Tunisie: les islamistes revendiquent la tête du prochain gouvernement


Mercredi 26 Octobre 2011 - 11:15
AFP


Tunis - Le parti islamiste tunisien Ennahda, donné vainqueur de l'élection de l'assenblée constituante du 23 octobre en Tunisie, veut former le gouvernement d'ici un mois, et des tractations politiques se sont engagées avant même que soit connu le résultat final de l'élection.


Rached Ghannouchi
Rached Ghannouchi
"Il est tout à fait naturel que le parti qui a obtenu la majorité dirige le gouvernement", a déclaré mercredi le dirigeant d'Ennahda, Rached Ghannouchi, sur la radio Express FM.

"Le gouvernement doit être composé le plus tôt possible, dans un délai qui n'excède pas un mois", a-t-il ajouté, alors que les résultats définitifs de l'élection n'ont pas encore été publiés.

Les premiers chiffres donnés lentement par la commission électorale Isie confirment cependant l'avance des islamistes, qui ont déjà annoncé au lendemain de l'élection qu'ils comptaient sur un score entre 30 et 40%.

Selon des décomptes effectués par l'AFP, le mouvement islamiste obtient 44 sièges dans 15 circonscriptions (sur 27 en Tunisie). Avec les 9 sièges obtenus à l'étranger, Ennahda peut déjà compter sur 53 élus dans la future assemblée de 217 membres.

La Constituante élue dimanche par les Tunisiens, qui votaient pour la première fois depuis la chute de Ben Ali, devra prioritairement désigner un nouveau président de la République, qui lui-même formera un nouvel exécutif.

"Nous sommes pour une grande alliance nationale qui aboutira à un gouvernement démocratique", a souligné M. Ghannouchi, souhaitant des discussions "avec tous ceux qui ont milité contre Ben Ali". "Des concertations ont commencé avant même les élections", a-t-il admis, sans préciser avec quels partis.

Interrogé sur le prochain président de la République, M. Ghannouchi, qui a déjà déclaré qu'il ne serait pas candidat, a estimé que ce poste devrait être occupé par "une personnalité qui a milité contre la dictature".

Trois noms circulent dans les milieux politiques pour ce poste de président: Mustapha Ben Jaafar, chef du parti de gauche Ettakatol, qui a déjà fait savoir qu'il était candidat, Moncef Marzouki, dirigeant du Congrès pour la République (CPR, gauche nationaliste), et Ahmed Mestiri, opposant historique de Bourguiba.

A Tunis, l'annonce des premiers résultats confirmant l'avance des islamistes a donné lieu à des manifestations de joie mardi soir. Devant le QG du parti, militants et sympathisants s'étreignaient, criaient leur "fierté".

"Ennahda a réussi parce que le peuple sait qu'il est crédible, parce que ses militants sont des gens du peuple, comme nous", expliquait Doha, un ingénieur de 25 ans.

Mais la victoire annoncée du parti islamiste a aussi fait l'effet d'un choc. "La rue tunisienne est choquée, la rue de Tunis a peur, tout le monde dans les cafés est en train de discuter pour analyser ce qui s'est passé car on ne s'attendait pas à cela, ce résultat foudroyant" d'Ennahda, déclarait mercredi Icham, artiste d'une vingtaine d'années.

Les femmes en particulier, qui jouissent du statut le plus avancé dans le monde arabe, s'inquiètent de cette victoire, en dépit des assurances réitérées par Ennahda qu'il ne toucherait pas à ce statut.

"Le mode de vie des Tunisiens ne sera pas touché", a répété Rached Ghannouchi sur Express FM. "Chacun vivra selon ses convictions dans le cadre de la loi", a-t-il dit.

L'autre choc du scrutin du 23 octobre est la percée inattendue d'une liste que personne n'avait vu venir, "La Pétition populaire pour la justice et le développement", qui, selon les premiers décomptes, se retrouve derrière Ennahda à égalité avec le Congrès pour la République (CPR, gauche nationaliste).

Elle est dirigée par Hechmi Haamdi, un richissime tunisien aux appartenances politiques ambigües, qui a fait campagne depuis Londres par ke biais de sa télévision satellitaire Al Mostakilla, regardée en Tunisie.

La "Pétition populaire" fait déjà l'objet de plaintes, en France et en Tunisie, pour le non respect des règles de campagne, notamment pour l'utilisation abusive de son média privé et pour l'opacité de son financement.


           

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