Assassinat du photographe Christian Poveda: la profession sous le choc

AFP

Paris - L'assassinat au Salvador du réalisateur de documentaires et reporter-photographe français d'origine espagnole Christian Poveda, où il avait tourné un film sur les gangs, a laissé jeudi une profession "sous le choc".

Christian Poveda
Christian Poveda
"On est tous sous le choc. Tout le monde lui disait que c'était dangereux. Lui, il disait être sûr qu'il ne courait aucun risque. Il était heureux que son film sorte fin septembre, c'était enfin une reconnaissance de son travail après de nombreuses années", a déclaré à l'AFP, ému, Jean-François Leroy, fondateur du festival de photojournalisme Visa pour l'image à Perpignan.

Ce film, intitulé "La vida loca" (La vie folle), sortira dans 130 salles en France le 30 septembre. Il traite des "maras", gangs de jeunes salvadoriens, tatoués de la tête aux pieds, qui se livrent au trafic de drogue et aux extorsions, en faisant preuve d'une extrême violence.

Selon la police, le réalisateur, âgé de 54 ans, a été assassiné par balles sur une route au nord de San Salvador. Il revenait d'un tournage dans la banlieue de La Campanera, contrôlée justement par ces gangs.

"Les journalistes méritent qu'on s'intéresse à la manière dont ils meurent, surtout des journalistes de cette trempe. Cristian Poveda est mort pour l'info, pour servir notre métier, pour servir les citoyens qui ont besoin de journaux et d'image", a déclaré à l'AFP Hervé Chabalier, Pdg de l'agence Capa dont une équipe va partir au Salvador pour enquêter sur la mort de Poveda.

Pour Alain Mingan, ancien photojournaliste et ami du documentariste, ce dernier était "un grand professionnel, respecté de tout le monde dans le photojournalisme et le monde documentaire".

"Il a voulu rendre compte de ce qui restait d'humanité dans ce monde de violence et c'est lui qui en paie le prix", ajouté M. Mingan.

Le secrétaire général de Reporters sans frontières, Jean-François Julliard, a annoncé jeudi à l'AFP qu'il avait demandé un rendez-vous au chef de l'Etat salvadorien, Mauricio Funes, un ancien journaliste.

Pour le secrétaire général de RSF, Poveda a probablement été "victime d'un règlement de compte des gangs sur lesquels il enquêtait, un milieu impénétrable sur lequel même la justice locale n'a aucune prise".

Christian Poveda "lèguera une tradition de documentaires de qualité qui prennent le temps. Il était de ceux qui avaient le luxe de pouvoir prendre le temps d'enquêter longuement sur les sujets sur lesquels ils travaillent, de connaître la population sur laquelle il enquête", a-t-il ajouté.

Poveda a publié des reportages, en particulier sur l'Amérique Latine, dans de nombreux journaux et magazines, notamment El Pais, Le Monde, Le New York Times, Paris Match ou Stern.

Ses documentaires ont été diffusés par plusieurs télévisions dans le monde et présentés dans plusieurs festivals de cinéma.

"Toute la lumière doit être faite sur les circonstances de cet assassinat", a dit le ministre des Affaires étrangères Bernard Kouchner.


Commentaires (0)
Nouveau commentaire :