Crise du crédit en Allemagne: les différents acteurs se jettent la pierre
AFP
Francfort - Le gouvernement fédéral, la Bundesbank, les fédérations de secteurs: un torrent de reproches s'abat sur les banques allemandes, accusées de corser l'accès au crédit des Petites et moyennes entreprises (PME) et de faire vaciller le socle de l'économie du pays.
Le nombre d'emplois concernés dépasse les 250.000, et l'association prévoit la disparition de 540.000 emplois d'ici la fin de l'année en raison des dépôts de bilan.
Les restrictions d'accès au crédit jouent un rôle important dans cette flambée de faillites qui touche de plein fouet les PME, vitales pour l'industrie allemande, estime la plupart des administrateurs judiciaires sondés par le Centre de recherche sur les entreprises en difficulté ZIS.
"Obtenir un crédit est devenu très difficile", juge Markus Ernestus, un administrateur judiciaire interrogé par l'AFP. "Même les entreprises qui ont un besoin de trésorie temporaire pour honorer des commandes se voient refuser un prêt".
La Banque centrale européenne a eu beau abaisser son principal taux directeur de 4,25% au niveau historique de 1%, rien n'y fait jusqu'à présent.
"Les banques n'ont pas baissé (leurs taux d'intérêt) afin d'accroître leurs marges de profit, et ont relevé leurs surcharges risques", selon Karl-W. Giersberg, président de l'association fédérale du capital pour les PME (BKM).
En outre, elles sont mises sous pression par des exigences de réserves de capitaux propres par rapport à leurs engagements de crédit. Pour rassurer les investisseurs en Bourse, et soutenir le cours de leur action, elles cherchent souvent à faire mieux que les normes internationales en la matière.
En conséquence "une crise du crédit massive" est à craindre d'ici la fin de l'été, a récemment prévenu Anton Börner, président de la fédération allemande des exportations (BGA).
Les banques allemandes récusent les accusations, chiffres à l'appui: les banques coopératives ont livré 164 milliards d'euros aux entreprises du pays au premier trimestre, soit une hausse de 4,7% sur un an. Et la banque privée Commerzbank signale un volume de crédits distribués aux PME "en légère progression" à 102 milliards d'euros sur la même période.
"Le refinancement des banques (via le prêt interbancaire) est devenu plus coûteux", explique un porte-parole de Commerzbank interrogé par l'AFP. "Et les soucis concernant les défauts de paiement des entreprises ont globalement augmenté".
Pour raviver les prêts entre banques, la Banque centrale européenne (BCE) abreuve depuis des mois le marché monétaire de liquidités bon marché. Mercredi, elle a alloué un montant massif de plus de 442 milliards d'euros à 1.100 banques via sa première opération de refinancement sur un an.
"Il n'y a aucune raison de refuser du crédit en Allemagne en prétextant un manque de capitaux", avait aussitôt réagi le ministre allemand des Finances Peer Steinbrück après la décision de la BCE.
Le président de la Banque centrale allemande (Bundesbank), Axel Weber, a également encouragé les instituts de crédit à prêter davantage.
Un projet de loi du gouvernement devant être voté vendredi prochain au Bundestag prévoit la mise en place de structures de défaisance ("bad banks") au sein des banques du pays, pour évacuer leurs actifs dégradés qui perturbent leur activité de prêt. Cependant cette solution ne soulève pas leur enthousiasme, car elles jugent ses conditions trop sévères.
Berlin étudierait aussi la possibilité de venir prochainement en aide aux assureurs-crédit, qui couvrent les risques d'impayés des clients des entreprises, selon la presse allemande.