Ces étranges sculptures qui font bouger les murs

Le Monde.fr/Emmanuelle Lequeux

L'air de rien, les huit jeunes artistes rassemblés par l'Institut d'art contemporain de Villeurbanne nous offrent une des plus belles expositions de sculpture de l'année. L'air de rien, tant leurs oeuvres jouent du vide et façonnent le néant.

Ces étranges sculptures qui font bouger les murs
Réunis sous le label de "fabricateurs d'espaces", ces trentenaires représentent une tendance nouvelle de la sculpture : aller vers l'épure. Ils sont donc très loin des objets spectaculaires et kitsch d'un Jeff Koons. Loin aussi des propositions éclectiques d'artistes de la même génération qu'eux, qui fondent les formes populaires en des assemblages hétéroclites.

Héritiers malins du minimalisme, ils réinventent le genre avec des propositions aussi fragiles que fascinantes. Ici, l'espace est un concept surpris en plein chantier : c'est ce que semble annoncer la palissade posée par l'Autrichien Hans Schabus en guise d'entrée. Reprenant le rythme d'une partition, ces planches de bois brut donnent le la de cette exposition qui, à partir de rien, propose beaucoup.


EXPLORER LA NEIGE


Les ailes du moulin hollandais implantées par le Français Guillaume Leblon brassent l'air alentour et semblent repousser les murs. Le même artiste fait sourdre de la salle suivante une fumée blanche, sculpture jamais aboutie. En perpétuelle recomposition, elle répond à d'autres oeuvres tout aussi ténues : celle du Français Evariste Richer, qui pose dans un coin des bâtons destinés à explorer la neige après une avalanche, mais qui semblent sonder ici l'atmosphère. Ou celle du Danois Jeppe Hein, qui fait insensiblement bouger une cimaise.

La sculpture de Michael Sailstorfer ne se laisse, elle, découvrir qu'une fois la nuit tombée : l'artiste allemand a créé une colonne de lumière immense, aux couleurs changeantes, que des milliers de watts éclairent au-dessus de l'Institut.

A chaque fois, le visiteur voit son corps déjoué, appelé, avalé, ou contraint. L'Américaine Rita McBride lui impose un cheminement difficile en posant une grille de métal à hauteur de torse.

Avec sa sobriété toute métaphysique, l'Allemand Björn Dahlem concocte un trou noir bricolé de quelques bouts de bois et néons. Quant au Français Vincent Lamouroux, il propose un troublant paysage : sous une lumière irradiante, des cubes sortent du sol et des murs, icebergs parfaitement géométriques partis en dérive loin de notre époque du tout-virtuel. A embrasser ainsi superbement le vide, cette nouvelle génération d'artistes compose une exposition dont la respiration repose de toutes les dérives kitsch ou matérialistes de l'art contemporain.

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"Fabricateurs d'espace", Institut d'art contemporain, 11, rue Docteur-Dolard, Villeurbanne (Rhône). Le mercredi et le vendredi de 13 à 18 heures, le jeudi de 13 à 20 heures, samedi et dimanche de 13 à 19 heures. Jusqu'au 4 janvier 2009. Tél. : 04-78-03-47-00. www.i-art-c.org. De 2,50 € à 4 €.


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