Afghanistan: la France met fin à sa mission de combat en quittant la Kapisa
AFP
Base de Nijrab (Afghanistan) - L'armée française a mis fin mardi à sa mission de combat en Afghanistan en quittant la Kapisa, la province la plus meurtrière pour elle depuis 2001, sonnant l'heure du retour pour les soldats qui y étaient déployés, conformément à son calendrier de retrait accéléré.
En se repliant sur la capitale, l'armée française revient à une configuration proche de celle existant avant 2007, avant que le président de l'époque Nicolas Sarkozy ne décide d'accroître la présence militaire pour, à la demande des Américains qui dirigent l'Isaf, aller davantage au contact des insurgés en Kapisa (80 km au nord-est de Kaboul) et dans le district voisin de Surobi.
Les rebelles talibans ont aussitôt salué cette "bonne initiative" et ont appelé tous les pays membres de l'Otan à "suivre l'exemple de la France" -- bien que le retrait français prévu à la fin 2012 ne soit pas total -- et à "mettre fin à l'occupation de l'Afghanistan" en quittant le pays.
Le ministère afghan de la Défense a de son côté remercié, sans nommer de pays en particulier, "toutes les forces étrangères qui ont combattu en Afghanistan" en jugeant que ses forces de sécurité étaient désormais "prêtes à prendre la relève".
Les 400 derniers militaires français déployés en Kapisa ont commencé à 10H00 (05H30 GMT) à partir en convoi de Nijrab, la dernière base qu'ils occupaient dans cette province, pour Kaboul, selon un journaliste de l'AFP.
Auparavant, les couleurs françaises y avaient été baissées pour céder la place aux seules couleurs afghanes au cours d'une cérémonie.
Le général Eric Hautecloque-Raysz, commandant de la force Lafayette -- les troupes françaises déployées en Kapisa et dans le district voisin de Surobi, où elle ont passé plus tôt cette année le relais de la sécurité aux Afghans -- a estimé que tous ses soldats mobilisés autour de cette "mission exaltante et riche" avaient vécu une "exceptionnelle aventure".
Entamée en 2008, la mission en Kapisa, province très infiltrée par les rebelles talibans et du Hezb-e-Islami, était considérée comme la plus difficile pour les Français en Afghanistan depuis leur arrivée dans le pays.
L'armée française dit aujourd'hui laisser derrière elle un territoire relativement apaisé, ce que confirme l'armée afghane, même si le général Kohsar Mardhel, chargé de coordonner les forces afghanes dans la province, estime que deux des six districts de Kapisa sont en partie contrôlés par les insurgés, au nombre de 500 l'été et 250 l'hiver.
Les affrontements avec les insurgés s'y sont multipliés. Plus de 60% (54 sur 88) des soldats français morts dans le pays depuis 2001 y ont péri, dont les cinq abattus par un soldat afghan alors qu'ils faisaient leur jogging dans une base militaire en janvier dernier.
Après cette attaque, le président Sarkozy avait décidé d'accélérer le retrait français à 2013. Son successeur François Hollande a avancé l'échéance à la fin 2012.
Cet incident était la première en 2012 de ces attaques meurtrières de forces afghanes contre leurs alliés de l'Otan qui nourrissent sérieusement les doutes sur les capacités des forces locales à maintenir la sécurité du pays après 2014.
Au plus fort de son déploiement en Kapisa et à Surobi, qu'elle contrôlait avant de passer le relais aux forces afghanes cette année, la France y comptait environ 2.500 soldats.
La sécurité de Kapisa sera désormais assurée par 4.700 policiers et militaires afghans, épaulés par quelque 250 soldats américains, selon le général Hautecloque-Raysz, optimiste sur la capacité des troupes afghanes à contenir l'insurrection. L'un des responsables locaux de l'armée afghane, le colonel Baba Gul Haqmal, s'est dit mardi "confiant" à ce propos, tout en soulignant que ses troupes manquaient d'"artillerie et de forces aériennes".
Malgré onze années de combats, la coalition occidentale n'a jamais pu se défaire de l'insurrection menée par les talibans qu'elle avait chassés du pouvoir, faisant craindre à certains une guerre civile après le départ de l'Otan fin 2014, voire le retour au pouvoir des talibans.