Berlinale: Depardieu, vieux "loser" dans le tragi-comique "Mammuth"
AFP
Bérlin - Présentée vendredi "Mammuth", comédie décalée avec Gérard Depardieu en pathétique motard retraité au coeur tendre, est l'unique film français dans une Berlinale dont la compétition s'achève samedi et pour beaucoup n'aura pas été un grand cru.
Isabelle Adjani et Gérard Depardieu
Le panel des huit critiques internationaux réunis par le magazine Screen pour cette 60e édition n'a attribué une moyenne de trois étoiles (qui correspond à "bon film") qu'à un seul long métrage : le Russe "How I ended this summer" d'Alexei Popogrebsky.
A la veille de la remise des Ours d'or et d'argent remis par le jury que préside le cinéaste allemand Werner Herzog, le tandem français Benoît Delépine et Gustave de Kervern est entré en lice avec le monstre sacré du cinéma hexagonal, Gérard Depardieu.
D'emblée "Mammuth" s'inscrit dans un registre ultra-réaliste et impose sa drô lerie impertinente et tragi-comique avec une scène tournée dans un abattoir.
Suspendues à un croc, des carcasses de boeufs défilent et sont découpées par des hommes. Massif et empâté, l'un d'eux (Gérard Depardieu) se laisse lourdement tomber sur un banc: l'heure de la retraite a sonné.
Après un "pot" d'adieu grotesque et impersonnel, le voilà jeté au rebut, seul face au gouffre d'interminables journées vides, hanté par la mort d'un amour de jeunesse (Isabelle Adjani).
Pressé par sa femme (Yolande Moreau), le héros part sur les routes à la recherche d'anciens employeurs qui lui délivreront les attestations de travail nécessaires à l'obtention de sa pension.
Dans cette quête, Depardieu roule au guidon d'une moto mythique, fabriquée artisanalement dans les années 1970 et équipée d'un moteur de voiture NSU ultra-puissant pour l'époque, qui fut refabriquée en petite série en 2000: une Munch Mammuth.
S'ensuit un périple émaillé de rencontres truculentes, avec une auto-stoppeuse (Anna Mouglalis), un curieux plagiste (Benoît Poelvoorde), un viticulteur (le dessinateur Siné) ou son étrange nièce "artiste" (Miss Ming).
Quatrième long métrage du duo après "Aaltra" (2004) "Avida" (2006) et "Louise Michel" (2008), "Mammuth" est porté par l'humour noir et le ton décalé, loufoque et poétique, des deux compères popularisés en France par l'émission comique Groland, diffusée sur Canal+.
Si la galerie de personnages excentriques croisés par le héros finit par donner au film un cô té anecdotique, sa première moitié n'en brosse pas moins le portrait poignant d'un homme à la limite de la marginalité, brisé par la vie.
"Mammuth" porte un regard tendre sur ce géant timide et désarmé devant les difficultés, joué avec générosité par un Gérard Depardieu qui livre sans pudeur à la caméra son corps au volume impressionnant.
De son cô té Yolande Moreau -- qui a obtenu deux César, les Oscars du cinéma français, pour ses rô les dans "Quand la mer monte" (2004) et "Séraphine" (2008) -- apporte à l'épouse du héros son grain de folie coutumier.
"Mammuth" est l'un des 20 titres en compétition en lice pour les prix décernés samedi.