Un ramadan confiné sous le signe du coronavirus


Vendredi 24 Avril 2020 - 14:24
AFP


Ryad - Après les Pâques chrétienne et juive, le ramadan, mois de jeûne et de prière, débute à son tour vendredi sous le signe du confinement pour des centaines de millions de musulmans dans le monde, privés de mosquées et de réjouissances familiales.


La pandémie a fait à ce jour plus de 190.000 morts, dont près des deux tiers en Europe, et bientôt 50.000 aux Etats-Unis, selon un dernier bilan établi à la mi-journée sur la base de sources officielles.

Malgré ce lourd tribut, l'Union européenne n'est pas parvenue à trouver jeudi un terrain d'entente sur un plan de relance. Les Etats-Unis, de leur côté, ont pris de nouvelles mesures pour affronter la récession sans précédent causée par cette crise sanitaire planétaire, tandis que le président Donald Trump a évoqué -remède original- l'injection aux malades de désinfectant alcoolique.

L'Arabie saoudite, qui abrite les deux premiers lieux saints de l'islam, ainsi que la plupart des pays arabes --dont la Syrie, l'Egypte, la Tunisie, la Jordanie et Bahreïn-- ont annoncé le début vendredi du ramadan.

Un des piliers de l'islam, le mois de jeûne, durant lequel les croyants doivent notamment s'abstenir de manger et de boire du lever au coucher du soleil, est traditionnellement une période de partage, de rassemblements et de convivialité. C'est aussi un mois de prières et de piété religieuse au cours duquel les musulmans convergent en grand nombre dans les mosquées, surtout la nuit.

Coronavirus oblige, le repas de rupture du jeûne (iftar), après le coucher du soleil, se prendra donc seul à la maison, alors que c'est normalement l'occasion de se réunir autour de grandes tablées au sein de la famille élargie ou entre amis. La prière du soir, qu'il est de coutume d'aller faire à la mosquée après le repas, se fera également à domicile.

Au Moyen-Orient, en Afrique de Nord ou en Asie, une grande partie des pays musulmans ont fermé les mosquées et interdit les rassemblements nocturnes. Des restrictions soutenues, dans la plupart des cas, par les autorités religieuses. Et qui s'appliquent par ailleurs pleinement aux communautés musulmanes vivant en Europe, toujours en partie sous un strict confinement.

A Jérusalem, la mosquée Al-Aqsa, troisième lieu saint de l'islam, était ainsi déserte vendredi.

Le roi Salmane d'Arabie s'est dit "affligé que le mois sacré arrive dans des circonstances nous privant d'effectuer des prières telles que les tarawih (les prières nocturnes) dans les mosquées (...)".

Cette année, ce sera "ramadan en privé, loin des uns et des autres et loin des mosquées", résume un responsable albanais.

"Le corona, c'est pire que la guerre", peste Oum Mohammed, mère de famille palestinienne qui vit en grande partie des aides sociales, et ne pourra pas compter cette année sur les traditionnelles repas de charité et dons des associations caritatives, habituellement très nombreux pendant le mois de jeûne.

En Asie cependant, des dignitaires religieux ont refusé de respecter ces restrictions: au Bangladesh, au Pakistan, ou dans la région indonésienne conservatrice d'Aceh, où des milliers de fidèles ont assisté à la prière du soir jeudi dans la plus grande mosquée de la capitale, Banda Aceh.

Au Niger, l'arrivée du ramadan fait craindre une flambée de violences dans ce pays africain, après des émeutes ces derniers jours dans plusieurs villes contre le couvre-feu et l'interdiction des prières collectives. "On n'a pas pu faire les prières les vendredis et on veut en plus nous empêcher les prières durant le mois béni de ramadan? Ca ne va pas se passer comme ça!", se révolte Hadjia Aïssa, une ménagère d'un quartier populaire de la capitale Niamey.

Au fil des semaines, la pandémie planétaire continue de laminer les économies du monde entier, contraignant les autorités à essayer d'élaborer les plans de relance, avec parfois plus ou moins de succès.

Ainsi, après plus de quatre heures de sommet en visioconférence jeudi, les 27 dirigeants de l'UE ont échoué à s'entendre et n'ont fait que demander à la Commission européenne de formuler des propositions de relance à partir de mi-mai.

"Il n'y a pas de consensus aujourd'hui" sur les solutions à apporter à la crise économique la plus grave depuis 1945, a reconnu le président français Emmanuel Macron, à l'issue du sommet.

Les dirigeants de l'UE restent divisés sur le montant mais aussi sur le mode de financement d'un plan de relance commun.

Selon le Fonds monétaire international (FMI), l'Europe pourrait connaître une récession de 7,1% cette année. C'est, à ce stade, le continent qui compte le plus de victimes de la maladie Covid-19 avec 116.000 morts, dont 25.549 en Italie, 22.524 en Espagne, 21.856 en France, et 18.738 au Royaume-Uni.

Outre-Atlantique en revanche, la Chambre des représentants américaine a adopté un nouveau plan d'aide aux petites et moyennes entreprises et aux hôpitaux d'un montant de 480 milliards de dollars, qui s'ajoutent au plan de relance historique de 2.200 milliards approuvé fin mars.

Selon le décompte de l'université Johns Hopkins jeudi soir, les Etats-Unis ont enregistré l'un des pires bilans de la maladie sur une journée avec 3.176 décès entre 20h30 mercredi soir et jeudi soir.

Malgré ce constat, plusieurs Etats américains tel le Texas, le Vermont ou la Géorgie ont décidé de se lancer sur la voie du déconfinement, en autorisant certains commerces à rouvrir.

En Europe aussi, certains pays allègent leurs dispositifs destinés à endiguer la maladie, tandis que d'autres, comme l'Italie et la France, se préparent à un début de déconfinement.

En Amérique latine, le Mexique est lui "dans la phase d'ascension rapide du nombre quotidien de cas", et a franchi jeudi la barre du millier de morts (1.069). Au Venezuela, un homme a été tué jeudi dans le sud du pays lors d'une manifestation contre la hausse des prix des produits alimentaires.

Au Salvador, l'Assemblée a mis fin soudainement à sa session jeudi soir après une forte quinte de toux d'une députée qui intervenait en plénière, provoquant l'évacuation immédiate du bâtiment et la mise en confinement de la centaine de députés.

Pendant ce temps, la course au vaccin continue. Un laboratoire chinois affirme vendredi qu'un vaccin expérimental inoculé à des grands singes a pour la première fois "largement protégé" ces cobayes contre le nouveau coronavirus.

Selon une étude présentée jeudi à la Maison Blanche, le nouveau coronavirus s'affaiblit dans une atmosphère chaude et humide. La lumière du soleil en particulier semble avoir "un effet puissant" pour tuer le virus, affirme cette étude, jugée "encourageante" par le vice-président Mike Pence, et qui laisserait à penser que le virus pourrait peut-être s'affaiblir avec l'arrivée de l'été dans l'hémisphère nord.

Sans doute désireux d'apporter sa contribution, le président Trump a suggéré de son côté, à l'écoute de ces conclusions, de travailler sur un traitement aux ultra-violets, et d'injecter dans les poumons des malades le désinfectant alcoolique utilisé pour se nettoyer les mains.

"Je vois que le désinfectant l'assomme (le coronavirus, ndlr) en une minute. Et est-ce qu'il y a un moyen de faire quelque chose comme ça avec une injection à l'intérieur ou presque comme un nettoyage? Comme vous le voyez, ça pénètre dans les poumons et ça crée un énorme effet, il serait donc intéressant de le vérifier", a-t-il suggéré lors de sa conférence de presse quotidienne consacrée à la lutte contre la pandémie.


           

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