Benoît XVI a traîné des pieds pour défroquer un prêtre pédophile californien, révèlent des lettres
AFP
Los Angeles - Le pape Benoît XVI, soucieux du "bien de l'Eglise universelle", a traîné des pieds, dans les années 80, pour défroquer un prêtre californien accusé de pédophilie, révèlent des lettres échangées entre le Vatican et le diocèse californien d'Oakland.
Le pape Benoît XVI
A sa propre demande, le père Kiesle avait demandé à être défroqué, une requête relayée auprès du Vatican par l'évêque d'Oakland John Cummins en 1981.
Le Vatican répondit à l'évêque qu'il souhaitait obtenir des informations supplémentaires sur l'affaire. Elles furent envoyées par John Cummins en février 1982 au cardinal Joseph Ratzinger, futur Benoît XVI, alors à la tête de la Congrégation pour la doctrine de la foi.
Il écrivait dans son courrier qu'il avait la "conviction" que défroquer le père Kiesle "ne ferait pas scandale", ajoutant: "ce serait un scandale plus grand pour la communauté si le père Kiesle retrouvait son ministère".
Malgré les demandes répétées du diocèse d'Oakland, il faudra attendre le 6 novembre 1985 pour que Joseph Ratzinger réponde à John Cummings.
Dans cette réponse, rédigée en latin, le cardinal reconnaît la "gravité" de la situation mais se montre réticent à prendre une décision immédiate, soucieux des effets qu'elle pourrait avoir sur "le bien de l'Eglise Universelle".
Pour le futur pape, l'affaire doit faire l'objet "d'une attention particulière, qui nécessite beaucoup de temps".
A la lecture de cette lettre, le père George Mockel, du diocèse d'Oakland, avait estimé que le Vatican "allait s'asseoir sur l'affaire jusqu'à ce que Steve (Kiesle) devienne un peu plus âgé. Je pense que c'est regrettable".
Le père Kiesle fut finalement défroqué en 1987. Selon M. Anderson, un an plus tard, il travailla pendant huit mois comme coordinateur des activités pour les jeunes dans la paroisse californienne de Pinole.
Un porte-parole du Vatican, Ciro Benedettini, a assuré vendredi à l'agence Ansa que "l'alors cardinal Joseph Ratzinger n'a pas couvert le cas, comme il est clairement compréhensible en lisant la lettre, mais il a fait état de la nécessité d'étudier le cas avec une attention majeure, en ayant présent à l'esprit le bien de toutes les personnes impliquées".
Interrogé par l'AFP, Jeff Anderson affirme pour sa part que les documents montrent de façon "incontestable que le cardinal Ratzinger et le Vatican ont étouffé et continuellement nié" les affaires de pédophilie au sein de l'Eglise.
L'Eglise est secouée ces dernières semaines par une série de scandales pédophiles, accusée d'avoir gardé le silence sur des abus commis par des prêtres ou des religieux. Benoît XVI lui-même a été éclaboussé par ces scandales, accusé d'avoir couvert les abus quand il était à la tête de la Congrégation pour la doctrine de la foi.