Zuckerberg monte au front politique pour défendre Facebook


Mardi 10 Avril 2018 - 12:17
Reuters


Washington - Mark Zuckerberg va se présenter mardi et mercredi devant les parlementaires américains avec pour objectif premier de défendre le modèle de Facebook face aux appels à un durcissement de la réglementation à la suite du détournement des données de dizaines de millions d’utilisateurs.


Le réseau social est en pleine tourmente depuis qu’un lanceur d’alerte a révélé mi-mars que les données de 50 millions de ses utilisateurs avaient été détournées au profit de Cambridge Analytica, un cabinet britannique de conseil politique ayant notamment travaillé pour Donald Trump lors de la dernière campagne présidentielle aux Etats-Unis.

Le 4 avril, Facebook a lui-même revu à la hausse le nombre d’utilisateurs affectés, à 87 millions.

A cela s’ajoutent les soupçons d’utilisation du réseau social par la Russie pour peser sur l’élection présidentielle américaine.

Mark Zuckerberg sera auditionné mardi lors d’une séance conjointe des commissions sénatoriales de la Justice et du Commerce et, mercredi, par la commission de l’Energie et du Commerce de la Chambre des représentants.

Il est très peu probable que le Congrès américain adopte de nouvelles lois encadrant l’activité de Facebook et des autres sociétés internet, à la fois en raison d’un manque de volonté politique et de l’intense pression des entreprises technologiques. En outre, peu de parlementaires semblent prêts à se plonger dans la complexité des problèmes techniques en jeu.

Bill Nelson, chef de file démocrate à la commission du Commerce du Sénat, s’est prononcé lundi en faveur d’une nouvelle réglementation face aux différents scandales concernant Facebook mais il a dit ne rien attendre de concret de cette audition en raison notamment du temps de parole réduit des sénateurs.

“Comment peut-on demander à 44 sénateurs d’effectuer une audition riche en contenu alors que chaque sénateur ne dispose que de quatre minutes?”, a-t-il déclaré à la presse.

Priée de dire si une nouvelle réglementation était nécessaire, la porte-parole de la Maison Blanche, Sarah Sanders, a répondu: “Je n’ai pas d’annonce politique précise sur ce point mais je pense que nous attendons tous avec impatience ce témoignage.”

“UTOPIE NUMÉRIQUE”
Les républicains, traditionnellement contre toute forme de régulation des entreprises, ne sont pas convaincus que cela soit une nécessité pour les groupes technologiques.

“Je ne veux pas pénaliser Facebook. Je ne veux pas le réglementer jusqu’à ce qu’il soit à moitié mort”, a déclaré le sénateur républicain de Louisiane John Kennedy, membre de la commission de la Justice. “Mais nous avons un problème. Notre utopie numérique promise est un champ de mines”.

Selon des organisations de défense de la vie privée, de puissants groupes de pression se dressent contre tout effort de réglementation.

En 2011, les dépenses de Facebook en matière de lobbying étaient de 1,35 million de dollars (1,09 million d’euros); six ans plus tard, ce chiffre a été porté à 11,5 millions de dollars, selon les données conservées par le Center for Responsive Politics, un organisme indépendant basé à Washington surveillant le financement de la vie politique américaine.

“Les gens pensent que nous allons adopter une loi générale sur la protection de la vie privée et que ce sera une solution miracle”, a déclaré Alvaro Bedoya, un ancien assistant parlementaire ayant travaillé sur ces questions pour l’ancien sénateur Al Franken. “La réalité, c’est que les lobbyistes sont plus nombreux que les défenseurs de la vie privée à Washington dans un rapport de 20 à 1 ou 30 à 1.”

Le projet de loi “Honest Ads Act”, qui vise à apporter plus de transparence sur le financement par des entités étrangères de messages diffusés sur les médias sociaux, est bloqué depuis sa présentation en octobre dernier, même si Facebook l’a endossé vendredi.

Des responsables du secteur technologique s’attendent en outre à ce que le témoignage du PDG de Facebook serve davantage aux responsables politiques à se mettre en valeur qu’à débattre de mesures législatives.

“Ils (les parlementaires) ne comprennent pas le ciblage publicitaire et ils lui poseront probablement un tas de questions destinées à plaire à leurs bases politiques respectives”, a déclaré une source du secteur sous le sceau de l’anonymat.


           

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