord-est de la Thaïlande, accusent Abhisit de servir les élites traditionnelles de Bangkok et exigent son départ immédiat.

Soutenu par l'armée et une coalition parlementaire, ce dernier n'a pour l'instant évoqué qu'une possible démission en fin d'année.

"Notre patience s'amenuise mais, par patriotisme, nous devons rester non-violents", a déclaré Jatuporn Prompan, un des leaders "rouges". "La dissolution est l'issue politique à la crise la plus adaptée, car c'est une solution sans violence et qui n'avantage ni ne désavantage personne", a renchéri un de ses camarades, Veera Musikapong.

La manifestation est intervenue au lendemain d'un mouvement de protestation initié par l'industrie touristique qui demande un règlement rapide de la crise pour permettre au secteur, riche pourvoyeur de devises étrangères, de reprendre une activité normale.

"Je comprends ce qu'ils font. Je n'ai pas peur parce que je viens chaque année", a expliqué Adolf Gutounik, un Allemand de 57 ans. "Je ne pense pas que beaucoup de touristes vont aimer ça en arrivant à Bangkok", pronostiquait pour sa part Selina Poh, une Singapourienne de 34 ans, passablement agacée.

Le pays est constamment secoué par les mouvements des "rouges" et de leurs adversaires royalistes et anti-Thaksin, les "chemises jaunes", un signe de la profonde fracture qui divise le royaume depuis 2006.

L'an passé, des manifestations des "rouges" avaient fait deux morts et plus de 120 blessés. Fin 2008, les "jaunes" avaient bloqué les aéroports de Bangkok pendant neuf jours, piégeant des centaines de milliers de touristes.

Selon la police, les manifestants étaient 60.000 à la mi-journée samedi. Hommes, femmes et enfants participaient au défilé dans la bonne humeur, au rythme de sonos saturées et en cherchant les rares coins d'ombre, à la satisfaction des marchands de boissons fraîches.

L'opposition réclame le retour à l'ordre constitutionnel en vigueur avant le coup d'Etat militaire de 2006 contre Thaksin, qu'elle considère comme le seul homme politique à s'être jamais préoccupé du sort des masses rurales.

L'ancien magnat des télécommunications est en revanche détesté par l'establishment qui dénonce son affairisme, son népotisme et la "menace" qu'il représente contre la monarchie.

Thaksin vit en exil depuis 2008 pour échapper à une peine de prison pour malversations financières. Depuis le début du mouvement, il s'adresse tous les soirs à ses partisans par vidéo conférence.


           

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