Edgar Sosa: un champion du monde s'entraîne dans la rue
AFP
Mexico - Edgar Sosa a beau être champion du monde professionnel depuis deux ans, le boxeur mexicain reste fidèle à la "salle d'entraînement" de ses débuts, sur le terre-plein central d'une grande avenue de Mexico.
Chaque matin, à 5h00, Miguel Angel "El Raton" ("la souris") Gonzalez, un ancien professionnel, ouvre le "Gymnase Diaz Miron", du nom du quartier, au beau milieu de l'avenue. L'endroit est gratuit, ce qui explique sans doute son succès.
Le soir, à 22h00, on ferme et on range dans une guérite le peu d'équipement du club: sacs de sable, gants, casques et cordes du ring.
C'est là qu'Edgar Sosa, 29 ans, prépare actuellement la neuvième défense de son titre, prévu le 20 juin. C'est là aussi qu'il avait mis les gants pour la première fois, voici quinze ans.
"Nous nous sommes toujours entraînés ici. Les gens nous aiment bien, et c'est à cinq minutes à pied de chez moi. On se sent à l'aise", explique-t-il à l'AFP en entourant ses poings de bandelettes avant d'affronter deux "sparring-partners".
"Ici, pas de différences entre boxeurs, professionnels ou non, nous sommes tous égaux. Pas comme dans d'autres salles, à moitié élitistes", ajoute-t-il.
Autour de lui, une trentaine de jeunes frappent dans les sacs, sautent à la corde et courent au long d'un circuit dessiné sur la "rambla".
"Ils viennent de toute la ville, et certains font deux heures de bus pour arriver jusqu'ici. Leur motivation est de s'entraîner avec Edgar, et avec +Johnny+ Gonzalez", commente "El Raton".
"Johnny" Gonzalez, 27 ans, ancien champion des super-coq, est le propre fils de Miguel Angel.
Bientôt un toit
Ce dernier a créé son "gymnase" au début des années 90, "pour apprendre à Johnny à se défendre". Ils ont été rejoints par Edgar et ses frères puis d'autres jeunes du quartier.
"Au début, on ne les faisait pas payer, mais ils se sont mis à me donner volontairement 10 pesos (0,55 euro) ou 50 par semaine", se rappelle "El Raton", qui exhibe fièrement son palmarès de 17 victoires consécutives.
L'an dernier encore, le "gymnase" n'avait pas de toit, alors même qu'Edgar et "Johnny" étaient déjà parmi les meilleurs au monde dans leur catégorie. Ils s'arrangeaient pour installer une bâche pour s'abriter de la pluie ou du soleil.
Pendant des années, "El Raton" a demandé en vain aux autorités du quartier un local mieux adapté au standing sportif de ses deux vedettes et aux besoins de ses autres protégés.
Mais cela va changer, "grâce à la presse, à la télévision", explique-t-il: la municipalité de Mexico City a décidé d'équiper une salle, et elle devrait être prête en juin.
"L'accès restera gratuit", affirme-t-il encore. Il vit des contributions de ses élèves et d'un pourcentage sur les bourses des grands combats de ses vedettes.
Edgar Sosa empoche environ 100.000 dollars à chaque défense de son titre, mais n'a aucune intention de quitter son quartier, et encore moins son camp d'entraînement. Sa recette: "pas besoin d'un bel endroit pour rêver, mieux vaut le travail".