La manifestation anti-gouvernementale réunissant associations féministes, partis d'opposition et le puissant syndicat UGTT doit débuter à partir de 17H00 GMT avec pour slogans la défense des acquis de la femme, qui bénéficient de droits sans pareil dans le monde arabe depuis 1956 même si l'égalité n'est pas consacrée.
Or les islamistes au pouvoir sont sans cesse accusés de vouloir revenir sur cette spécificité, Ennahda ayant tenté notamment d'inscrire le principe de "complémentarité" des sexes dans le projet de Constitution, toujours paralysé. Ce brouillon ne mentionne par ailleurs toujours pas explicitement l'égalité hommes-femmes.
Ainsi, l'Association tunisienne des femmes démocrates appelle à manifester pour "l'égalité pleine et effective" entre les sexes mais aussi contre "la montée du terrorisme et de la violence", en référence notamment à l'assassinat le 25 juillet, attribué à la mouvance jihadiste, du député Mohamed Brahmi.
Et les manifestants devraient aussi reprendre largement des slogans appelant à la démission du gouvernement dirigé par les islamistes, revendication phare depuis ce meurtre qui a déclenché la profonde crise actuelle.
Le parcours de la marche sera d'ailleurs éminemment politique puisqu'il s'achèvera sur la place faisant face à l'Assemblée nationale constituante où l'opposition manifeste quotidiennement depuis près de trois semaines.
Ennahda organise pour sa part un rassemblement rival, avenue Habib Bourguiba, haut lieu de la révolution de 2011 à Tunis, sous le slogan "les femmes de Tunisie, piliers de la transition démocratique et de l'unité nationale". Là aussi, le thème rappelle la position des islamistes, ces derniers insistant sur un maintien des "institutions transitoires" issues d'élections en octobre 2011 et toujours en place faute de consensus sur la Constitution.
Malgré la pression de l’opposition, mais aussi de l'UGTT -fort de 500.000 membres et capable de paralyser le pays- et du patronat Utica, le parti islamiste exclut encore et toujours la démission du gouvernement et la mise en place d'un cabinet d'indépendants pour conduire la Tunisie vers l'adoption d'une loi fondamentale. L'hétéroclite coalition d'opposants a d'ailleurs prévu d'annoncer cette semaine un cabinet gouvernemental alternatif.
Ennahda propose pour sa part d'élargir le gouvernement à d'autres partis tout en en gardant la tête. Les islamistes ont aussi promis des élections en décembre.
De premiers pourparlers entre Ennahda et l'UGTT n'ont conduit lundi soir à aucune avancée laissant présager une sortie rapide de la crise, même si d'autres rencontres auront lieu dans les jours à venir.
L'UGTT s'est retrouvée à contrecoeur dans le rôle de médiateur entre Ennahda et les partis d'opposition après que le président de la Constituante a gelé les travaux de l'assemblée en demandant à la centrale syndicale d'assumer son "rôle historique" en parrainant les pourparlers.
Le gouvernement est accusé d'avoir failli sur le plan sécuritaire, l'essor de la mouvance salafiste déstabilisant régulièrement le pays depuis la révolution de janvier 2011. Un premier cabinet dirigé par Ennahda avait déjà dû démissionner après l'assassinat d'un autre opposant, Chokri Belaïd, le 6 février.
Par ailleurs, quatre jours après l'assassinat de Brahmi, un groupe suspecté de liens avec Al-Qaïda et pourchassé par l'armée depuis décembre a sauvagement tué huit militaires au mont Chaambi à la frontière algérienne.
Cette embuscade a déclenché une vaste opération "aérienne et terrestre" mais les autorités n'ont dressé aucun bilan après près de deux semaines de manoeuvres et de bombardements. Selon une source militaire sur place, six "terroristes" auraient été néanmoins tués lundi.