Affaire Khashoggi: un procès opaque

AFP

​Ryad - Cinq Saoudiens ont été condamnés à mort par un tribunal de Ryad pour l'assassinat du journaliste Jamal Khashoggi en octobre 2018.

Collaborateur du Washington Post et critique du prince héritier Mohammed ben Salmane, ce journaliste saoudien a été démembré par une équipe de 15 agents à l'intérieur du consulat du royaume à Istanbul. Ses restes n'ont pas encore été retrouvés.

Voici ce que nous savons des Saoudiens accusés d'avoir participé à ce meurtre ayant déclenché un tollé international.

Au total, 31 personnes ont fait l'objet de l'enquête sur le meurtre de Jamal Khashoggi, a déclaré lundi dans un communiqué le procureur général saoudien, sans les identifier.

Sur les 31 suspects, 21 ont été arrêtés et 10 autres ont été convoqués pour être interrogés, a-t-il dit.

Onze personnes ont été inculpées et leur procès s'est tenu devant le tribunal pénal de Ryad.

Seuls des diplomates des membres permanents du Conseil de sécurité de l'ONU (Grande-Bretagne, Chine, France, Russie et Etats-Unis) ainsi que la Turquie ont été autorisés à assister au procès.

Le procureur a déclaré que cinq personnes ont été condamnées à mort pour "leur participation directe au meurtre".

Il a ajouté que trois autres personnes ont été condamnées à diverses peines de prison, totalisant 24 ans, "pour avoir dissimulé ce crime et avoir violé la loi".

Les charges ont été abandonnées contre trois des onze personnes inculpées faute de preuves, a encore indiqué le procureur, affirmant que "le meurtre n'a pas été prémédité et qu'il a été commis dans le feu de l'action".

Deux des principaux collaborateurs du prince héritier Mohammed ben Salmane ont été disculpés faute de preuves, selon le procureur général.

Il s'agit de l'ancien chef adjoint des services de renseignement, le général Ahmed al-Assiri et de l'ancien conseiller à la cour royale, Saoud al-Qahtani.

Ils ont tous deux été limogés après le meurtre, mais seul le général Assiri a assisté au procès.

L'année dernière, les Etats-Unis ont imposé des sanctions économiques à 17 Saoudiens, dont M. Qahtani, pour l'assassinat de Khashoggi.

Le Trésor américain a indiqué que M. Qahtani faisait "partie de la planification et de l'exécution de l'opération qui a conduit à l'assassinat" de Jamal Khashoggi.

Cet ancien conseiller n'est pas apparu en public depuis le meurtre et on ignore où il se trouve.

Le procureur saoudien a innocenté le prince héritier.

Ce dernier a déclaré à la télévision américaine PBS cette année qu'il acceptait la responsabilité du meurtre, parce qu'il s'est produit "sous son règne" tout en niant en avoir eu connaissance auparavant.

Mais Agnès Callamard, rapporteure spéciale de l'ONU sur les exécutions sommaires, a déclaré que son enquête indépendante avait trouvé des "preuves crédibles" le reliant au meurtre.

La CIA américaine aurait également conclu que le prince, qui contrôle tous les leviers du pouvoir, a probablement ordonné le meurtre.

Une altercation physique après l'entrée de Jamal Khashoggi dans le consulat a conduit à ce qu'il soit "retenu de force et qu'on lui injecte une grande quantité de drogue, ce qui a entraîné une overdose qui a conduit à sa mort", a indiqué le procureur saoudien.

Il a ajouté que son corps a ensuite été démembré, "transféré hors du consulat" et remis à un "collaborateur" non identifié.

On ignore toujours ce qui a été fait des restes du journaliste.

Selon Mme Callamard, les transcriptions audio du déroulement crime montrent que les agents saoudiens impliqués ont qualifié le journaliste d'"animal sacrificiel".

Ces agents ont également été entendus plaisanter et parler de démembrement avant son arrivée au consulat, selon des enregistrements secrets entendus par les enquêteurs de l'ONU.


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