Alcool : les "open-bars" seront interdits, pas les "dégustations"

Le Monde.fr/Cécile Prieur

Affluence des grands soirs à l'Assemblée nationale : les députés ont entamé, dans la nuit de jeudi 5 à vendredi 6 mars, l'examen des dispositions concernant la lutte contre l'alcoolisation des jeunes contenues dans le projet de loi "Hôpital, patients, santé, territoire".

Alcool : les
Venus en nombre des régions viticoles, plusieurs députés ont défendu les intérêts de la filière vin, qui s'estime menacée par le projet de loi. "Ne faisons pas du vin le bouc émissaire de notre société", a plaidé Alain Suguenot (UMP, Côte d'Or), résumant le sentiment d'une vingtaine d'orateurs.
Pour les contenter, le gouvernement à donner son accord à un amendement de précision : l'interdiction de la vente d'alcool au forfait (pratique des "open-bars") ne concernera pas les "dégustations, fêtes et foires traditionnelles".
La principale disposition du texte, qui interdit la vente d'alcool aux mineurs de moins de 18 ans, contre 16 ans aujourd'hui, ne fait plus guère débat. Les alcooliers et la filière viticole s'y sont ralliés tandis que les députés, qui ont repoussé son adoption à lundi 9 mars, ne la contestent pas.
Difficile en effet de s'opposer à l'argumentation du gouvernement : l'interdiction vise à donner un coup d'arrêt au phénomène de "binge drinking" (alcoolisation rapide et massive des jeunes) en nette progression. Alors que les ivresses répétées concernaient 20 % des jeunes de 17 ans en 2002, elles en concernent 26 % aujourd'hui.
Moins consensuelle était la question de l'interdiction de la vente au forfait, dans lequel la filière viticole a crû déceler une attaque directe contre le principe de la dégustation gratuite. La révélation, le 17 février, par l'Institut national du cancer, d'une étude mettant en valeur le risque accru de cancer à partir d'un verre d'alcool par jour, a mis de l'huile sur le feu.
Dans un contexte de perte de parts de marchés pour la France sur le marché mondial, la profession a exigé d'être entendue : le président (UMP) de la commission des affaires économiques, Patrick Ollier, est venu lui-même soutenir l'amendement destiné à clore la polémique.
Extension de la publicité à Internet
L'opération de déminage sera plus délicate, lors de la reprise de la discussion, lundi, quand il s'agira d'étendre la publicité pour l'alcool à Internet. Reprenant les arguments de la filière vin, la ministre de la santé, Roselyne Bachelot, est favorable à un toilettage de la loi Evin, adoptée en 1991 quand Internet n'existait pas.
Elle y a mis pour condition que la publicité pour l'alcool soit interdite sur les sites destinées à la jeunesse et aux sports et qu'elle ne concerne pas les messages intrusifs comme les "pop-ups".
Les défenseurs de la santé publique critiquent ces restrictions en faisant valoir qu'elles "n'auront aucune portée réelle". Réunis dans un collectif, ces associations soutiennent un amendement défendu par les députés Yves Bur (UMP, Bas-Rhin) et Jean-Marie Le Guen (PS, Paris) qui limite la publicité pour l'alcool aux "seuls sites des producteurs et des distributeurs".
"Cet amendement constitue un bon compromis entre les intérêts économiques des producteurs et ceux de la santé publique", estime le collectif dans un communiqué. Tout autre choix, selon lui, ouvrirait "un boulevard à la Drinks Industry internationale qui a les moyens financiers de submerger la Toile avec toutes sortes de publicité".


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